« Je n’ai jamais touché Monica Lewinski ; je le jure » (William B Clinton)         

La parole des enfants est-elle autrement fiable que   celle des présidents ?

 

Corollairement à cet article, je vous invite à regarder le document vidéo 

: Authenticité et fiabilité de la parole de l'enfant. (nb vidéo de 60'; met 2-3' pour se charger)

  :

La capacité d’être fiable et sa mise en œuvre concrète

 

 

 

Cet article discute de la fiabilité  de la parole de l’enfant (2). Le terme est synonyme aux expressions   « dire la vérité (des faits) ; être objectif ; être digne de foi » La parole (3) de l’enfant est fiable (4) lorsque, dans une circonstance donnée, elle restitue fidèlement sa connaissance exacte de la réalité extérieure ou de la réalité de soi en tant qu’objet de connaissance.

L’authenticité, elle concerne la restitution de son propre monde intérieur ou de celui des autres, tel qu’on se le représente. 

Une parole fiable dit : « Mon frère m’a battu, j’ai des bleus et j’ai mal » ( pour peu que ce soit vrai …) et si elle est authentique, elle peut ajouter : « J’ai eu peur … je crois qu’il est jaloux de moi » ( parce que c’est ce que l’enfant vit autour de l’événement )

 

Fiabilité et authenticité ne sont pas toujours strictement liées, quoique des mécanismes très analogues mettent en place l’une ou l’autre de ces qualités de l’être et de son discours.

 Faute de place, je n’en dirai pas plus dans ce texte, sur l’authenticité et ses dérivés ( par exemple : le conformisme ; l’impertinence ; les jardins secrets …)

 

Très précocement, l’enfant en bonne santé mentale et sans déficits cognitifs importants dispose d’un équipement qui permet à sa parole d’être « suffisamment bien » fiable.

Suffisamment bien ? Je paraphrase ce que Winnicott disait de la vraie bonne mère, qui n’est jamais que suffisamment bonne : la perfection n’est pas de ce monde et la volonté d’excès nuit au bien … 

L’équipement nécessaire porte sur les composants de l’appareil neuropsychologique et la bonne harmonisation de leur fonctionnement : intelligence globale ; circuits de perception, de reconnaissance et d’intégration des perceptions, synthèses mentales, mémoire et capacité de réévocation. On peut y ajouter l’« intelligence sociale », à l’origine de l’intuition et de la reconnaissance des intentions de l’autre.

Certes, aucun enfant ne ressemble à un autre ;certains sont plus vifs et d’autres plus lents ; mais en moyenne, d’indiscutables îlots de fiabilité commencent à se manifester vers deux ans, peu après l’avènement du langage et la formation des premières phrases simples ; au début, ils étonnent : « Il se souvient déjà … il sait à quoi ça sert ! » ; ces îlots fiables sont d’abord imprévisibles, irréguliers et accompagnés de peu de détails : le tout petit enfant peut déjà montrer qu’il se souvient d’événements qui l’ont marqué ou raconter des éléments de la vie quotidienne avec un vocabulaire ( très ) limité mais exact. « Tu t’amuses à l’école ?», demande-t-on à Amélie ( trois ans tout juste )… et elle de répondre « Madame Mylène a gondé moi paske pipi » … Eh oui, il arrive encore à Amélie de s‘oublier et, pendant quelques jours, ce sera le seul souvenir qu’elle pourra évoquer de son quotidien scolaire, histoire de se libérer du traumatisme de sa honte et de la mauvaise humeur de sa Madame …. 

 Chez le tout petit, des comptes-rendus encore erratiques de la réalité se mélangent à des erreurs de bonne foi liées à l’immaturité de son appareil cognitif, erreurs plus fréquentes quand il cherche à comprendre la vie quotidienne que lorsqu’il décrit ses premiers souvenirs. A d’autres moments, c’est son imagination qui est au pouvoir pour compenser les lacunes de ses connaissances, mais il ne le sait pas, et il peut présenter mille productions de celle-ci comme vraies, ici encore davantage lorsqu’il cherche à expliquer ce qui se passe que lorsqu’il décrit simplement. 

Sa connaissance de la réalité et sa capacité d’en parler croissent rapidement et à quatre ans, sa fiabilité peut être solidement installée : il connaît beaucoup de choses, même les implicites, même les affectives, et lorsqu’il a confiance, il fait part ingénument de ce qu’il sait. « Alors, il va bientôt mourir, bon papa ? », nous demandait mon petit-fils de trois ans et demi, en regardant son arrière-grand-père terminant doucement sa vie dans un service de soins palliatifs. Personne ne lui en avait déjà  parlé et personne n’en parlait à haute voix !

Le petit enfant est donc déjà outillé pour réévoquer « le cœur », « le centre » d’une action dont il aurait été témoin ou partie-prenante. Mais sa capacité de restituer des détails contextuels est beaucoup plus faible ou erratique, et dans une perspective criminologique, on considère tout simplement qu’il  est incapable d’en fournir. 

Et la capacité d’être fiable, avec de plus en plus de détails et de précisions, ne fait que s’accroître jusqu’au milieu de l’adolescence, pour plafonner ensuite. 

 

Cette capacité peut néanmoins être entravée

 

Elle l’est par des problématiques sensorielles, cognitives ( retard mental important ) ou psychotiques. Ici, l’éventuelle restitution est pauvre, fragmentée, obscure ou amputée par les lacunes sensorielles. Plus rarement, chez les enfants psychotiques et quelques intellectuellement déficitaires l’imagination est abondante, avec des confusions réel-imaginaires ou de vrais délires. Ces enfants sont menacés d’agressions diverses, plus que les autres, et ils essaient eux aussi d’en rendre compte. Mais le décodage est ardu et demande des compétences techniques spécifiques ( Hayez, de Becker, 1997, p. 172 ). Je n’en dirai pas plus à leur propos dans le cadre de cet article. 

 

Des facteurs conjoncturels peuvent également influencer la capacité concomitante de fiabilité : 

 

  • Une intensité excessive des affects du moment. Des émotions trop fortes amènent souvent des erreurs de bonne foi ; elles portent le plus souvent sur les intentions en jeu, sur l’interprétation à donner aux faits que sur les faits eux-même ; un enfant dépressif regarde le monde avec des lunettes noires ; un préadolescent en quête intense d’amour peut interpréter un geste spontanéde tendresse comme de la séduction sexuelle non-avouée ; par contre, l’enfant simplement heureux de vivre a envie de bien « capter » le monde dans lequel il évolue et d’en parler.
  • Les attitudes coutumières des autres. Si ceux-ci accueillent positivement l’enfant quand il parle et s’ils s’intéressent à ce qu’il dit, en sachant se différencierde lui  à l’occasion, ces autres lui donnent envie d’être authentique et fiable. Surtout si, de surcroît, l’enfant tire parfois des bénéfices moraux ou matériels de sa fiabilité. Mieux encore, si ses proches lui manifestent qu’ils l’apprécient particulièrement lorsqu’il dit vrai dans des situations embarrassantes ( maladresses, fautes commises, etc.) … L’attitude inverse éteint l’envie d’être tant authentique que fiable. 

