Chapitre publié dans le Traité européen de psychiatrie de l'enfant et de l'adolescent, sous la dir. de P. Ferrari et O. Bonnot, Médecine sciences publications, Paris : Lavoisier., 201

 

 

                                          

 Définition et classification  

Les sévices sont des violences  graves et souvent répétitives, intentionnelles, non voulues comme telles par la victime qui en conserve un dommage significatif, physique ou psychique, transitoire ou de longue  durée. 

Violence étant pris dans son sens « effraction, viol d’une frontière » ; c’est la forme la plus destructrice de l’agressivité, qui transgresse clairement les Interdits fondamentaux du meurtre et de l’inceste. Cette violence est la plus souvent active (« en bosse »), plus rarement « en creux », omission intentionnelle de satisfaire des besoins importants. Quand le sévice est sexuel, cette dimension agressive est toujours intriquée à la satisfaction aberrante de la pulsion sexuelle. 

On  observe cinq catégories principales de sévices ; elles ne s’excluent pas mutuellement et leur association, l’âge précoce de celui qu’elles frappent et leur répétition constituent des critères d’aggravation du dommage : 

◊ - La maltraitance physique, qui abîme le corps de l’enfant ou le met dans un état d’inconfort inacceptable. 

◊ - L’abus sexuel : l’utilisation du mineur, sans vrai consentement de sa part, pour la gratification sexuelle  de l’auteur, et au moins autant pour la volupté de pouvoir qu’il en ressent. Très diversifiés, les abus émanent souvent de familiers de l’enfant, notamment de membres de sa famille ou en tout cas de personnes connues qui commencent le plus souvent par séduire l’enfant et par le tromper intellectuellement. 

◊ - La maltraitance psychologique ou cruauté mentale : il s‘agit d’une ambiance d’attitudes et de paroles intentionnellement contraires à l’amour et à l’éducation positive : insultes, humiliations, disqualifications, menaces, retraits de plaisir injustifiés, jusqu’au franc sadisme. 

◊ - La négligence intentionnelle grave et de longue durée. Ici, l’auteur omet volontairement de satisfaire normalement les besoins importants de l’enfant, qu’ils soient matériels ou spirituels. 

◊ - L’exploitation organisée des mineurs d’âge à fin de lucre. Elle n’est pas très élevée dans les pays dits industrialisés : (petits) réseaux de mendicité, de délinquance commune, de prostitution et de pornographie … 

 Considérations générales et discussion

 

 ---- Il est impossible de proposer des chiffres de prévalence fiables, principalement parce que des forces énormes s’exercent pour tenter de dissimuler ces exactions en y réussissant souvent. Accessoirement, on rencontre également des problèmes liés aux méthodologies des recherches. Au terme d’une longue expérience dans ce champ sinistre de la psychiatrie sociale, il nous semble raisonnable de penser qu’au moins 5% des mineurs d’âge sont des victimes durables de la somme des formes physique, psychique et de négligence intentionnelle précitées ; pour l’abus sexuel répété sur une durée de temps significative ( plus de trois mois ), les chiffres sont un peu plus élevés ( 6 à 8% des filles – 5% des garçons )

 ---- Les sévices frappent les enfants de tous âges : j’ai vu des photos non truquées de bébés violés ; d’autres sont secoués à en devenir aveugles, comme il existe de frêles adolescents en perdition qui n’oseraient jamais avouer la somme d’humiliations subies au quotidien. 

Les sévices sont susceptibles de prendre place dans tous les milieux de vie : entre pairs ou dans la fratrie, émanant le plus souvent d’aînés, dans la famille, à l’école et même dans les institutions résidentielles censées rééduquer ou igner l’enfant. Ils se produisent dans toutes les classes sociales : les nantis et les puissants dissimulent mieux les leurs tandis que les milieux défavorisés, surveillés de près par des nuées de services sociaux, voient trop facilement leurs exactions repérées et exposées au pilori sur la place publique.

 ---- Il existe un seuil, au moins quantitatif, au-dessus duquel il est indiscutable que l’enfant est victime de sévices : enfant battu ou sadisé en permanence ; tempêtes émotionnelles vécues irrégulièrement par l’auteur, tels que des coups de foudre pulsionnels frappent l’enfant avec un tempo peu prévisible. Nous parlerons aussi de sévices dans des cas isolés, mais où l’atteinte est très grave : un viol, un bébé violemment secoué une fois, dans un contexte d’épuisement émotionnel [2 ]

Mais en deçà ?  La prudence reste de mise pour que ce ne soit pas les émotions ni le système de valeurs des observateurs et des intervenants qui galvaudent le terme « maltraitance » et l’appliquent aux milieux de vie qui choquent leurs références habituelles : 

◊ - Par exemple, les familles laxistes, où l’ambiance est « sexe » et où les jeux sexuels dans les fratries sont plus nombreux qu’habituellement, ne sont pas de par ce seul fait des familles marquées par la perversion ou par l’abus sexuel. 

◊ - Tout châtiment physique n’est pas ipso facto de la maltraitance [Ferrari P. et Epelbaum C., 1995, p. 23] Bien ciblé, sanctionnant l’acte et ne cherchant pas à détruire la personne, accompagné de paroles vraies, il peut constituer, parmi d’autres, un des constituants de la « force-paternelle » dont ont bien besoin nos sociétés où vagabondent tant d’enfants rois. 

 

◊ - Tout contact physique tendre entre l’adulte et l’enfant ne signe pas nécessairement de sombres tendances pédophiliques dans le chef de l’adulte. Et pourtant, il est consternant de constater que les adultes professionnels osent de moins en moins toucher les enfants, ou reconnaître explicitement le charme de leur corps, alors que ceux-ci ont tellement besoin de ces signes pour se sentir aimés et importants. 

◊ - Par ailleurs, on assimile parfois  trop vite toute forme de négligence à de la maltraitance. Or, il existe une différence radicale de signification entre la négligence intentionnelle, peu fréquente, et la vignette bien plus fréquente, qui mérite certainement sollicitude et assistance, mais qui n’est pas volontairement maltraitante : incapacité des parents, manque de « culture éducative » intériorisée par ceux-ci, immaturité, etc. 

---- Des sévices peuvent-ils exister à l’intérieur de la génération même des jeunes, entre pairs, dans et hors des fratries ? Oui, et leur signification peut s’avérer préoccupante. Il faut néanmoins se souvenir que les adolescents traversent des crises, se contrôlent moins bien que les adultes et s’identifient momentanément aux agresseurs qui les ont traumatisés, eux. Dans ce cadre, ils peuvent se décharger transitoirement et parfois même durablement sur leurs cadets, voire sur des pairs identifiés plus faibles, en lieu et place de leurs jeux électroniques ou des opportunités sexuelles d’Internet (bullying, harcèlement électronique, etc.) Ailleurs, ce sont leurs besoins matérialistes qui les poussent à racketter. Ce n’est pas glorieux, non, mais nos vies ne sont pas sans épines [J.-Y. Hayez, 2004, p. 160 et sq.] Apprenons donc aux plus jeunes des stratégies d’autoprotection efficace plutôt que de diaboliser tout de suite les ados qui les agressent. 

