La directrice d’une ASBL m’écrit pour me faire part du désarroi d’une dame qui consulte son ASBL:

 

Résumé de la situation; Quelques dates : 

 

Thérèse, 50 ans, sécrétaire de direction, est mère de trois enfants : Charles, né en 1988, Valérie, née  en 1990 et Thomas, né en 1992.

Après huit ans de mariage, le couple bat de l’aile et Thérèse découvre un  adultère en mai 2002. Elle essaie de sauver le couple mais est néanmoins répudiée (c’est le mot !) en mars 2003. Un arrangement à l’amiable est pris (le mot est symbolique) : le monsieur s’installe avec sa maîtresse dans la maison familiale, et Thérèse dans un appartement en ville, avec choix d’une garde alternée.

Puis des mois de galère pendant lesquels s’installe la manipulation des enfants (bien sûr Thérèse ne le voit pas c’est avec le recul qu’elle met des mots sur la situation qu’elle  a vécue)

En avril 2004, Thérèse décide une démarche pour rencontrer un avocat et demande de divorce, le monsieur ne supporte pas cette décision et voilà vraiment l’élément déclencheur du sap qui va s’installer très très rapidement.

En octobre 2005, la Justice retire à Thérèse la garde de ses enfants ; elle aura droit à un we par mois de garder ses enfants. 

Thérèse est effondrée et ne reconnaît plus ses enfants. Dès qu’ils sont majeurs, ils rompent tout contact avec elle malgré  les tentatives de Thérèse.

 

Ce que vit Thérèse : 

 

Avant 2005, bonnes relations de Thérèse avec ses enfants.

L’élément déclencheur est donc lorsqu’elle décide de consulter un avocat.

C’est d’abord une campagne de dénigrement puis s’installe une attitude de rejet profond et massif de chacun des enfants vis-à-vis de Thérèse. Dès leurs 18 ans,  les enfants ne donnent plus aucune nouvelle malgré les tentatives de leur mère. Valérie n’aura plus ses règles, la suite on ne sait pas. Les enfants sont brillants à l’école ; avant leur majorité, Thérèse savait peu de leur scolarité, maintenant elle ne sait rien. En 2007, Thérèse signalera la situation au juge des enfants, courrier qui, restera sans réponse.

Le rejet s’étend absolument à toute la branche maternelle, ce qui met d’ailleurs en grande souffrance les grands-parents maternels. Les enfants entretenaient pourtant auparavant de bonnes relations avec oncle, tante, cousins. L’amie de Valérie a rompu avec elle car elle ne la reconnaît pas.

Pour moi il est clair que les enfants sont pris en otage et sont alliés contre leur mère. Depuis 2005, ils ne sont plus à leur place, ils sont ralliés corps et âme à leur père ; Thérèse entend le père parler quand le dernier Thomas émet quelques mots d’ailleurs il ne dit plus  « je » mais  « nous »

 

Que faire ? Que penser ? Qu’espérer ? 

 

En lisant la thèse de B. Goudard (médecin à Thérèsecy ; thèse en 2009 sur le sap) il y a de quoi être inquiet. Elle écrit « plus le temps passe, plus le conflit se cristallise et plus il est difficile de revenir en arrière et du côté du parent aliéné ; le temps contribue chaque jour à déliter le peu de lien qu’il restait. Le lien s’effiloche et dans l’hypothèse d’un retour des enfants vers le parent aliéné il ne sera plus le même dans la majorité des cas. Les enfants resteront des étrangers. » C’est insoutenable pour une maman de lire ceci.

 

Je lui réponds : 

 

Bonjour madame,

 

Je réponds à votre courriel en supposant que les choses se sont passées exactement comme vous me le décrivez, c’est à dire que la maman ne s’aveugle pas sur une éventuelle part de dysfonctionnement émanant d’elle (par exemple, dans sa relation aux enfants, elle aurait pu elle-même dire du mal du papa)

Donc, à supposer qu’elle n’y soit pour rien, ou pas grand’chose, j’ai rencontré  dans ma carrière deux fois un SAP très grave et indiscutable émanant d’hommes et ciblant des grands enfants ou des adolescents.

C’était chaque fois des hommes très orgueilleux, qui n’avaient pas supporté l’autonomie de leur ex-épouse, et qui la présentaient alors aux enfants comme une mauvaise mère les abandonnant : A coups de mensonges et de chantage affectif, ils transformaient les idées de leurs ados et, une fois le mal fait, par orgueil aussi, les ados se cramponnaient à leurs nouvelles idées.

Dans un de ces cas, il y a eu des retrouvailles avec la mère vers les trente ans des jeunes. Dans l’autre, je ne sais pas.

De toute façon, bien que ceci paraisse frustrant et injuste, il n’y a rien d’autre à faire qu’à attendre et espérer. Peut-être un « messager », un intermédiaire, qui a la confiance des enfants, peut-il de loin en loin présenter discrètement la mère, sa souffrance et son attente, comme elle est vraiment.

Ce messager doit pouvoir garantir aussi que, s’il existe des retrouvailles un jour, il n’y aura, dans le chef de la mère, pas l’ombre d’une enquête, d’un reproche … ce sera comme une relation qui recommence à zéro.

Inversement, vu l’âge des jeunes ici concernés, toute démarche autoritaire aurait des effets désastreux.

Croyez à mes sentiments dévoués,

 

 

SAP, Gardner,