A l’inverse, les autres peuvent exercer des pressions en tous genres sur l’enfant pour qu’il fasse sienne leur version de la réalité. Pas toujours facile d’y résister lorsque la pression est puissante – répétitive et assortie de menaces ou de chantages – et  qu’elle émane d’un personnage très important, la maman ou le papa par exemple :  la grande majorité des enfants très jeunes et même la majorité de ceux de l’école primaire n’y résistent pas : ils mentent, comme le veut l’adulte, pour avoir la paix ; ou encore, parce qu’ils y sont prédisposés par leur nature, par des déficits perceptifs ou/et cognitifs ou par des circonstances affectivo-relationnelles plus transitoires, ils se laissent suggestionner (5), c’est à dire que, superficiellement, ils se font à l’idée que ce qu’on leur souffle à l’oreille est vrai ; chez certains, mensonges et suggestibilité s’entremêlent. En outre, une fois qu’ils ont commencé, les enfants s’accrochent à ce qu’ils ont dit, pour des raisons que je développerai plus loin.

C’est seulement si les pressions ne surviennent que plus tard dans leur vie que préadolescents et adolescents y résistent mieux, et ce n’est jamais certain ! Entre autres, à ces âges plus avancés de la vie des jeunes, les pairs peuvent se mettre à constituer une source de pressions efficaces : on peut alors « se monter le bourrichon » en petit groupe, pour se persuader de la bêtise, de la méchanceté … ou des déviances sexuelles d’un tiers. Difficile de faire marche arrière quand on est entré dans ce genre de jeu : ce serait la honte et le rejet par les copains !  

Et nous arrivons de la sorte au «  facteur ultime », celui de la liberté :

 

Supposons qu’un enfant  ne soit pas entravé par les éléments défavorables énumérés plus haut. Il ne transforme pourtant pas ipso facto sa capacité d’être fiable en réalité opérante. Entre en jeu une Instance psychique que, selon nos écoles, nous désignons par des vocables différents, renvoyant approximativement à la même réalité intérieure fondamentale : sa liberté ( intérieure ) ; sa capacité d’avoir des désirs propres ; son projet ( de vie ) … bref, il va choisir de rendre son potentiel de fiabilité opérationnel ou non. 

  • Non ? Il peut choisir de mentir, c’est à dire de falsifier intentionnellement ce qu’il pense être la réalité des faits. Les mensonges s’installent très précocement dans la vie et répondent à des motivations variées : s’éviter des ennuis, des angoisses, des frustrations ; se mettre en évidence ; jouer  (« avec les pieds » de l’autre ) ; obtenir des gains matériels ; vivre que l’on détient un pouvoir à partir du maniement de la vérité ; protéger quelqu’un que l’on aime, etc. 
  • Non ? L’enfant peut aussi s’autosuggestionner et se laisser aller au jeu de ses fabulations, produits de son imagination du moment, s’anesthésier et se droguer dedans et ne plus savoir lui-même où il en est : s’il a disparu quelques heures, c’est qu’il était en mission pour la CIA, qui lui a demandé d’espionner certaines activités suspectes. C’est souvent « énorme », invraisemblable mais pas tout à fait impossible et c’est beaucoup plus rare que le mensonge pur et dur. 

 Est-ce à dire que, en ce qui concerne la fiabilité de l’enfant, on se trouve toujours dans le domaine de l’imprévisible ?

 Oui et non … Il est vrai que la multiplicité des facteurs évoqués, qui jouent de façon mouvante dans la durée, fait que le statut d’une parole n’est jamais prévisible à coup sûr. Outre Clinton et Lewinski, Saint Pierre lui-même a renié le Christ par trois fois avant que le coq ne chante ! Néanmoins : 

  • Statut mouvant et peu prévisible ne veut pas dire statut indéchiffrable : ce sera détaillé dans les paragraphes suivants ; 
  • à vivre avec les enfants, on constate que certains se montrent (très) souvent fiables ou menteurs, fabulateurs ou suggestibles … il est tout aussi dangereux de les enfermer dans ce qui deviendrait alors une étiquette- carcan que de n’en tenir aucun compte : pris en compte avec prudence, leur rapport majoritaire à la vérité peut constituer un indicateur parmi d’autres pour évaluer la fiabilité d’une allégation précise. 

Si l’on sait que tel enfant ment souvent, il faut notamment observer s’il a déjà énoncé des messages « cruels », qui ont vraiment fait souffrir autrui, et jusqu’à quel point il s’est montré capable de s’y obstiner : si c’est le cas, ses dires ultérieurs doivent évidemment être analysés avec beaucoup de soin et de précaution. Autant à propos de ses fabulations. 

 

 Enfin, il existe des catégories de faits relatés par l’enfant dont la nature même constitue, en soi, un indicateur de bonne fiabilité.

 

 Sauf si l’enfant se trouve sous haute pression émanant d’un tiers ou s’il a déjà fait la preuve à répétition de mensonges ou de fabulations cruelles (rare !). 

Au rang de ces faits à prendre particulièrement en considération, il faut citer les affirmations suffisamment claires faites par l’enfant :

- qu’il a subi une ou des agressions intentionnelles l’ayant blessé moralement ou physiquement, 

- surtout si la blessure a été significative, 

- surtout aussi s’il l’ (les) attribue à un (des) agresseur(s) estimé(s) dangereux, ou dont le statut est puissant à ses yeux d’enfant : groupe d’adolescents qui rackette un plus jeune ; professeur redouté qui sadise un élève ; (grand) adolescent ou adulte qui maltraite physiquement ou sexuellement, etc. …  

 

L’allégation d’abus franc commis par un adulte

 

Dans cette perspective, je me limiterai à discuter l’allégation d’abus sexuel franc commis par  un adulte (6). Par « abus franc », j’entends qu’un seuil d’intensité quantitative ait étéclairement franchi : les organes sexuels ont été exposés ou/et en contact ; l’enfant a été obligé de regarder de la pornographie, etc. Je mets donc de côté les allusions et autres effleurements pour lesquels joue parfois le phénomène de la signification dramatisée dont je parlerai plus loin. 

 

  • ----L’enfant entre 5,6 ans et 11,12 ans a souvent mis beaucoup de temps avant d’oser hasarder son allégation, car il redoutait de prendre un tel risque ! Jusque 7, 8 ans et parfois plus, il est même possible qu’il n’ait pas encore identifié la nature abusive de l’aventure sexuelle dans laquelle on l’a entraîné…ou qu’il doute et se pose des questions, mais ne sache où les poser.  Ces questions ont pour but de l’aider à identifier des faits qu’il n’arrive pas à évaluer clairement. Ce flou rend le dévoilement encore plus tardif ou difficile. 

Accuser un adulte, parfois très proche, personnage qu’il considère tout un temps comme « sacré », source de savoir et de la connaissance du Bien et du Mal, méritant obéissance et respect ; personnage puissant, dont il a observé vingt  fois qu’il était capable de se défendre efficacement, personnage dont il dépend pour sa vie matérielle et affective ! Quelle folie que l’affronter, en passant outre à l’exigence quasi systématique du secret ! A révéler, l’enfant cumule les risques d’être grondé, pour avoir participé à « ça » … de provoquer la vengeance de celui qu’il accuse … de faire le malheur de sa famille … de vivre la honte, si jamais tout le monde le sait, etc. 7  

Par ailleurs, un enfant n’est pas sans conscience morale. Dans des conditions ordinaires, il se refuse à faire souffrir autrui en l’accusant à tort et avec persistance de maux qui n’existent pas. Il est retenu de l’intérieur par sa sociabilité. Alors pourquoi hasarderait-il son allégation, si ce n’est avec l’espoir d’être déchargé d’un fardeau intérieur, et protégé du retour d’agressions bien réelles !