----  Reste le délicat problème des relations entre maltraitance et culture ; à son propos, je me limiterai à deux commentaires :

a) Il persiste dans chaque culture des scories, des imperfections, des aberrations et l’humanité a bien raison de les combattre, quand elles sont très explicites, comme les mutilations sexuelles. Nous ne pouvons néanmoins pas tout simplifier : dans certains cas, un doute profond peut subsister entre la revendication d’une différence culturelle encore acceptable et celle d’une scorie de l’ordre de la maltraitance … on en trouve un difficile exemple dans la façon très différente dont l’éducation est conçue par certaines cultures, selon que l’on est fille ou garçon

b) Dans certains cas, la culture n’est qu’un prétexte invoqué par des individus pour auto-légitimer leurs aberrations personnelles et par certains intervenants pour somnoler sur leur inactivité bureaucratique. Ainsi, si certaines cultures acceptent davantage de châtiments physiques dans l’éducation des enfants que les cultures scandinaves, aucune ne justifie pourtant le déchaînement pulsionnel ni le sadisme.

 

  L’étiopathogénie 

 

La maltraitance ne se limite jamais à l’affrontement, dans une séquence de temps donnée, de caractéristiques psychologiques et physiologiques de ses deux protagonistes d’avant-plan, l’auteur concret des sévices et l’enfant victime. En effet, une multitude de facteurs partiels d’incitation s’enchevêtrent ou se mettent en sommation ou en résonance.  Les voici brièvement décrits, en allant du plus général au plus particulier :

 

L’humanité et sa liberté.² 

 

Comme la conscience réflexive et la liberté intérieure exercent une fonction centrale dans l’espèce humaine, celle-ci est capable du meilleur ou du pire à l’égard de ses propres petits.  Le meilleur existe, présent dans tant d’actes de sollicitude, de dévouement et de générosité qu’aucun animal ne pousserait jamais aussi loin. Mais le pire aussi : ici des individus, des groupes, des nations choisissent de sacrifier les intérêts profonds des enfants, parfois leurs propres enfants, à des objectifs d’adultes estimés prioritaires. A titre d’exemple, citons : notre très grande mollesse par rapport à l’avenir écologique de la planète ; le recrutement d’enfants soldats ; la passivité de certaines nations pour réglementer l’exploitation mafieuse de leurs  enfants pauvres ( travail physique, prostitution, mendicité, contribution à la délinquance organisée ) ; la passivité des pays nantis pour amener une juste répartition des richesses et du travail dans le monde; les exigences de rendement et de réussite excessives de tous ordres mises sur la tête de bien trop d’enfants ; l’enfermement des enfants et des familles sans-papiers en Europe Occidentale, etc. Cette maltraitance institutionnelle, c’est un chancre universel, fondamentalement aussi grave que le déchaînement sordide d’un paumé qui a bu !

 

Les sociétés, leur organisation et leurs aspirations. 

 

En nous en tenant aux sociétés industrialisées, bien des facteurs incitent au passage à l’acte maltraitant. Par exemple : 

◊ - L’ambiance de stress diffuse de la vie contemporaine ; la nécessité d’être efficace, vite et bien, qui nous fait bousculer les enfants-obstacles. 

◊ - Le matérialisme et la promotion d’idées d’égo-centration. « Fais ce qui te plaît », dit-on, et non plus « Retiens-toi pour le bien-être de tes proches et de tes enfants » 

◊ - L’affaiblissement de la fonction paternelle, qui remplace par beaucoup d’incertitudes le droit parental à socialiser par des règles, et qui incite donc à des moments d’explosion violente quand « On ne sait plus en venir à bout » 

◊ - L’exclusion de minorités significatives que l’on rejette dans la solitude et/ou dans la pauvreté (stress, struggle for life, promiscuité, etc.) 

◊ - La protection farouche de l’image sociale les classes dominantes, qui ne laissent pas approcher leur part de misère et de potentiel maltraitant. 

◊ - Etc.

 

 Le dysfonctionnement occasionnel des institutions 

 

  1. Les institutions que les enfants fréquentent dans leur vie quotidienne [3 ]

 La maltraitance de l’enfant peut se dérouler dans l’institution elle-même, en référence, entre autres, au vécu individuel des adultes professionnels qui y travaillent. Face à quoi, si certaines institutions acceptent d’ouvrir les yeux et de protéger l’enfant, d’autres participent à ce que nous allons appeler bientôt le rôle négatif du tiers. 

Un exemple simple : il est plus commode pour une école secondaire d’exclure le jeune ado qui a construit un webblog inacceptable [4 ]] que d’interpeller tel vieux prof dont le sadisme moral ou la propension aux amitiés particulières est pourtant largement connue … 

L’institution peut accueillir en son sein, d’abord sans le savoir, un enfant maltraité ailleurs, par exemple à la maison. Alors, il n’est pas toujours simple pour elle de prendre ses responsabilités de façon éthique et efficace. Entre la vraie ignorance (par manque de formation ou parce que l’enfant dissimule particulièrement bien son malheur) ; les tergiversations phobiques (peur du scandale et de l’agressivité en retour des auteurs que l’on soupçonne), et la précipitation … quelle est l’attitude la  moins pire ? 

 

Les institutions chargées de LUTTER CONTRE LA MALTRAITANCE

  1.  

En nous limitant aux institutions chargées de prendre l’enfant maltraité en charge, même si ceci semble paradoxal, il y existe souvent des facteurs négatifs, dits de « traumatisation secondaire », parfois plus importants que les positifs. En voici quelques exemples : 

◊ - L’incompétence d’une partie des intervenants, la bureaucratie, la non-adaptation des rythmes institutionnels au temps vécu par les enfants (par exemple, les délais d’audition, même lorsque les enfants sont tout petits !) ; 

◊ - Les rivalités, les clivages, les revendications de pouvoir entre intervenants ; 

◊ - Les logiques et objectifs radicalement différents entre les dites institutions et surtout, le manque de volonté réelle d’harmonisation. L’harmonisation, ce n’est pas la négation des différences ! 

Ainsi, par exemple, la Justice pénale a pour intention centrale la poursuite de l’auteur et la sanction du délit bien prouvé, ce qui la met régulièrement en porte-à-faux avec les besoins de l’enfant victime, à commencer par celui d’être reconnu. 

◊ - Dans le chef des institutions et même de toute la société ; la frilosité, et même la suspicion sont occupées à reprendre du terrain par rapport aux paroles de plainte des enfants. Il y a des mouvements en balancier de l’Histoire dans ce champ : les découvertes pédiatriques des années 1950 ont créé dans l’opinion publique beaucoup d’indignation et de confiance faite aux enfants … mais c’est occupé à se terminer : les pouvoirs adultes en place en ont assez de ces petits impertinents qui quittent leur rôle de victimes silencieuses pour oser les déstabiliser ; souvent inconsciemment, par leur résistance à les entendre, ils les remettent de plus en plus à leur place de non écoutés [5 ].

