8.3. AVANT 2005
Année 2000
1) Le point avec l'ASBL Julie et Mélissa et la revue N'oubliez pas!
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2002 offtopix 2002 article pour moniquet sur creche clovis
Pédophilie à l'Eurocrèche
Alors que l’enquête sur les graves faits de pédophilie survenus à la « Crèche Clovis » continue et que la polémique sur la manière dont la Commission européenne a géré la situation est loin d’être close (voir infra), il nous a semblé particulièrement intéressant de donner la parole à Jean-Yves Hayez don’t les équipes mènent les thérapies qui permettront aux victimes de surmonter leur traumatisme mais qui, aussi, nourrissent le dossier d’instruction du juge Vandermeersch.
C’est vrai, leur âge peut, a priori, étonner, mais il ne faut pas perdre de vue que 8 à 10% des enfants abusés ont moins de 6 ans. De toute façon, le travail thérapeutique que l’on peut entreprendre avec de si jeunes enfants n’est jamais simple, quel que soit l’âge de la victime. Dans le cas qui nous occupe, il a été nécessaire de prendre tout notre temps. Un enfant aussi ne parle pas ‘sur commande’, même pour répondre à des questions posées avec délicatesse et gentillesse par un adulte en qui il a confiance…
Il faut « réapprivoiser » ces enfants, un peu comme le renard du Petit Prince de Saint Exupéry, avec infiniment de délicatesse. Le reste dépend du type de traumatisme subi par la victime. Dans un peu plus de 50 % des cas, l’enfant abusé l’a été par un adulte qui s’y est pris sans lui faire trop peur, malgré l’horreur des faits. Certes, il a été trompé et son innocence a été exploitée, mais on a agi sans que l’enfant remarque vraiment qu’il y avait là un tabou qu’on transgressait. En fait, l’abuseur a fait comme si tout cela était totalement normal. L’enfant qui a subi ce type d’attouchements fera, le plus souvent, allusion par le biais de ce que nous appelons la « mémoire d’évocation ». Par exemple, en prenant son bain, il demandera à son père pourquoi il ne lui touche pas le zizi comme untel l’a fait. Les parents doivent être très attentifs à ce type de comportement à l’écoute. Sans sombrer dans la paranoïa. Pour d’autres enfants que nous traitons, une forte minorité de 30 à 35%, les choses se sont déroulées de manière totalement différente. Ils ont été effrayés par le violeur, soit que celui-ci aie été particulièrement brutal, soit qu’il ait menacé sa victime au cas où celle-ci se déciderait à parler… Les enfants qui, ont été confrontés à ces techniques d’effroi sont glacés, inhibés, ils développeront des attitudes extrêmes, en refusant, par exemple, qu’on les touche ou qu’on les déshabille ; ils se plaindront de maux de ventre et auront des cauchemars. Avec ces enfants-là, il est particulièrement nécessaire de respecter le rythme. Il faut susciter la confidence, accompagner l’enfant mais, surtout, ne pas le brusquer pour qu’il n’ait pas l’impression de revivre ce traumatisme avec top d’intensité. Le rythme judiciaire et le rythme thérapeutique peuvent donc ne pas être en phase, mais ce qui importe avant tout, c’est le bien-être de l’enfant. Il faut l’aider à « retrouver ses marques » et à aimer à nouveau la vie.
Je ne souhaite pas me prononcer sur un dossier à l’instruction, sur lequel mes équipes travaillent encore. Tout ce que je peux vous dire, c’est que, dans cette affaire, nous avons eu une chance énorme :la première victime, celle dont la thérapie a permis de dévoiler les faits et d’identifier les autres enfants abusés, est d’une intelligence et d’une lucidité extraordinaires. De plus, ses parents, ont eu immédiatement la réaction qui s’imposait. Ils l’ont entouré de leur amour et lui ont permis, en s’appuyant sur cette confiance, de concevoir qu’ils pouvait parler, que tous les adultes n’étaient pas, loin de là, ses ennemis. Mais il ne faudrait pas tirer de cas exemplaire la conclusion que le travail thérapeutique est facile parce que tous les enfants parlent vite et clairement, car c’est faux.
Confiance, patience, reconstruction, « réapprivoisement » sont les maîtres mots. Voilà pour le fond. Quant à la forme, les équipes « SOS Enfants » qui n’appartiennent pas au monde judiciaire mais bien à l’univers médical ont été au coeur du travail. Nous avons développé un système original et reconnu par le monde judiciaire, qui évite que l’enfant doive être entendu vingt fois par vingt équipes médicales ou policières différentes. Les thérapeutes, en présence d’une personne de confiance désignée par le parquet entendent l’enfant qui, lui-même est accompagné par un adulte de son choix. Ces séances sont filmées et ont une très grande importance dans la procédure. Et pour éviter un nouveau traumatisme, l’enfant abusé n’est confronté à son possible violeur que via une bande vidéo et des écrans de télévision. Enfin, je dois souligner que les enquêteurs de la BSR de Bruxelles, et surtout le chef d’enquête, ont fait un travail remarquable.