 

  • ----  Et l’enfant plus jeune,à supposer qu’il n’ait pas été traumatisé, mais plutôt séduit par un adulte qui a su s’y prendre sur un mode soft ? Pourquoi évoquerait-il ce qu’il a vécu, souvent de manière inattendue, indirecte et pourtant claire ? ( E : « Tu mets aussi ton doigt dans ma  quiquine ? R. : Aah, qui fait ça avec toi ? E : Tonton Daniel, etc. …») 

Les tout petits se remémorent et évoquent des expériences faites qui sortent de l’ordinaire, les ont intrigué et ont mobilisé leurs affects ( peur ou plaisir ). Ils les évoquent face à un tiers confident, souvent à l’occasion d’un stimulus qui rappelle l’expérience ( par exemple : la mère qui donne le bain et lave la vulve ). Ils les évoquent aussi dans leurs jeux symboliques, parce qu’ils veulent mieux les comprendre et avoir la maîtrise intellectuelle dessus. 

Même lorsqu’ils sont imaginatifs, ils gardent à distance les vrais adultes, évitant de  les incriminer de manœuvres spéciales sur leur corps dans le décours d’un récit imaginaire. Par contre, leur sexe ou leur derrière – ou ceux des grands – peuvent encore constituer des constituants très « naturels » de la vie, et ils en parlent simplement, ainsi que de la miction et de la défécation, sans la pudeur typique des aînés : si ces zones ont été l’objet de manipulations « extraordinaires » et qui ne les ont pas terrorisés, ils n’ont pas difficile à le raconter : nous l’avons déjà dit, ce sera souvent en différé, avec une personne de confiance ou en le rejouant avec leurs poupées, et lors d’un stimulus évocateur.

Et donc, le simple fait qu’ils parlent d’une expérience sexuelle – étrange, hors du commun -, mais dont ils n’ont pas encore intégré la nature sacrilège, en l’attribuant à quelqu’un de précis constitue ici aussi, en soi, un indicateur de fiabilité (8)

 Les autres indicateurs de fiabilité 

 

Je continue à m’en tenir au paradigme de l’allégation faite par l’enfant d’un abus sexuel franc. Outre les deux indicateurs que je viens de discuter – la réputation de l’enfant et la nature de ce qu’il révèle -, il en existe beaucoup d’autres, plus précis, qui permettent de situer ses dires sur une échelle « Fiabilité/non-fiabilité » : à un extrême, l’interlocuteur est intensément convaincu que la parole de l’enfant est digne de foi, à l’autre, qu’il ne dit pas la vérité ; au milieu, c’est l’incertitude.

 

Je parlerai surtout des indicateurs qui analysent son discours, les affects et la gestuelle qui l’accompagnent et le contexte de sa production. Avec le Dr de Becker nous en avions déjà évoqué une liste dans le livre:

«L’enfant victime d’abus sexuel et sa famille : évaluation et traitement  » (1997, p. 75-80 et 157-159) A côté de cette catégorie d’indicateurs, il en existe d’autres, auxquels il est sage de recourir complémentairement : un examen somatique de l’enfant (9) ; des données d’observation de son comportement récent ; le témoignage de ses proches ; des tests projectifs ( dont le résultat doit être manié avec grande prudence ) 

---- Supposons d’abord un enfant entre six et treize ans.

 

Voici un condensé de la liste signalée ci dessus : 

- L’enfant fiable met souvent beaucoup de temps à oser commencer à parler ; quand il s’y met, il a rarement le courage de tout dire en une fois : il faut un peu d’insistance pour l’y faire venir et il va souvent du (relativement) plus facile à dire, jusqu’au plus ignoble. Il est d’ailleurs fréquent qu’il garde définitivement ou très longtemps secrète la partie la plus difficile des faits ou de leur contexte relationnel. 

- Son discours est spontané ( pas une « récitation » apprise ou préparée à l’avance ) Il n’est donc pas parfaitement organisé ; toutefois quand on met bout à bout tout ce que l’enfant dit, on a une impression globale de cohérence, en ce qui concerne le principal des actions et interactions qu’il relate : cela « tient la route » A noter cependant que, plus l’enfant est jeune, plus il a tendance à condenser en une sorte de « script » unique, comme un résumé plausible,  ce qui s’est passé en plusieurs fois. 

- Assez souvent, ce qu’il décrit correspond à nos connaissances scientifiques sur le déroulement des abus sexuels : nous savons qu’il existe quelques scénarios standard, par exemple, celui de la sexualisation progressive de la relation, et ce que l’enfant dit se rapproche fort de l’un d’eux. Attention, l’inverse n’est pas ipso facto un indicateur de non-fiabilité : la créativité humaine reste immense pour attraper un enfant dans des filets, et rechercher le plaisir à travers lui ! 

- L’enfant fiable peut se montrer concret, avec une richesse de détails qui croissent avec l’âge. Autant pour la mise en place de circonstances d’espace et de temps. Il peut également faire part de paroles échangées. Il est toutefois inévitable – et donc à considérer comme indicateur positif – qu’il existe quelques inexactitudes ou contradictions mineures, l’un ou l’autre trou de mémoire et même des moments où l’enfant doute de lui-même. 

- L’enfant utilise un vocabulaire et se réfère à une connaissance de la sexualité ou des intentions de l’autre qui sont propres à son âge ( sauf s’il a été longuement « mis au parfum ») Par exemple, il prend les gémissements du plaisir pour de la douleur ; si l’abuseur, encore un peu délicat à sa manière (10), se retire rapidement à la toilette pour éjaculer, l’enfant est persuadé qu’il est allé faire pipi, etc. 

- Souvent, le discours de l’enfant s’accompagne d’affects de honte, d’angoisse, de culpabilité … plus rarement, du moins dans un premier temps, d’une colère indignée. Parfois son état de stress s’accroît visiblement lorsqu’on l’encourage à reparler des faits et il peut procéder à diverses manœuvres pour y résister (« je dois aller faire pipi » (sans commentaires !) 

- Au-delà de la stricte narration des faits, une parole fiable peut évoquer des réalités externes ou internes complémentaires : comment l’approche de l’adulte a progressé jusqu’à l’inacceptable ; des tentatives faites en vain par l’enfant pour demander de l’aide ; des paroles échangées avec l’abuseur, et notamment la pression explicite subie pour garder le secret ; ses propres états mentaux (par exemple : angoisse, auto-dépréciation) ; les sentiments qu’il prête à son abuseur et ce qu’il pense de lui ; etc. 

Il existe des exceptions à cette liste, qui ne constitue jamais d’un guide-line standard, mais l’espace me manque pour les  détailler et je vous renvoie à l’ouvrage précité. Les items de la liste se recueillent de façon souple, au sein d’une relation de qualité. L’interlocuteur en apprend d’autant plus qu’il peut se montrer accueillant, intéressé par l’enfant, capable de partager naturellement des mots sexuels, insistant sans être suggestionnant : pas plus que quiconque, l’enfant n’est à l’aise pour parler longuement, spontanément et sans aucun soutien de son interlocuteur, de toutes ces choses tristes, honteuses et angoissantes à dire, à propos desquelles il n’a pas pu se montrer compétent. Pire encore, il était parfois ambivalent, au moins à moitié d’accord qu’on lui fasse « ça », mais cette dimension de plaisir ressenti, c’est bien la dernière chose qu’il évoquera.