 Les dysfonctionnements familiaux 

 

La majorité des activités de maltraitance se déroulent dans l’intimité des familles, nucléaires d’origine, recomposées ou élargies. Alors, dans la plupart des cas, les relations entre les membres de ces familles sont durablement dysfonctionnelles et prédisposent au passage à l’acte maltraitant. Quelques dérapages de brève durée constituent l’exception,  où les circonstances sociales jouent de tout leur poids pour déstabiliser brièvement des personnes ou des familles habituellement équilibrées. 

Nous nous limiterons à évoquer l’un ou l’autre phénomène familial d’ambiance particulièrement préoccupants, comme la solitude, le repli barricadé sur soi, le chaos, avec  la mouvance perpétuelle des liens et l’inconsistance des règles ; le manque de socialisation et d’éducation des parents et le manque de valeurs sociales dans la famille. 

Ailleurs, ce sera une ambiance incestuelle diffuse ou émanant de l’un des parents : séductions perpétuelles, sensualité, allusions sexuelles, voyeurisme et exhibitions plus ou moins manifestes,  etc. 

A l’inverse, l’ambiance de violence, générée  par une personne (père ou mère) ou  par un sous-groupe (par exemple, père et frère aîné) qui terrorisent tous les autres. Les plus faibles constituent leurs punching-balls et/ou leurs poupées sexuelles. Certaines familles cachent très bien un jeu pervers, sous les apparences de la plus parfaite normalité, voire du dévouement social. Ce jeu implique activement au moins un des parents, avec une position variable pour l’autre (entre ignorance et complicité plus ou moins active)

 

L’absence ou le rôle négatif du tiers 

 

Les tiers sont les individus, les groupes ou les institutions côtoyant la violence qui s’exerce entre l’auteur et sa victime. 

Dans la majorité des cas, si celle-ci peut s’installer ou persister, c’est aussi parce que ces tiers n’ont pas pu ou voulu prendre une place efficacement positive pour protéger la victime, dialoguer avec l’auteur ou interpeller des professionnels compétents. 

Pourquoi cette non-prise de responsabilité ? Par vraie ignorance, parfois ; plus souvent cependant le tiers a des doutes et fait la politique de l’autruche, en raison de l’angoisse si pas de la terreur que soulève en lui l’idée de la révélation des faits ( violence de l’auteur, éclatement des structures actuelles ; honte publique ; etc. ) ; parfois aussi, il peut s’agir de l’ambivalence que ce tiers vit à l’égard de l’enfant sacrifié, jusqu’à ressentir qu’après tout, ça arrange bien les choses que l’auteur se oulage sur ce dernier.

Parfois enfin le tiers sait clairement, mais sa passivité, ses sentiments d’échec personnel ou son angoisse lui ferment la bouche (exemple fréquent : les autres membres aînés des fratries d’enfants violentés)

 Facteurs de provocation, volontaire ou non, émanant de l’enfant-victime

 

Ces facteurs ne jouent pas de façon constante et c’est alors sur un enfant sans caractéristiques particulières que s’abattent les sévices. An, Eefje, Julie,  Melissa, Sabine, Laetitia, Loubna, Elisabeth et tant d’autres en ont été et sont encore de sinistres illustrations. Plus souvent cependant, il émane de l’enfant comme des points d’appel qui vont attirer sur lui l’attention négative du futur auteur ou l’inertie des tiers :

 

◊ - Enfants dont l’équipement ou la personnalité connote stress et lourdeurs de gestion  quotidienne ou qui entraînent une mauvaise image de soi chez leurs parents : bébés agités, qui ne dorment pas ; anciens prématurés au développement neuropsychologique irrégulier ; etc., Un mot plus  particulièrement des enfants qui ont un déficit d’équipement et des handicaps sociaux, quatre fois plus vulnérables et prédisposés aux agressions que les autres [ Clerebaut N., et coll., 2004 – Cyrulnik B., 1998 ] Certains de ces enfants n’intéressent personne ; d’autres sont susceptibles de comprendre ce qui leur arrive  moins vite que les autres; autant pour les moyens efficaces d’esquive et pour la capacité de révéler et de demander de l’aide ; à l’inverse, certains peuvent être non socialisés, carencés affectifs et sexuellement très provocateurs. Rien n’est donc simple avec eux. 

Les agressions que ces enfants à déficit subissent sont très variées, depuis l’abus sexuel par des professionnels en institution, jusqu’à la négligence intentionnelle et au sadisme dans les soins, en passant par les comportements trop stressés et contrôlant des familles et à la violence physique qui s’en suit. Certains milieux de vie  sont des vases très clos, dont la vérité ne s’échappe éventuellement que des décades plus tard, avec des ex-pensionnaires devenus adultes qui expriment enfin leur rage. 

◊ - Dans le champ de la violence physique ou psychologique, des parents au narcissisme fragile imaginent que leur enfant, merveilleux, va réparer toutes les blessures de leur vie et confirmer qu’ils sont de bons parents, à leurs propres yeux et pour l’entourage ; si l’enfant rate trop les performances attendues de lui, ils peuvent lui en vouloir excessivement. 

◊ - Autre éventualité : un parent, voire un enseignant, projette sur un enfant  bien précis des représentations négatives liées à son histoire de vie ; il décharge alors sur cet enfant – pris pour un autre – toute la rage qu’il n’a pas pu exprimer en temps et heure. Par exemple l’enfant évoque le grand frère haï, la grand-mère bourreau, etc. et en devient l’objet d’un sadisme raffiné 

◊ - Au début du processus de maltraitance, nombre d’enfants pourraient se protéger  plus efficacement de leur agresseur. Certains y parviennent bien, discrètement ou avec de l’aide. Mais beaucoup ne réagissent pas, par ignorance ou soumission, en référence à une image immature de ce que doivent être les rapports enfants – adultes, c'est-à-dire des rapports d’obéissance
Par la suite, une petite partie des enfants se transforme de l’intérieur et élabore des stratégies d’adaptation … qui ne font qu’aggraver les choses : dépression, culpabilité et soumission ; confusion des idées et adhésion partielle à celles de l’auteur ; masochisme et adoptions de comportements de provocation enrageants pour l’auteur, etc. 

Caractéristiques intrapsychiques des auteurs directs

 

N’importe qui peut déraper et se dévoyer transitoirement, je l’ai déjà dit. Néanmoins, dans la majorité des cas, on se trouve face à l’une des cinq grandes constellations intrapsychiques que voici énumérées en ordre de fréquence décroissante :

 

◊ - L’insatisfaction de soi ; le vécu chronicisé d’échec, d’infériorité, de manque de valeur. Ici, l’ambiance familiale est souvent marquée des mêmes caractéristiques : solitude et grand froid. Alors, l’enfant peut être vécu comme une compensation affective et sexuelle  ou être prié de réparer les ratages des parents et battu s’il y échoue. 

◊ - L’inorganisation de la personnalité ; l’absence de stratégies de socialisation ; l’incapacité à résister aux pulsions agressives ou sexuelles lors des frustrations et des tentations. Ici, il est fréquent que toute la famille soit chaotique. 

◊ - -  L’adulte  « suavement immature œdipien », secrètement fixé au maternage sensuel qu’il a reçu ; il séduit ses enfants et le « sale gosse » attardé resté en lui se livre à des jeux sexuels avec eux. 

◊ - Le parent ou l’adulte tout-puissant, violent physiquement ou autoritariste jouant de l’exercice de sa voix, de ses muscles, de sa volonté et de ses arguments intellectuels. Il terrorise et frappe ses enfants ou les hypnotise et exerce une sorte de droit de cuissage sur eux. 

◊ - Le pervers, au sens sexuel du terme.  

Lorsque l’une de ces dimensions intrapsychiques est en place, il peut encore s’y ajouter : 

◊ - La part possible de la génétique : à l’origine d’un équipement psychophysiologique, d’un soma, et d’un tempérament de base qui nous différencie les uns des autres, je n’y reviens plus, souvenez-vous du cas Tony. 

◊ - La dépendance aux plaisirs que les sévices procurent à l’auteur : chez certains sujets, les plus atteints, on n’est pas loin de la franche addiction.
◊ - Enfin, il faut toujours évaluer ce qui demeure de la liberté intérieure de l’auteur ; dans la (grande) majorité des situations, les sévices qui s’abattent sur l’enfant ne sont pas le strict résultat d’impulsions irrésistibles. Même si l’être humain qui s’y livre y est prédisposé, par sa génétique ou par sa psychopathologie, il choisit in fine, et il programme en connaissance de cause d’achever le comportement répréhensible vers lequel son destin commence à le pousser. L’auteur a donc en lui, et une dimension pathologique et une dimension mauvaise, qui lui fait choisir de l’immoral. Il relève et de soins et de la réprobation de la communauté.

Les atteintes majoritairement présentes chez l’enfant-victime

 

L’atteinte de l’enfant est la conséquence, non seulement des agressions directes dont il est l’objet, mais aussi de l’ambiance relationnelle générale dans laquelle elles ont le champ libre. Sont affectés en proportions variables : son corps, ses idées et ses valeurs, ses grands sentiments et les représentations qui les accompagnent, la mise en place de certaines dimensions de sa personnalité et ses comportements. 

Les principales atteintes intrapsychiques

 

  1. On constate fréquemment de la distorsion cognitive, c’est à dire des erreurs de pensée, en partie induite par l’auteur et en partie générée par le pouvoir d’autocréation de l’enfant,  ici erroné.  Un certain nombre pense être vraiment mauvais et mériter leur sort ; ou que, si l’on ne s’occupait plus d’eux à travers la maltraitance, on les abandonnerait et ce serait encore pire. D’autres encore pensent que la manière dont on les aime, avec du sexe, est normale, si pas un cadeau privilégié ; ils y voient une confirmation dans les éventuels moments d’excitation et de plaisir que leur corps ressent, etc.

Toutes ces idées, et bien d’autres encore que l’enfant concocte, constituent comme un mur de résistance entre les soignants potentiels et lui. S’il passe au travers et décide quand-même de parler, ces barrages intérieurs ne volent pas pour autant en éclats, et il faudra les évoquer avec lui et les écouter pour les démentir dans toute la mesure du possible. 

2. L’enfant est fréquemment habité par un va-et-vient d’affects pénibles et de représentations mentales qui y sont liées (« vécus intérieurs ») :  

Dans les cas de longue durée où la répétition des sévices est prévisible, et s’opère en outre sans chocs effrayants, un refoulement plus stable peut s’installer : à l’avant-plan, un automate, vide d’affects, qui subit un quotidien sans joie,  évoluant dans une sorte de brouillard gris. A l’arrière-plan, celui auquel il essaie de ne pas penser : l’enfant chargé de toutes ses souffrances. Les vécus intérieurs les plus habituels sont : 

◊ - L’angoisse : angoisse de mal faire et d’attirer les foudres de l’auteur ; angoisse de l’imprévisibilité du retour du sévice, souvent avec des préludes odieux ; angoisse d’avoir mal, d’avoir le corps définitivement abîmé, de mourir peut-être ; angoisse que ça se voie à l’extérieur, d’une manière ou d’une autre ; angoisséré et « cuisiné » pour avouer ;  angoisse de tout détruire autour de soi ou de la punition, jusqu’à  aller en prison parce que « on l’a fait »; angoisse d’être abandonné, de perdre l’affection des autres parce que stigmatisé ; etc. 

ILL. Avec Michaël, huit ans, anormalement agité et agressif depuis un abus sexuel répété, avec sodomie, commis par un marginal proche de la famille, il faudra que je recoure à des jeux de rôle pour l’aider à exprimer ses angoisses les plus secrètes … dans les jeux de rôles, je suis un petit garçon en visite chez le Dr et je lui demande, en n’osant pas trop poser ma question, si ça peut arriver que des petits garçons attendent un bébé quand ils ont été sodomisés. Malgré qu’il m’assure que ça n’arrivait presque jamais, le Dr eut l’air très soulagé que je lui pose la question, et nous pûmes en discuter entre hommes … 

 

Au centre de son dessin Michaël a représenté une maman attaquée par un agresseur. Sur les côtés un petit garçon défend sa maman en lançant mille boules de feux contre l’agresseur 

◊ - La tristesse, la désillusion, le désespoir : se sentir ne valoir rien, ni pour l’auteur, qui ne se retient pas, ni pour l’entourage ; se sentir un enfant inefficace, incapable de bien se protéger : une sorte de mouton noir marqué par le doigt du destin pour être attaqué à juste titre. Perdre confiance dans la grande majorité des autres ; se barricader dans sa solitude. Tristesse qui peut continuer après la révélation, si l’ambiance est à la traumatisation secondaire.
La tristesse a très souvent une forte corrélation avec une mauvaise image de soi. L’enfant se confirme pour lui tout seul sa non-valeur, présente et à venir. 

 ILL.  Un père fait des attouchements sexuels sur sa fille Noémie (neuf ans) et sur une petite amie venue loger à la maison. Celle-ci révèle tout. Scandale. Le couple parental se sépare et le père fait de la prison. Mais il veut « posséder » Noémie, et même sorti de prison, il vient l’attendre l’une ou l’autre fois à la sortie de l’école … Noémie a perdu toutes ses amies, et a l’impression qu’elle n’en retrouvera plus jamais ; elle somatise beaucoup … et symbole sinistre et merveilleux à la fois, elle me dessine, au lieu d’un personnage, une tête de petite fille,  sans corps et marquée au fer rouge  par de nombreux et gros grains de beauté. Beauté maudite, qui a attiré l’attention de son père, et l’envoie ensuite au monde des damnés ! 

◊ - Deux derniers vécus non exclusifs l’un de l’autre peuvent encore tout compliquer : il s’agit de la rage, inconsciente dans ses fondements, qui pousse à provoquer l’auteur, à se vouloir plus puissant que lui en n’accédant pas à ses demandes : «  Je continue à faire caca dans ma culotte, et tant pis si les coups pleuvent, je suis plus fort que ma mère » Corollairement, certains enfants voient s’installer et grandir en eux du masochisme, dans le sens précis du terme.
Voilà pour les vécus les plus usuels. N’oublions pas que chez quelques-uns, surtout dans les contextes les plus violents et les plus silencieux, des représentations agressives inconscientes peuvent s’accumuler lentement : même sorti de la dynamique de sévices, l’adolescent, puis l’adulte sont comme des bombes à retardement, qui ont la haine en eux.

les comportements qui s’en suivent

 

 Chez beaucoup, la vie quotidienne reflète ce mal-être intrapsychique diversifié, même dans les entractes entre les sévices. Il y aura donc des indicateurs d’angoisse (jusqu’au franc syndrome de stress post-traumatique), de tristesse, de désillusion si pas de désespoir face aux autres ;  des signes d’échec, d’auto agression ou d’évitement des sources de joie, liés à la mauvaise image de soi, apparaîtront également. 