 

Une fois énoncée son allégation-princeps, la qualité du discours de l’enfant s’appauvrit si on le lui fait répéter deux, trois… vingt fois sans que rien ne se passe. Ce n’est pas essentiellement parce que sa mémoire s’effrite en s’éloignant des dates des faits, tellement imprimés en lui. C’est plutôt parce qu’il s’attendait à être aidé vite et bien. Il ne comprend pas pourquoi les adultes sensés le protéger mettent tant de temps à tergiverser ; alors, il se décourage ; avec d’autant plus d’acuité qu’il est plus jeune il se demande même s’il n’a pas « mal » dit et déplu à l’adulte auquel il s’est confié ; alors mû par l’angoisse et la culpabilité, on le voit parfois changer sa version des faits jusqu’à se rétracter. Et même s’il ne va pas jusque ces extrêmes, son discours s’émousse : ses affects se gèlent, il n’a plus envie de donner beaucoup de détails, il se robotise … 

Aussi sommes-nous invités à soulager rapidement l’enfant de son fardeau, lorsque nous pensons qu’il est (très) probable que sa parole a été fiable. Et si plusieurs institutions interviennent, comme par exemple l’institution judiciaire qui s’adjoindrait à des premiers écoutants psycho-sociaux, elles ont un devoir moral de coordination rapide, évitant à l’enfant de fastidieuses répétitions. 

Capter précocement la parole de l’enfant sur vidéo peut rendre quelques services, comme par exemple celui d’éviter une confrontation directe à l’adulte suspecté d’agression. Il faut néanmoins se souvenir de ce qui a été dit plus haut : quelques imperfections, quelques contradictions mineures sont plus indicatrices de fiabilité que l’inverse. De la même manière, la personne qui recueille la parole de l’enfant ne peut jamais se montrer complètement « neutre » : l’un ou l’autre moment de légère suggestion est monnaie fréquente. Par ailleurs, il ne faut certainement pas appeler « suggestion », leur capacité d’empathie, leur chaleur humaine discrète, leur art à encourager l’enfant à dire ce qui lui a vraiment sur le cœur Est donc non scientifique  l’attitude de certains avocats d’adultes suspects, qui se jettent à corps perdu sur l’un ou l’autre passage « foireux » dans la cassette vidéo de l’audition de l’enfant pour y trouver triomphalement « la  preuve » que l’enfant ne dit en rien la vérité !

 

En raison de ce découragement progressif de l’enfant, l’on peut se demander quelle valeur ont encore des missions d’expertise, même confiées à des experts chevronnés, lorsqu’elles prennent  place très tardivement, dans un contexte de lenteur si pas d’inertie et d’incoordination de toutes les institutions engagées, l’enfant ayant déjà répété n fois son histoire sans le moindre résultat.  

Oui si l’expert fait l’analyse de tout ce contexte délétère et en tire des conséquences. Non s’il croit que lui va extraire le dernier jus de la vérité auprès de ce citron déjà pressé et repressé ! 

---- Et le tout petit, avant l’âge de six ans ?

 

En l’absence de pressions exercées sur lui,  il est capable d’évoquer avec pertinence le comportement abusif d’un grand à son égard surtout si cet abus a été effectué « en douceur » Il le fait souvent spontanément, parce qu’un stimulus évocateur l’active : par exemple le fait d’être à moitié ou totalement  nu au moment du coucher « réveille » le souvenir ou/et le désir de touchers à la fois agréables et « hors du commun » qu’on lui a faits, et il en parle ou en redemande ( Klajner, 1987 )  Dès deux ans et demi, trois ans, il peut même parfois nommer l’auteur sans se tromper, si c’est un familier (11). La première fois, il s’exprime innocemment, sans honte ni angoisse, et c’est le bouleversement émotionnel de son interlocuteur – réaction assez fréquente ! – qui, très vite, fait naître en lui grande angoisse et confusion : alors, il se pétrifie et ne dit plus rien ou il transforme son propre discours et le calque sur ce qu’il croit que son interlocuteur du moment attend. Par contre, toutes les fois où le premier interlocuteur reste suffisamment maître de soi et accueille « gentiment » ce que le petit a commencé à dire, celui-ci peut produire une évocation de qualité, déjà concrète et précise, mais dont il est fréquent qu’elle ne porte que sur l’action centrale ; sa capacité d’évoquer des détails, notamment de temps ou d’espaces inconnus, est beaucoup plus erratique si pas nulle.

Il existe d’autres voies d’entrées par lesquelles un petit « dit » ce qui lui est arrivé. Par exemple, c’est parfois avec ses jouets favoris (poupées, personnages Playmobil ; petits animaux en plastic…) qu’il rejoue spontanément un événement hors du commun, traumatique ou non, pour exorciser ses émotions et pour en maîtriser psychiquement les mystères … et il se peut que sa maman, son papa ou un parent proche passe par hasard, l’entende, puis l’interroge. 

Si l’expérience d’abus a été traumatique, il s’ensuivra des signes de détresse et des comportements d’évitement (12) qui devraient mettre la puce à l’oreille à ceux qui en sont les témoins et les amener à l’interroger délicatement. 

Malheureusement, sur la scène familiale et sociale, il ne va pas de soi que ce qui s’ensuit soit positif. Parfois, c’est le bouleversement émotionnel de ses interlocuteurs qui fait éclater la confiance du tout petit en ses propres dires et  sa mémoire et ses idées se brouillent

Même si ce n’est pas le cas, son agresseur, souvent soutenu par des proches, proteste avec véhémence : « Il est trop petit ; il fabule ; c’est avec un autre que ça s’est passé ».

Des instructions judiciaires peuvent se mettre en route mais, en ce qui concerne l’audition de l’enfant jeune, le processus reste parfois trop lent, trop bureaucratique. Il en va de même d’ailleurs de nombre d’investigations psychosociales. S’il ne persiste comme élément de preuve que la parole d’un petit de quatre ans, ou plutôt ce qu’il en reste trois mois après,  et donc, entre autres, si la personne suspecte n’avoue rien, le dossier est bien mince. Il suffit alors que l’avocat du suspect murmure « Outreau » au vent des prétoires pour que l’allégation soit définitivement enterrée. Il arrive même ensuite que, peut-être pour se convaincre et se donner bonne conscience, certains juges en remettent une couche et ordonnent une reprise de contact entre l’enfant et celui qui l’a agressé, dans les cas où existe une séparation du couple parental. 

Scénario catastrophe ? Demandez aux gens de terrain s’ils ne l’ont pas déjà rencontré N fois, pour une où la seule parole du tout petit est prise au sérieux et où l’enfant est efficacement protégé par la coordination des institutions à l’œuvre. 

---- Et les adolescents ?