Ce n’est cependant pas systématique : certains se montrent presque capables d’avoir une double vie. Ils s’efforcent de ne plus penser aux moments des sévices et ne s’y prêtent que de corps. Leur vrai « Soi » est ailleurs. De là à dire que ce « Soi » de tous les jours est bien épanoui, il y a un pas à ne pas franchir !

 

Qu’en est-il de la régulation quotidienne par l’enfant de son agressivité ou de sa sexualité ? 

 

En cas de sévices physiques ou moraux, une grande inhibition de l’affirmation de soi est de règle. Ces enfants rasent à longueur de temps les murs de la vie. Sans que cela soit inéluctable, il n’est cependant pas impossible que, de (très) loin en (très) loin, une explosion de destructivité ne jaillisse en eux, explosion dont ils ne reconnaîtront pas facilement la paternité et encore moins le sens (faire vraiment mal à un plus faible, massacrer des animaux, mettre le feu, etc.) 

En cas de sévices sexuels, il existe chez beaucoup d’enfants de nombreuses réactions de pudeur anormalement contraignante. On peut observer néanmoins chez eux  de loin en loin, de façon imprudente, des moments de sollicitation inadéquate, impulsive et parfois brutale de l’autre, tant d’adultes souvent connus  que d’enfants beaucoup plus jeunes. 

Inversement, une minorité d’enfants peuvent être séduits et trompés par leur abuseur, qui les ménage pour en obtenir un optimum de jouissance, qui les achète, ou qui a vraiment envie de se conduire en initiateur pervers. Ces enfants peuvent en devenir « allumés », pour parler familièrement. C’est ce qu’on voit, plus souvent que son contraire, avec les enfants d’âge préscolaire abusés de façon dite soft et qui se mettent alors à évoquer ingénument les activités sexuelles autour d’eux et à en redemander.

 Enfin, à quels comportements a-t-on à faire face aux sévices eux-mêmes ? 

 

Seule une minorité d’enfants, indignée, choquée, confie rapidement à une personne de confiance les sévices dont il vient d’être victime. 

Bien plus souvent, l’enfant-victime participe à la loi du silence. Il s’efforce même de dissimuler les preuves qu’il est agressé. Face à son agresseur, il finit par se soumettre plus ou moins passivement. Il « entre » dans la culture de l’isolement et du secret que l’agresseur instille autour de sa relation avec lui. Pourquoi ? Peur des conséquences de la révélation, désespoir, mauvaise image de soi, idée fausse qu’il vaut encore mieux être aimé comme ça que pas aimé du tout … La majorité des sévices demeure donc probablement définitivement cachée, ou liée à des révélations tardives, à l’âge adulte. 

 Les atteintes physiques

 

Par définition, elles sont constantes quand il y a sévices physiques : elles sont susceptibles d’être abondantes, très diversifiées et d’ancienneté variable.

Après révélation d’abus sexuel, les stigmates physiques de celui-ci sont loin d’être constants : dans 40 à 50 % des cas, le corps de l’enfant est intact et n’est pas souillé par des traces spécifiques de son abuseur. Les autres fois, il y a suspicion ou preuve d’abus sexuel (défloration ; lésions anales ; maladie vénérienne ; voire grossesse), mais pas ipso facto preuve de l’identité de l’abuseur ! 

Le devenir à long terme des victimes  

Nous vous renvoyons à l’article:

 Le devenir à long terme des enfants et des adolescents victimes d'abus sexuel .

Les considérations qui y sont émises peuvent être largement extrapolées aux autres formes de sévices.

 La prise en charge globale 

 

Nous partirons de la description des besoins fondamentaux des enfants-victimes. Nous examinerons ensuite la manière dont beaucoup de sociétés se sont organisées pour y faire face et évaluerons leurs résultats. Nous terminerons en évoquant les interventions que nous considérons les plus souhaitables. 

 Les besoins fondamentaux des enfants-victimes

 

  1. Primum non nocere : il est impératif que la mise en place de l’appareil institutionnel censé aider et que les interventions concrètes des professionnels, additionnées, n’aient pas un effet plus traumatisant que la maltraitance elle-même. Ce risque n’est pas une vue de l’esprit : il semble que plus de la moitié des enfants qui ont dénoncé un abus sexuel regrettent finalement de l’avoir fait ! L’enfant ne discerne pas les mauvais et les bons agresseurs ; il veut moins souffrir, un point c’est tout ! Nous avons encore énormément à gagner en discrétion, en vraie sollicitude pour sa personne, en générosité, en compétence technique, en coordination, en maîtrise de nos émotions, etc. pour que se réduise significativement le phénomène de la traumatisation secondaire. 
  2. Rompre le mur du silence et bénéficier d’une présence engagée et bienveillante à ses côtés. Présence de certains de ses proches si possible, présence d’un ami, présence de professionnels … à tous ces compagnons de route « qui acceptent de savoir », il revient de : 

◊ - Ecouter ; encourager l’enfant à se libérer de ce qu’il a sur le cœur, à faire part de ses incertitudes et de ses questions ; sans avoir le réflexe de le reprendre et de corriger ses dires trop vite, en référence à des émotions de mère-poule ; accepter d’abord la présence de ses affects et de ses idées tels qu’il les ressent  spontanément ; 

◊ - Donner à l’enfant cette chance unique d’être cru pour ce qu’il raconte de plausible et le lui signifier même si, par la suite, des experts professionnels devront mieux analyser ses dires ; au minimum, reconnaître une souffrance  bien présente ! 

◊ - S’engager : partager des émotions et des idées ; en prenant son temps, se différencier, délicatement et respectueusement,  des idées fausses les plus toxiques de l’enfant (par exemple autour de la légitimité des sévices) ; pouvoir s’indigner, rassurer, consoler l’enfant, lui redire la valeur d’être qu’il conserve ; 

◊ - S’engager concrètement dans les processus de protection et d’amélioration des relations dont je parlerai bientôt ; 

◊ - Parler d’autre chose ; ne pas réduire l’enfant à sa dimension « victime de sévices » ; s’intéresser avec lui aux intérêts positifs qu’il conserve ; remettre Tom Boonen sur son petit vélo ; encourager Noémie à recréer des liens d’amitié.

3. Protéger concrètement l’enfant, tant des récidives d’agression que d’une ambiance de vie délétère. S’engager personnellement dans le processus ; en surveiller l’évolution et sans jamais faire une confiance aveugle aux promesses officielles des institutions. 

◊ - Dans la majorité des cas, ce qui se passe dans les institutions est plutôt frileux et hésitant : les suspects nient comme de beaux diables, et d’autres éléments ne sont pas toujours complètement sûrs ; les services institutionnels sont débordés ou en rivalité. Alors, il faudra toujours le courage déterminé de l’un ou l’autre professionnel, les plus généreux, les moins timorés, pour aller de l’avant. En passant à travers d’inévitables moments de doute ! En s’efforçant d’éviter des attitudes contre-productives comme l’activisme, la précipitation, le manque de discrétion … et leurs contraires, la ritualisation bureaucratique ou le superbe isolement.

Partant, un certain nombre de mesures de protection réalistes sont programmables, mais qui nécessitent parfois la séparation du couple parental ou celle de l’enfant et de son milieu familial originaire. 

◊ - Tant à titre préventif que remédiatif, il faut se rappeler que l’enfant peut participer à sa propre protection, du moins à partir d’un certain âge et à la mesure de ses forces et de son intelligence. Il peut le faire tant en utilisant des stratégies de prudence et d’évitement, qu’en disant des « Non » plus fermes et bien motivés ; tous les agresseurs potentiels ne sont pas des psychopathes, loin de là … beaucoup sont  des minables ou des séducteurs qui essaient, mais que l’enfant pourrait remettre à leur place. Surtout s’ils ont l’intuition qu’en outre,  l’enfant est disposé à ne pas tenir sa langue. 

◊ - Et en effet, l’enfant peut aller chercher un supplément d’aide juste autour de lui, parfois déjà chez ses amis ou dans sa fratrie. La vigilance, la solidarité, la détermination de l’entourage informel et sain de l’enfant peuvent alors être des adjuvants précieux, sans pour autant se transformer en vengeurs d’extrême droite ni virer systématiquement l’agresseur aux gémonies. 

◊ - Les fois rares mais réelles où l’on ne peut pas gagner en protection matérielle, on peut s’efforce de rester en contact avec l’enfant pour discuter avec lui de ce qu’est l’intégrité spirituelle : un adulte a peut-être le pouvoir d’abîmer son corps d’enfant mais jamais celui de s’emparer ipso facto de son âme. Si l’enfant le veut de toutes ses forces, le plus pur de lui-même, - c’est-à-dire son psychisme et ses valeurs – resteront hors d’atteinte.

4. Si c’est indiqué, les enfants vont bénéficier du fait que l’on profite des circonstances pour améliorer le sort social de leur famille ou la qualité du tissu relationnel dans lequel ils vivent.
Néanmoins, ils apprécient encore plus fondamentalement qu’on les traite comme des sujets humains, et plus comme des objets de l’emprise d’autrui. Il faudra donc prendre très au sérieux leurs « Oui » ou leurs « Non » par rapport aux projets qu’on leur présente, notamment les projets psychothérapeutiques.

5. Les enfants n’aiment pas que leurs malheurs soient racontés à tous les vents des salles des profs et nous avons donc un devoir de discrétion à leur égard. Dans le cadre de cette discrétion, beaucoup finissent néanmoins par apprécier qu’il existe une reconnaissance sociale du préjudice qu’ils ont subi. Sociale, cela veut dire : au moins par un petit groupe de personnes proches. Ils apprécient aussi que tombe une sanction sociale ou pénale de l’agresseur et si possible une réparation concrète de sa faute. Ils ne veulent néanmoins pas toujours couper tous les ponts avec lui.

 L’équipement et les processus institutionnels conçus par nos sociétés industrialisées permettent-ils de répondre à ces besoins ? 

 

En multipliant des canaux de communication adaptés, on  a matraqué aux enfants un message qui peut se synthétiser ainsi : « C’est inacceptable qu’on vous fasse subir des sévices. C’est contre les droits des enfants. Dites non si ça vous arrive. Parlez-en et demandez de l’aide à une personne de confiance. Vous serez bien aidés ! » 

Message néanmoins angélique dans sa dernière partie. On n’a jamais vraiment expliqué aux enfants – du moins aux plus grands – comment ils pouvaient mieux se défendre personnellement, en étant efficaces et sans prendre trop de risques. On s’est limité à    brasser le message : « Passez la main. Signalez »

Et les États ont beaucoup misé sur des structures très spécialisées, de troisième ligne, déjà en place ou créées pour la circonstance. En oubliant  que le fonctionnement de telles structures est très coûteux et donc qu’elles ne peuvent rendre que des services limités sur le plan quantitatif ou alors accumuler des retards  incompatibles avec la chronologie des sévices.

 Quelles sont ces structures très spécialisées ? 

 

Dans certains pays, comme la Belgique, on a créé des équipes psycho-médicosociales spécifiques, les équipe « SOS-Enfants » en Francophonie, d’abord dans la perspective d’une prise en charge des problèmes qui soit dé judiciarisée, « à l’amiable » Au début, dans les années 1980, si les situations gérées par ces équipes devenaient trop résistantes ou trop dangereuses, elles faisaient appel aux Tribunaux de la Jeunesse, en complément et en soutien de leur travail. Avec leur pouvoir de contrainte spécifique, ces Tribunaux pouvaient obliger les familles à certaines prestations ou procéder à des placements d’enfants. 

Néanmoins, cette ambiance de non-judiciarisation ou de complément judiciaire léger n’a pas duré longtemps. La Justice pénale a très vite fait valoir que l’on se trouvait face à des crimes et délits, parfois immondes, et qu’il était obligatoire de lui en signaler l’existence .Et les consignes d’Etat ont abondé dans ce sens, Or, la logique essentielle du monde pénal,  c’est la punition de l’auteur, une fois avérées les preuves de sa faute, et non pas l’aide à la victime. 

Certes, quelques efforts de procédure ont été consentis pour s’adapter aux caractéristiques des enfants et pour  ne pas trop les traumatiser durant la procédure, mais ils n’ont pas été très loin ou se sont vite trouvés porteurs d’efforts pervers [6]. La Justice pénale n’a pas été en mesure d’accroître son personnel, ni de le spécialiser significativement pour métaboliser cette importante nouvelle arrivée de situations, et elle a continué à fonctionner selon ses rites habituels : lenteur, suspicion à propos de la seule parole de l’enfant en l’absence de preuves matérielles, autarcie et difficulté à collaborer avec les équipes soignantes. Il n’est donc pas rare que, une fois mise en route la procédure pénale, le travail de soutien effectué par les équipes psychosociales  s’effrite, voire soit abandonné avec méfiance ou rage par les protagonistes du drame, qui se sentent  trahis. Léon Kreisler écrivait déjà, en 1995 : « Il existe des contradictions difficilement surmontables entre les techniques d’investigation psychiatrique, l’obtention de l’aveu et les nécessités de la protection de l’enfant »

 Résultats de ces choix  d’une « machinerie lourde » 

 

◊ - En nous limitant aux cas graves, il est probable que la majorité d’entre eux sont et resteront encore longtemps non repérés. 

◊ - 10 à 15 % des cas repérés ne le sont que théoriquement, et se perdent progressivement dans une paperasserie kafkaïenne, là où finissent par mourir d’ennui les patates les plus chaudes 

◊ - Autour de 20 %  de ces cas graves et repérés restent traités à l’amiable en Belgique, sans intervention judiciaire, avec des succès variables.