 

Plus souvent que les enfants, ils choisissent de garder leur malheur caché, parce qu’ils ne sont pas fiers d’eux ou qu’ils détestent l’idée d’être aidés. C’est parfois bien plus tard qu’ils en parlent, à leur partenaire sentimental, à un psychothérapeute ou à l’abri de l’anonymat sur un forum d’Internet. Leur maîtrise de soi, leur capacité d’imagination, leur vocabulaire et leur capacité de dissimulation sont plus riches que celles des enfants prépubères. Et donc, quand ils choisissent de révéler, leurs affects pénibles paraissent moins présents que chez ceux-ci ( hormis le cas du viol brutal et récent ) Par ailleurs,  ils peuvent raconter sans qu’on le remarque un discours mi-vrai, mi-faux : par exemple, vrai en ce qui concerne l’identité de l’agresseur et quelques actes-clés subis, et faux pour toutes sortes de détails, là où ils ont honte et se sentent en faute ; ailleurs, ils accusent des inconnus – voire des gens qu’ils n’aiment pas – pour protéger un adulte aimé, même s’il s’est mal conduit avec eux. Bref, ce sont eux – et pas les tout petits – qui sont maîtres dans l’art de rouler l’adulte dans la farine, les yeux campés dans les siens, en ayant le pouvoir de s’obstiner indéfiniment dans une version qu’ils ont donnée. Mais voilà, exactement le même discours d’un garçon ou d’une fille de quinze ans peut être totalement ou largement fiable, mi-vrai – mi-faux ou complètement mensonger : je vais revenir tout de suite sur cette dernière éventualité, qui reste peu fréquente ( 5 à 10 % des assertions de préadolescents ou d’adolescents jeunes ) ( Biron Campis, 1993 ). 

Il existe des enfants  dont la parole est clairement non fiable 

 Qui sont ces enfants ? 

Dans le champ de l’abus sexuel, on estime le plus souvent à 3 à 8 % les allégations non fondées faites par des enfants. Estimation bien approximative, qui correspond davantage à l’intuition clinique de professionnels expérimentés qu’à une récolte rigoureuse de données, par nature peu saisissables et couvrant des réalités très disparates.

Qui sont ces enfants qui ne relatent pas la vérité des faits ? En voici les principales catégories, exposées par ordre de fréquence décroissante :

 

  • ---- Il y a d’abord les enfants fortement « pressés »,suggestionnés par un adulte important dans leur vie. Ce peut être un parent porteur d’une pathologie mentale avérée, qui effraie l’enfant, prêt à obéir sous la terreur, et qu’il faut pouvoir reconnaître : parents paranoïaques, gravement hystériques, d’une violence pathologique, etc … Plus souventcependant, la personnalité basale du parent ici concerné n’est ni si perturbée ni si radicalement effrayante ; mais il reste en conflit intense avec l’autre, dans le contexte de la séparation parentale (13). Ce parent est lui-même de bonne foi – autosuggestionné – ou menteur. L’enfant lui résiste d’autant moins qu’il est petit. Face à la psychose, la soumission des idées peut même continuer jusque dix, onze ans. 
    Le discours qui en résulte chez l’enfant constitue, en proportions variables, un mélange de suggestibilité et de purs mensonges obstinés pour ne pas déplaire. Suggestibilité ? Les idées de l’enfant deviennent confuses, il n’est plus sûr qu’un fait a existé ou non ; ou de son degré d’intensité («  Jusqu’où a été le doigt de papa ? ») ou de l’intention dont il était porteur (« C’était pour soigner,  seulement chatouiller ou c’était mal ? ») … Alors, pour échapper à l’angoisse, il tranche mentalement la question en choisissant le pire, comme le veut le parent inducteur. 
  • ---- Viennent ensuite les cadets qui accusent mensongèrementd’abus sexuels des aînés, toujours mineurs d’âge, pour ne pas être punis. Ils ont sept, huit ans … ils ont « fait deschoses » qui les intéressaient bien avec un grand, par exemple de douze, treize ans ; ils les ont même parfois provoquées, ces choses, ou à tout le moins laissé s’exprimer fortement leur curiosité ; mais s’ils sont attrapés, haro sur le grand (14) ! 
  • ---- Arrivent ensuite à égalité trois cas de figure déjà nettement moins fréquents : 

A- Un jeune, le plus souvent au début de son adolescence, parfois même préadolescent, le plus souvent une fille (15), s’autosuggestionne ( cfr la description qui vient d’être faite de la suggestibilité ) et attribue une « signification dramatisée » à des gestes posés par un adulte ( Hayez, de Becker, 1993, p. 169 ) Il peut s’y ajouter l’un ou l’autre léger mensonge mais ce qui s’ensuit constitue souvent une accusation « légère » qui ne va pas jusqu’à la franche vision ou au franc contact des organes génitaux. C’est plutôt : « Il a voulu m’embrasser, toucher mes seins, mettre sa main sous ma jupe, me donner un rendez-vous, etc. … » L’adulte accusé est du genre sensuel, tendre, imprudent, peut-être bien attiré par de beaux adolescents. Il n’a pourtant rien fait ou presque rien. La jeune a peur et tire un signal d’alarme excessif. 

B- Ou alors c’est une jeune carencée affective, en quête d’amour intense : mais elle devient effrayée par ses propres désirs ; ou encore, elle est dépitée parce que l’adulte diminue son attention pour elle, et elle se venge étourdiment ou cruellement.

Dans les exemples que nous venons d’évoquer, le jeune se trompe vraiment sur les intentions de l’adulte, qui n’a pas touché son corps, du moins avec une intention sexuelle…il ne faut cependant pas en déduire que tous les jeunes qui racontent des histoires de ce genre se laissent suggestionner : il est des adultes qui, dans un processus de sexualisation progressive, commencent par les gestes indécents évoqués ci-dessus, en les posant réellement et avec l’intention d’aller plus loin…alors, le jeune a mille fois raison de poser un signal d’alarme précoce et doit être pris en considération 

C.Aux mêmes âges de la vie, un petit groupe de garçons et de filles peut se suggestionner mutuellement ; on le voit alors attribuer la même signification dramatisée aux comportements d’un adulte qu’ils n’aiment pas beaucoup, souvent parce qu’il a nui à un membre du groupe. Ils peuvent même carrément mentir et s’obstiner dans le mensonge, et alors leurs accusations deviennent de plus en plus graves. 

  • ----  Autre application encore plus rare « de la signification dramatisée » : de jeunes enfants ( quatre, cinq ans ), sensuels si pas en quête d’excitation érotique, vivant très fort leurs sentiments oedipiens, prennent leur désir pour des réalités (16). Ils évoquent, sans que ce soit une plainte, un parent, souvent sensuel et imprudent qui leur aurait fait ou demandé un bisou ou un toucher à un endroit inconvenant ; l’idée les fait rire, ils ne profèrent pas d’accusations plus graves et, au-delà d’un intitulé, ils ne sont guère capables de donner de description très plausible du déroulement de l’acte.

Situation clinique à traiter avec d’autant plus de prudence que l’inverse a aussi un certain nombre de chances de se présenter : tel petit enfant hyper érotisé par un abus de longue durée multiplie des gestes sensuels voire sexuels à l’égard de l’adulte auteur…et éventuellement d’autres personnes amicales : par exemple, il cherche à se vautrer sur la personne de l’examinateur, lui exhibe vite fait bien fait son sexe ou ses fesses ... Par déni, l’entourage et même les professionnels le réduisent à n’être qu’un « simple » petit oedipien excité et dans la confusion des idées…ce déni vient de très haut : Freud lui-même n’est-il pas passé d’une perception de la sexualité traumatique réelle, qui l’insécurisait fort, à une sorte de déni en inventant d’autres théories sur l’Œdipe, la séduction, les fantasmes … ( Bonnet, 1999 ) ? 