Reste donc environ deux tiers des cas graves et repérés où la Justice pénale intervient. Mais la sanction de l’agresseur ne s’ensuit le plus souvent que s’il y a aveu ou de lourdes preuves matérielles qui en constituent l’équivalent. Alors, le traitement psychosocial de la victime peut avoir lieu, mais de façon plutôt clivée. L’agresseur, lui, peut être  soigné en prison et parfois pseudo accepter des soins pour éviter celle-ci. 

Malheureusement, dans la majorité des cas d’abus sexuels ou psychologiques, la Justice pénale ne dispose que de la seule parole de l’enfant, assortie au mieux de quelques impressions de la partie saine de son entourage, et c’est une autre paire de manches. Certes, cette parole doit être bien documentée et expertisée, mais elle peut l’être, notamment grâce à des techniques d’entretien et d’analyse du contenu qui nous viennent du Québec [7]

Hélas, cette probabilité scientifiquement validée est loin de toujours suffire ! Même face à  elle, trop de Tribunaux se réfugient – abusivement à notre sens – derrière le principe de la présomption d’innocence. Pour une affaire d’Outreau – toute regrettable soit-elle - qui a reçu les excuses de la haute magistrature d’un pays, combien de milliers d’innocentes victimes-enfants laissées ou renvoyées à leur triste sort ! Et alors, ce qui s’ensuit est des plus aléatoires. 

 L’éventail des interventions souhaitables

 Leur inscription institutionnelle

 

Il ressort de tout ce qui précède que nous souhaitons de profonds changements de mentalité et d’organisation institutionnelle pour prévenir puis prendre en charge les sévices.

Une éducation en partie différente et de nouveaux types de campagnes de sensibilisation peuvent inciter plus activement les enfants à engager directement leurs forces pour se faire respecter davantage ; les parties saines de leur entourage informel peuvent s’engager plus personnellement et courageusement  à leurs côtés. Ensemble, ils viendraient déjà à bout d’une partie des problèmes. Si nécessaire, ils pourraient en outre recevoir l’aide d’intervenants de première ligne que l’on aurait plus systématiquement formés à cette fin. Autant pour la seconde ligne (par exemple, centres de santé mentale)

Des équipes médico-psycho-sociales surspécialisées de troisième ligne, type équipes SOS-Enfants en Belgique, sont indispensables, mais, vu leur coût, resteront peu nombreuses. Nous proposons donc de réserver leur potentiel pour : l’aide à l’évaluation, la formation, la supervision et le soutien des intervenants de première ligne et la prise en charge des cas les plus pathologiques, avec ou sans intervention judiciaire complémentaire.

L’adjonction éventuelle du Tribunal pour mineurs peut s’envisager dès le stade où interviennent les professionnels de première ligne. Celle de la Justice pénale sera discutée par après. 

Description des principales interventions

 

Faute d’espace, nous nous limiterons à les énumérer, en respectant un ordre chronologique approximatif [8].

 1. Entraîner les intervenants potentiels à reconnaître et à exprimer leurs émotions : identification massive à la victime ; angoisses face aux diktats institutionnels ou à la violence potentielle de l’agresseur, etc.

Les entraîner à travailler en petite équipe, habituellement organisée ou formée pour la circonstance, caractérisée par la discrétion, l’intensité de l’investissement et une capacité de réfléchir avec réalisme. S’il y a révélation, agir comme un contenant solide de la crise qui s’en suit ; rester discrets et ne pas se précipiter [9 ]; viser à bien comprendre les enjeux, les possibilités de collaboration ou de résistance des personnes incriminées et des institutions proches ; se coordonner ; élaborer un plan d’action réaliste comportant plusieurs scénarios d’issue, avant de privilégier le plus momentanément favorable.

 

  1. Par la suite, quel que soit le chemin emprunté, l’accompagnement de l’enfant requiert un « permanent » en qui il a confiance et qui sache faire face aux besoins évoqués dans l’alinéa I. Ce confident n’est pas nécessairement un individu. Ce peut-être un petit groupe de personnes qui se parlent et s’entendent : sa maman, des parents d’accueil, son médecin généraliste, un psy … peu importe, pourvu qu’ils aient de la disponibilité, du sens de l’écoute et de la détermination à ne pas se laisser effriter par le temps ; 
  2. Soutenue voire prise en charge par cette fonction – confident, une évaluation précise de la situation s’impose. Au besoin, elle inclut un examen somatique soigné de l’enfant. Il en va de même de l’évaluation du contexte systémique du problème, c’est-à-dire du jeu de relations positives et négatives en présence, familiales et institutionnelles. Ceci dit, le cœur de l’évaluation ressort de l’observation de l’enfant et du dialogue avec lui. Tous ceux qui se réclament d’une expertise à ce propos devraient bien connaître des techniques d’entretien non-suggestif de l’enfant et d’analyse de son discours [10]
  3. Quand l’évaluation est suffisamment avancée, une organisation de la prise en charge solide et efficace s’impose. En référence aux chiffres cités plus haut, nous sommes dubitatifs quant à l’efficacité d’une intervention judiciaire pénale systématique. Nous commencerons donc par parler de la prise en charge des besoins psychosociaux  lorsque cette inclusion de la Justice pénale n’a pas lieu : 

5.  La protection de l’enfant peut être assurée à l’amiable ou, s’il échet, avec l’aide du Tribunal pour mineurs ; 

6. Selon la gravité de la psychopathologie de l’enfant, on peut lui proposer une psychothérapie individuelle. Ni phobique, ni réducteur, le thérapeute veillera à accueillir cet enfant comme un sujet en souffrance, qui avance à son rythme, qui doit être ré apprivoisé pour retrouver confiance  et poser ses questions les plus originales et les plus embarrassantes (« C’est pas possible, hein, qu’un garçon attende un bébé  »  demandait Tom – huit ans – sodomisé à répétition par son vieux voisin ) Redisons-le, il s’agit de proposer à l’enfant de parler de ce qui est difficile et pas de l’y obliger par intimidation ou séduction ! 

7.  Certaines thérapies de groupe pour enfants-victimes fonctionnent avec  délicatesse, sans l’obligation de parler et de tout liquider en six séances, comme on le voit hélas sous d’autres latitudes.

Surtout si les sévices ont été perpétrés en famille, un travail thérapeutique avec celle-ci pourra l’aider à retrouver une meilleure image d’elle-même et une capacité plus effective d’investissement et de protection mutuels. Attention néanmoins au travail sauvage ! Mieux vaut procéder progressivement et délicatement (travail avec la mère seule ; avec la fratrie ; avec le sous-groupe mère-victime, etc.) Ce peut être souple, sans jamais faire de violence dans les invitations ! (J.-Y. Hayez et E. de Becker, 2002) 

8. Si  nécessaire, on veillera aussi à améliorer le bien-être social de la famille, son ouverture, l’intégration sociale de l’enfant, etc., sans tomber dans le piège du quadrillage social des familles défavorisées. 