  • ----   Viennent enfin deux catégories de jeunes, toujours à partir de la préadolescence, qui fonctionnent de façon opposée : 

A- Les premiers sont capables de proférer un mensonge par haine : par exemple, en institution, on se venge d’un éducateur vraiment « dégueu » Ici aussi, on peut s’y mettre à deux ou trois, avec une histoire très bien construite. Dans le même ordre d’idée, il y a le mensonge pervers du grand enfant ou de l’adolescent qui accuse un adulte pour ne plus avoir de contacts avec lui ou pour changer de lieu d’habitation.

B- Au contraire, dans la seconde catégorie, le jeune évite d’accuser un agresseur dont il a très peur ou couvre un adulte qu’il aime, nonobstant les relations sexuelles. Donc si, pour une raison ou l’autre, on le presse de parler, il accuse un inconnu. 

  • ---- Je n’ai pas encore évoqué la fabulation,Bah ! En quarante ans de carrière, je n’ai jamais été confronté à un enfant producteur de fabulations, au sens technique du terme (17), et auteur d’une fausse allégation cohérente. Elle a bon dos, la fabulation, et elle est surtout invoquée comme système de défense par les adultes incriminés. Ceci dit, j’admets que doivent exister quelques cas d’enfants fragiles, dysharmoniques, anxieux et imaginatifs à la fois, qui ont émis des fabulations de plus en plus énormes parce qu’ils avaient un auditoire trop complaisant … ou trop hostile : abus multiples, tortures et autres sectes sataniques (18) … 
  • Pour être complet, de très loin en très loin, le franc délire d’un enfant psychotique pourrait porter sur l’agression et la mutilation sexuelles de son corps. Ce qui ne veut pas dire l’inverse : un enfant psychotique peut dire vrai quand il fait comprendre d’une manière ou d’une autre qu’on l’a agressé sexuellement !

 

---- Après cette énumération, j’ajouterai un facteur de complication qui concerne tous les enfants passés en revue(19) : il ne va pas de soi que l’enfant, constatant qu’on ne le croit pas, fasse marche arrière. Plus souvent, il « s’enferre » dans sa version, en s’obstinant ou en mentant de plus en plus. Il le fait pour éviter la honte ou la punition qu’entraînerait l’aveu que son allégation était fausse. 

Dans le superbe film « La chambre du fils » ( N. Moretti, 2001 ), le bon Marco, adolescent exemplaire, commence par laisser disqualifier le jeune adolescent qui l’a vu commettre un larcin et qui l’en accuse. Puis, il a le courage de rétablir tout seul la vérité, dans le cadre de son lien de confiance avec sa maman…Mais seule une minorité de gens particulièrement sociables et particulièrement respectés peut vivre le même courage ! 

. Quels sont les indicateurs d’un discours non-fiable? 

 

L’analyse du contexte relationnel dans lequel ce discours émerge, et celle de la personnalité de l’enfant peuvent déjà donner de bonnes indications. Lorsque l’on suspecte une pression anormale, une rencontre avec le parent concerné est également éclairante (20)

Dans le discours de l’enfant, on trouve dans la majorité des cas des éléments inverses à ceux qui sont constitutifs d’un discours fiable : impression d’incohérence, d’invraisemblance, d’inconsistance ; incapacité d’évoquer des détails ( pour les plus de six, sept ans ) ou de parler de la relation avec le soi-disant agresseur ou, au contraire, exagération dans la narration de faits de plus en plus « gratinés » ; évocation de nombreux détails apparemment plausibles par un tout petit, alors que c‘est habituellement hors portée de sa mémoire ;excitation joyeuse de l’enfant ( « et je ne vous ai pas encore dit que » ) ; répétition plaquée d’un vocabulaire d’adulte, etc … 

Néanmoins dans une (petite) minorité de ces allégations non-fiables, à partir de dix, onze ans, l’enfant est capable de fabriquer de toute pièce une falsification concrète, plausible, qui porte souvent sur un événement isolé ou à faible récurrence. Son mensonge tient la route, mais ce sont d’autres éléments de l’investigation d’ensemble qui sèment le doute dans le chef de son interlocuteur. Alors, que faire ? 

 

Toutes les fois où l’on doute 

 

  L’évaluation est  loin d’être toujours simple ! 

Jusqu’à présent, j’ai présenté les deux extrêmes de l’échelle « Fiabilité – non fiabilité » Mais il existe de nombreux cas où nous resterons à douter après une première analyse des révélations faites par l’enfant.

Se référer à d’autres sources de renseignements que son seul discours sur les faits peut donc demeurer indispensable.

 Nous pouvons aussi consacrer quelques entretiens complémentaires à  vouloir clarifier les choses avec lui ; sans jamais le menacer ni le disqualifier, nous pouvons insister, obtenir d’autres illustrations de son malheur ou d’autres détails, faire la synthèse de tout ce qu’il dit  ; nous pouvons attirer délicatement son attention sur ses éventuelles invraisemblances, parler avec lui du contexte qui a amené son discours et d’éventuelles pressions qu’il subit ; et encore, l’assurer qu’il gardera toute notre estime, même s’il devait admettre qu’il a « un peu » ou « beaucoup » inventé ; nous pouvons même parler du rapport variable de chacun à la vérité, des bonnes raisons que nous pouvons ressentir parfois d’en vouloir à quelqu’un et de viser à l’enfoncer, etc.

 

Dans cette ambiance, quelques enfants peuvent se montrer plus clairs et convaincants. D’autres s’empêtrent de plus en plus dans des invraisemblances ou admettent qu’ils n’avaient pas dit vrai, et nous pouvons alors les encourager à fonctionner à l’avenir de façon moins dangereuse pour autrui.

 

Il n’est pas rare que  nous restions habités par une profonde incertitude

 

Au terme d’une insistance et de compléments d’investigation raisonnables, il n‘est néanmoins pas rare que persiste un doute profond. 

Dans certains cas, celui-ci est de type « tout ou rien » : ce que l’enfant raconte s’est produit ou non ; dans d’autres, nous avons l’impression de nous trouver face à un énorme et pénible nœud gordien où se mélangent inextricablement éléments objectifs, bouts de mensonge et produits de la suggestibilité.

  • ---- Hélas alors, nos réactions s’avèrent  trop souvent malencontreuses.Comme par exemple :   

- « Trancher » sans scientificité ni justice et faire glisser  l’évaluation vers un des  extrêmes de l’échelle : soit nous accordons trop de crédit à l’enfant (Outreau, acte I), soit nous décidons qu’il a tout faux ( Outreau, acte II ??? Certainement pas impossible ! ) ( Hayez, Lazartigues, 2004 ) (21)

- Geler les investigations ; la prise en charge de la situation s’effrite ; plus rien ne se passe ; sauf éventuellement de loin en loin, le jugement d’un Tribunal civil qui tranche comme dit plus haut, souvent au bénéfice du suspect. 

- Adhérer au mythe du super-expert de grande réputation qui va nécessairement clarifier la question de la fiabilité. Or, plus on prolonge les expertises, plus l’enfant est découragé et fâché et plus sa mémoire s’appauvrit. Le super-expert qui a pris le risque d’accepter sa mission très différée a toutes chances d’avoir à analyser un discours bien plus pauvre que ses prédécesseurs. Les fois où il est imbu de sa personne, il ne l’avoue pas facilement, et peut faire des recommandations fortes, enrobées de pseudo-science, sur une base des plus inconsistante ! Heureusement,  d’autres s’inscrivent dans l’état d’esprit d’humilité et de pragmatisme qui imprègne cet alinéa…alors, leur sagesse peut aider tout le monde à progresser.

 

 Comment gérer efficacement cette incertitude, probablement installée pour une longue durée ?

  •  

Mon expérience de terrain m’amène à faire les recommandations que voici : 

         - Tous les professionnels impliqués dans l’évaluation et la gestion ultérieure de la problématique pourraient acter clairement et officiellement qu’il s’agit  d’une situation d’incertitude, le déclarer à toutes les personnes concernées  ( l’enfant, sa famille, la personne que l’on dénonce …), en ajoutant que cela ne paralysera pas leur action ; 

- Si ce n’est pas encore fait, ils peuvent demander l’aide d’un juge pour mineurs, en l’informant tout de suite de l’état d’incertitude et en s’efforçant qu’il ne recommence pas à son tour d’inutiles évaluations complémentaires. Cette adjonction est surtout indiquée si l’on prévoit qu’on devra faire appel au droit de contrainte, qui est l’apanage exclusif de ce juge ; 

         - Si l’enfant ne souffre pas d’angoisses, de ressentiment et d’autres tensions excessives lorsqu’il est en présence de la personne suspectée, il faut néanmoins que ses contacts avec elle soient strictement supervisés, aussi longtemps qu’il n’est pas en mesure de bien se protéger tout seul (22). Par exemple, si le couple parental est séparé et que le parent non-gardien est le suspect, les contacts avec lui devraient être épisodiques et placés sous la surveillance d’un tiers fiable, comme un centre « Espace-Rencontres » ; 

         - Si l’enfant souffre trop, il me semble éthique de suspendre les contacts plutôt que de céder à la tentation d’une violence institutionnelle stérile, comme si l’enfant était nécessairement un menteur et comme si son gardien, porteur de ses préoccupations sur l’abus était ipso facto un être tout-puissant, refusant le partage de la parentalité : on se trouve dans l’incertitude, ni plus ni moins, rappelons-le ! 

         - Il nous revient encore de parler clairement de l’incertitude existante avec la personne suspecte : si, elle n’a rien fait de mal, c’est involontairement injuste et désagréable pour elle, mais on veille d’abord au moindre mal de l’enfant. Si elle ment, elle le sait dans son for intérieur. 

On doit écouter son ressentiment, feint ou réel, mais il est très rare qu’elle puisse apporter de vrais éléments objectifs, susceptibles de lever l’état d’incertitude ; on lui demandera aussi quelles dispositions elle pourrait prendre pour mieux rassurer son entourage et les professionnels quant à la qualité de ses relations avec l’enfant. On lui recommandera enfin de se montrer particulièrement prudente, car, pendant tout un temps, elle fera l’objet d’une vigilance particulière. 

Dans un tel contexte, une condamnation pénale serait bien injuste. Si c’est encore possible, une éventuelle procédure judiciaire en cours pourrait être suspendue en raison du doute ; sinon, s’il est inéluctable que les faits soient jugés, ma conviction est que le suspect devrait être acquitté « au bénéfice du doute ». Eventualité désagréable ? Oui, très et à bien y réfléchir, elle pèse sur toutes nos têtes et un peu plus sur la tête de ceux qui s’occupent d’enfants. Mais en terme de moindre mal, et en pesant bien la signification des mots, elle me semble moins injuste qu’un acquittement pur et simple comme si l’enfant, source de l’incertitude, était insignifiant et ipso facto non fiable : penser cela, ne serait-ce pas  une attitude « corporatiste » d’adultes qui se protègent mutuellement ? 

- On doit encore parler clairement, dans les mêmes termes, aux adultes responsables en ordre principal de l’éducation de l’enfant ; on les invitera à veiller particulièrement sur celui-ci et à installer ou confirmer un climat de vérité dans leurs relations avec lui. 

- On doit enfin parler clairement avec l’enfant ; lui expliquer comment on compte le protéger, malgré le doute ; réfléchir avec lui aux moyens de s’auto-protéger de possibles agressions à venir ; continuer à attirer son attention sur sa part de responsabilité, sur l’importance de la vérité et de la sociabilité. Même les tout petits peuvent bénéficier de ce type de dialogue, avec des simplifications et des mots adaptés à leur âge. 

- Reste à procéder à des réévaluations régulières de la situation. Par exemple, de trois en trois mois au début, puis de six en six mois. 

Quels enseignements tirer de ces états de fait ?  

La grande majorité des fois où les enfants font part d’agressions intentionnelles significatives qu’ils ont subies, leur discours est fiable, totalement ou en bonne partie. Les quelques exceptions que nous avons décrites, et principalement ce qui se passe lorsque l’enfant est sous pression externe, n’atteignent pas 10 %.

Les professionnels expérimentés le disent depuis longtemps, depuis que l’on a redécouvert officiellement l’existence de la maltraitance visant les enfants dans les années 1970. Sachons nous en souvenir ; ce n’est pas « sacraliser » la parole des enfants que d’en tenir compte ! 

Outreau n’a été une bonne chose pour la cause de personne, mais surtout pas pour celle des enfants ! Il en existe des cohortes renvoyées au silence alors qu’ils avaient eu le courage de faire ce que disent toutes les affiches de prévention : dénoncer l’innommable ; il en existe sans doute des milliers en France et en Belgique, dont l’espérance a été brisée, et aucun haut personnage de l’Etat ne viendra jamais leur présenter les excuses de la société (23). 

Il existe des indicateurs qui permettent d’évaluer la fiabilité du discours de l’enfant, en analysant son contenu et son contexte de production. Depuis une vingtaine d’années, ces indicateurs sont répertoriés dans des grilles d’analyse, adaptées aux  enfants de plus de cinq, six ans. La plus connue est le statement validation analysis (SVA), traduite en français par H. Van Gijseghem (1988). De nombreux chercheurs et cliniciens ont contribué à l’élaborer et à la valider, depuis plus de cinquante ans. Elle conduit à établir un degré de probabilité de fiabilité pour la parole de l’enfant de plus de six ans, ni plus ni moins. Il en existe l’une ou l’autre dérivée, très proches mais pas encore validées. Ces grilles d’analyse rendent bien plus de services que la seule référence à l’intuition et à l’expérience clinique, à la passation de tests de personnalité ou à l’analyse de dessins.

Il faudrait en tirer des conséquences pratiques ! Mon souhait est que ceux qui ont à évaluer officiellement la parole de l’enfant ( policiers spécialisés et autres experts psy ) aient une bonne connaissance du SVA et s’accordent pour en faire un important outil de référence commun. Les magistrats et les psychiatres et psychologues d’enfants et d’adolescents devraient aussi en connaître les grandes lignes : même lorsque l’entretien avec l’enfant n’a pas d’objectif médico-légal, cette connaissance à l’arrière-plan peut s’avérer des plus utiles.