9.  Et l’agresseur direct ? Si le cas est totalement non-judiciarisé, il faudra parfois beaucoup d’énergie pour l’amener à une reconnaissance raisonnable de sa responsabilité et à l’importance de créer une distance, au moins transitoire, entre sa famille et lui. S’il sent, de la part des intervenants, non pas un rejet total, mais un regard nuancé, où il est reconnu et dans ses dimensions positives et dans sa misère et dans son choix occasionnel de faire le Mal, il acceptera éventuellement un traitement, sous forme de psychothérapie individuelle ou de participation à une thérapie familiale. On ne peut cependant jamais imposer à la victime d’être mise en présence de son agresseur contre son gré. Au mieux, celui-ci demandera pardon et cherchera à réparer sa faute. Comme nous l’avons déjà dit, une concertation avec le Tribunal pour mineurs peut s’avérer intéressante puisqu’il a le droit d’imposer certaines mesures sous la contrainte en référence au bien de l’enfant.

1o. Quelle place pour la Justice pénale ? Nous souhaitons que celle-ci n’intervienne qu’en référence à des indications précises : les cas les plus graves, marqués par la psychopathie ou la perversion des auteurs ; les cas d’importance moyenne ou grave inaccessibles ou récidivistes après une première application des programmes psychosociaux précités, surtout s’il y a danger pour l’intégrité physique ou la vie de petits enfants sans défense ; les pédophiles multi prédateurs et pervers ; les réseaux de pédophiles ; les situations où il y a exploitation commerciale mafieuse des enfants : la tâche reste donc abondante pour les magistrats pénalistes, mais peut-être juste assez pour éviter des lenteurs et des retards kafkaïens. 

◊ - Le travail spécifique de la Justice pénale ne devrait pas empêcher l’application du programme psychosocial précité : chaque Instance peut conserver son indépendance et sa logique propre en faisant preuve de souplesse, de capacité de dialogue, de coordination, de respect pour la part de travail que « l’autre » effectue de son côté, sans revendiquer le pouvoir à tout crin. 

◊ - La Justice pénale doit continuer à adapter certaines techniques et procédures, pour accroître la qualité des témoignages recueillis chez l’enfant et réduire au maximum la traumatisation secondaire (par exemple, exigence sur la formation des experts ; audition des moins de six ans endéans les 72 heures ; huis-clos prononcé lorsqu’un Tribunal visionne des cassettes audio-filmées ; interdiction de faire état dans la Presse des dires textuels des enfants, etc.) 

11.  Le vrai problème de fond  se posera encore longtemps lorsqu’il n’y a ni aveux du supposé agresseur, ni preuves matérielles, hormis la parole de l’enfant (et de ses alliés, parfois) qui accuse. Dans la mesure où cette parole a été recueillie par des experts compétents, formés à des techniques fiables [11]. On devrait arrêter de se réfugier derrière le slogan : « C’est la parole de l’enfant contre celle de l’adulte » et derrière une conception bien trop frileuse de la présomption d’innocence.

12. Ayons l’humilité de reconnaître que, dans un nombre non négligeable de situations, c’est et cela restera largement l’inaccessibilité. Certaines situations sont connues, mais la forteresse des auteurs reste imprenable ; et il existe aussi un lourd chiffre noir derrière lequel se cachent notamment les adultes les plus puissants, les plus pseudo-respectables, et aussi les cas les plus odieux !

De loin en loin, dans ces situations, l’enfant se plaint néanmoins auprès d’un confident qui sait. Peut-être celui-ci peut-il s’acharner à trouver avec celui-là l’un ou l’autre « truc » pour être violé une fois par semaine plutôt que trois ? Peut-être peut-il partager son écoute et son impuissance ? Peut-être enfin peut-il rappeler à l’enfant qu’on peut lui voler son corps, mais pas son âme, et que, spirituellement, il peut rester « intègre », un vrai tréso ? Bruno Bettelheim l’avait déjà compris en évoquant les survivants des camps de concentration.

En guise de conclusion

 

Bien que d’énormes chiffres noirs rendent malaisées les approximations quantitatives, j’estime  que les résultats sont modestes et le resteront encore longtemps, en dépit de toutes les déclarations politiques et installations de nouvelles structures pilotes, à grand renforts de cocorico. 

Pourtant, beaucoup de professionnels connaissent mieux les réalités des sévices et de nombreuses formations pertinentes améliorent les outils de la prise en charge individuelle et familiale 

Certes, je persiste à penser que nous avons fait de lourdes erreurs dans la conception même de l’équipement : nous avons trop misé sur la surspécialisation et pas assez sur l’encouragement des solidarités sociales de première ligne et sur le soutien à leur apporter. Mais, pour réelle qu’elle soit, ce n’est pas cette erreur-là qui explique vraiment la modestie des résultats. 

La difficulté est chevillée au cœur de l’être humain : même si sa liberté de choix le rend capable de beaucoup de générosité, elle peut engendrer aussi beaucoup de destructivité. L’agression des plus faibles par les plus forts, pour les jouissances que ceux-ci en tirent constitue un des hauts lieux de l’interminable combat de l’humanité entre le Bien et le Mal.  Bien des institutions, lâchement, continueront à ne pas se laisser mettre en question. Bien des auteurs continuent à nier, pas seulement parce qu’ils ont peur d’aller en prison, mais parce qu’ils ont besoin, pour se sentir vivre, de leur addiction au Mal. 

Alors ? Alors, ce n’est pas le moment de laisser tomber les bras : « Celui qui sauve un être humain sauve l’humanité », dit un beau texte du Talmud ainsi qu'une sourate du Coran. Essayons d’en sauver plus qu’un, quand même, et de participer par notre témoignage de vie à la construction d’une humanité plus sociable ! 

Notes 

2  Néanmoins, ici, tant le contexte que les conséquences psychologiques sur la victime peuvent être très différentes des répercussions liées aux situations « plus habituelles » 

3   Paradigmes : l’école, la crèche. 

4   Insultant pour tel condisciple faible ou pour tel prof vécu comme particulièrement « ch. » 

5   On sème la confusion entre l’amélioration de la qualité des techniques d’audition, d’une part, et, de l’autre, le pouvoir effectif que l’on attribue à ce que l’enfant dit. Ce n’est pas vrai, qu’il existe une sacralisation diffuse de la parole de l’enfant ! C’est l’inverse vers lequel on tend.

6   Par exemple, on procède à des auditions vidéo-filmées des enfants pour réduire ou éviter la répétition des interrogations, mais … les avocats se servent de plus en plus des imperfections inévitables de ce matériel pour enfoncer les enfants ; ou alors, on l’expose sans délicatesse, c’est-à-dire sans huis-clos, en audience publique. 

7   La méthode d’analyse la plus indiscutable est le SVA – statement validation analysis – de Yuille J.C. et coll., aduite par  Van Gijseghem H. (Yuille J.C., 1988) 

8   Si vous souhaitez connaître ce que nous en pensons de façon plus détaillée, vous pouvez vous référer à J.-Y. Hayez et E. de Becker, 1997, p. 177-293 et J.-Y. Hayez et E. de Becker, 2002, p. 131-145. 

9   Sauf les cas de grave danger physique rapproché, qui relèvent d’une protection rapide et efficace.

10   Nous avons déjà signalé que le paradigme à ce propos est le statement validation analysis québécois. 

11   Nous avons déjà évoqué la référence paradigmatique : le statement validation analysis québécois. L’une ou l‘autre grille élaborée par des cliniciens chevronnés s’en inspire fortement et lui équivaut. 

Bibliographie

 

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