 

 Le plus grand problème reste la prise en compte de ce que disent les tout petits : leur première révélation est la plus précieuse, mais elle est souvent écoutée par un non-professionnel susceptible d’être débordé par ses émotions. Après, il faudrait pouvoir reprendre ses dires très vite et une seule fois. Et à l’heure actuelle, on ne dispose pas pour eux d’une grille solidement validée comme le SVA. Le moindre mal alors, si l’on n’a que la parole d’un tout petit comme élément de preuve et même si, à titre individuel, l’on est convaincu… ce serait que le groupe psycho-judiciaire qui traite le cas, l’assimile aux situations d’incertitude que je viens d’évoquer. Aujourd’hui, ce n’est pas toujours ce qui se passe : on  renvoie  trop souvent ces tout petits purement et simplement d’où ils viennent ou pire, on oblige des reprises de contact, parfois même  non protégées, avec les personnes qu’ils accusent. 

Notes 

   2. Sans autre spécification, enfant signifie « mineur d’âge ». Si des spécifications par tranche d’âge s’avèrent nécessaires, elles seront faites dans le texte. 

 3. Il faut différencier la fiabilité de l’enfant et celle de sa parole ; nous verrons plus loin que la fiabilité générale de la personne est un indicateur de la fiabilité de sa parole dans une circonstance précise, mais l‘un ne se réduit pas à l’autre. Cet article constitue une réflexion sur LA PAROLE, et non sur la personne!

   Le terme « crédible » est pratiquement synonyme lui aussi, mais davantage utilisé dans le monde criminologique ; nous n’y recourrons donc pas.

5   Prédisposition à se laisser suggestionner ? … et donc, possibilité d’une composante génétique : Manque habituel d’esprit critique ; caractère « faible », passif, suiveur ; niveau d’angoisse élevé …

6   Ce qui est décrit et discuté à son propos s’applique, avec quelques adaptations, à de nombreuses situations où l’enfant apparaît comme victime plus ou moins impuissante d’agressions significatives, qu’il n’a pourtant pas facile à évoquer : rackets, injustices subies à l’école ou ailleurs dans le monde social, maltraitances physiques ; etc. …

7   Et si c’est un grand adolescent qu’il incrimine, les enjeux sont à peine moins lourds.

8   J’évoquerai par la suite une rare exception à cette règle, lorsque, vers quatre-cinq ans, certains enfants sont très érotisés et que leurs sentiments oedipiens ont l’air très intenses.

9   Les progrès des possibilités de dépistage réalisés par la police scientifique étant ce qu’ils sont, je laisse aux criminologues et aux policiers le soin de commenter quand ceci leur paraît indiqué.

10   Ou diaboliquement prudent….

11   Et quand il ne le peut pas, spontanément, il se tait…ce n’est que face à des pression excessives qu’il pourrait  désigner quelqu’un à tort, pour être quitte de l’angoisse de la pression !

12  Par exemple, ne plus vouloir se laisser déshabiller.

13   On ne peut cependant pas en déduire que toutes les allégations faites dans le cadre de la séparation parentale, même difficile, sont fausses. On avance souvent l’estimation qu’environ une sur deux contient au moins une bonne part de vérité. Ce qui est suspect, c’est quand le parent accusateur « en remet » encore plus passionnément que l’enfant, parfois avec un vocabulaire identique.

14   Rappelons néanmoins qu’il existe une limite à cette manière de raisonner. Si la différence d’âge est trop élevée, l’aîné a le devoir de ne pas séduire le petit, ou de résister aux manœuvres de celui-ci. La différence d’âge maximum de cinq ans, évoquée par beaucoup d’auteurs pour fixer la limite d’un vrai consentement possible, nous paraît sage, même si elle est un peu arbitraire.

15   Les garçons sont également concernés, mais gardent davantage leurs impressions pour eux que les filles.

16   Et il y a encore ces petits enfants porteurs d‘une lourde carence affective, qui cherchent un contact fusionnel avec n’importe quel adulte à l’air un peu accueillant. Même si eux font pas de référence directe à des activités sexuelles qui auraient eu lieu, ils peuvent générer chez les témoins de leur vie le fantasme qu’ils on été abusés eux aussi…nous avons même vu l’une ou l’autre fois ce fantasme surgir chez des professionnels à partir du simple mutisme extra-familal tenace d’un enfant !

17   Fabulation ? Auto-suggestion ; le jeune s’accroche à l’idée qu’est vraie une « fable » qu’il raconte. Une ou plus souvent une longue série, car son comportement est répétitif. La « fable », ici, c’est une histoire « énorme », peu vraisemblable mais pas tout à fait impossible

18   Il doit en exister l’une ou l’autre, de secte satanique, comme il existe des abus multiples, des enfants vendus ou donnés par leurs proches à d’autres adultes pour des partouzes plus ou moins rémunérées ( ceci est malheureusement plus fréquent qu’on ne le croit ), mais les enfants qui y sont impliqués, s’ils survivent, ne se comportent pas en fabulateurs … c’est plutôt la chape de plomb du silence !

19   Ce comportement s’applique à tout le monde, dans des circonstances analogues !

20   Si l’on reçoit ensemble le parent qui « porte » la révélation et le tout petit enfant, on constate que, lorsqu’il y a forte pression mensongère, le comportement du tout petit est beaucoup plus craintif, comme scotché à la parole du parent qui accuse, acceptant difficilement d’être séparé de lui … Lorsque l’allégation est vraie, l’enfant concerné est plus « libre » et confiant : il peut jouer pendant que le parent parle et accepter davantage d’être seul … 

21   Je ne conteste certes pas que à, à Outreau, on ait fini par libérer des personnes emprisonnées sur une base bien trop inconsistante. Je me situe par rapport au discours des enfants qui, vu de Belgique, m’apparaît toujours comme un nœud gordien !

22   Pour beaucoup, cette capacité d’autoprotection est liée à l’arrivée de l’adolescence.

23   On peut y adjoindre la liste des professionnels courageux, qui ont essayé de défendre ces enfants contre la puissance de l’ordre adulte …La lecture du dernier livre de Catherine Bonnet est à cet égard édifiante : C. Bonnet, l’enfance muselée, Mols, 2007. 

Bibliographie 

Biron Campis L., Developmental differences in detection and disclosure of sexual abuse, J. Am. Acad. Child Adolesc. Psychiatry, 1933, 32-5, 903-910. 

  1. Bonnet, L’enfant cassé, Albin Michel, 1999. 
  2. Bonnet, l’enfance muselée,Mols, 2007 (éd :  ) 

Hayez J.-Y., de Becker E., L’enfant victime d’abus sexuel et sa famille : évaluation et traitement, coll. monographies de la parole de l’enfant, PUF, 1997. 

Hayez J.-Y.,  Lazartigues A., Les durs enseignements d’Outreau,  Le carnet psy, 2004, 22, 34-37. Paru aussi dans: Enfances § Adolescences, 2005/1, 66-72. 

Klajner P. and coll., assessing the credibility of young children’s allegations of sexual abuse: clinical issues, Can. J. Psychiatry, 1987, 32, 610-614.

 

Remerciements

 

Toute notre gratitude va aux collègues qui ont partagé avec nous leur expérience pour rédiger cet article : le docteur Catherine Bonnet, psychiatre d’enfants et d’adolescents, madame Margarita Ibanez ( Barcelone), spécialiste de la petite enfance et notamment du diagnostic d’abus sexuel chez le petit enfant, Mme Françoise Leurquin, psychologue clinicienne, expert auprès des tribunaux, formatrice à la méthode SVA