Il est vrai que nous ne travaillons que rarement sur des enfants de cet âge, mais c’est surtout une première dans le sens où nous avons en face de nous non pas un cas isolé, mais bien toute une petite communauté d’enfants qui, tous, ont été victimes d’attouchements et/ou de viols. Ce qui est nouveau, aussi, c’est que l’on ait accordé une valeur à la parole d’enfants aussi jeunes, qu’on les ait écoutés ET crus Et nous avons eu raison puisque leurs thérapies ont permis de transformer les soupçons en évidences, et tout cas de notre point de vue de thérapeutes.
Je peux vous dire que, quand l’enfant a commencé à parler et qu’il est arrivé chez nous en thérapie – même si un jeune enfant est très suggestible – il était vierge de toute « contamination » d’un discours adulte.
Il n’y a pas de fatalité dans ce domaine, malgré ce que l’on dit trop fréquemment. L’enfant qui a pu exprimer sa douleur et son dégoût, parler de son angoisse et la purger peut tout à fait être préservé de toutes séquelles graves. D’autre part, à mon sens, il est à long terme beaucoup plus traumatisant d'avoir été « simplement » la victime d’attouchements répétés, sur une longue période, par un parent ou une personne de confiance, que d’avoir été violé, même avec une certaine brutalité, une fois ou même quelques fois sur un laps de temps assez court. J’ajouterai encore que l’abus sexuel n’est pas le seul malheur qui puisse arriver à un enfant. La violence, l’alcoolisme parental, l’exclusion scolaire, le racket par un frère plus âgé, ou la guerre, sont également des traumatismes graves. Et peut-on dire que tous les enfants qui les vivent sont condamnés ? Qu’ils ne peuvent avoir d’autre avenir que la souffrance ? Bien évidemment, non. L’abus sexuel est horrible et doit être dénoncé et combattu, ses victimes doivent être prises en charge par des thérapeutes expérimentés et il faut les entourer d’amour, mais leur vie n’est pas finie. Une grande majorité d’enfants abusés pourront, demain, vivre debout et réussir pleinement leur vie. Voilà, je crois un message qui doit être entendu.
NE PAS AGIR,
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2003
2004 Internet et le déepndance (AFP 5 0ct 2003
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Infos | Les jeunes, internet et les jeux videos sous l´oeil des psychiatres
5 octobre 2003
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PARIS, 5 oct (AFP) - Internet peut être "la meilleure et la pire des choses" pour les adolescents, qui peuvent profiter de cet "extraordinaire moyen de se rencontrer" ou se retrouver prisonniers de l´écran jusqu´à 70 heures par semaine, ont mis en avant des psychiatres réunis à Paris.
Il est parfois difficile de différencier les "gourmands" d´internet, qui peuvent passer quinze à vingt heures par semaine en ligne, des drogués du web, a reconnu le professeur Jean-Yves Hayez, responsable de l´Unité de pédopsychiatrie des Cliniques universitaires Saint-Luc à Bruxelles.
Il revient aux parents de fixer une limite de durée, et d´inviter "leur fils" à faire du sport, a-t-il insisté lors du 12è Congrès de la Société européenne de psychiatrie de l´enfant et de l´adolescent qui s´est ouvert lundi dernier dans la capitale française.
La cyberdépendance est un phénomène plutôt masculin, parmi les adolescents, comme le reflète le choix du mot "fils".
"On ne parvient pas à imposer à un jeune un sevrage total de son ordinateur, il faut plutôt réglementer", souligne Frédéric Goethals, du groupe Cyberrecherche du même établissement hospitalier bruxellois, soulignant également les "apports positifs" d´internet.
En créant son propre personnage lors de jeux en ligne, l´adolescent expérimente "différentes facettes de son identité". Il peut aussi, selon le chercheur, exercer sa créativité, son savoir faire, et "trouver une image positive de lui-même", lorsqu´il réussit, par personnage virtuel interposé, à "sauver le monde ou gagner un championnat de foot".
Le jeu video qui permet "d´avancer par un processus d´essais-erreurs, sans véritables conséquences néfastes" dans un "monde situé entre le réel et l´imaginaire", serait, selon M. Goethals, une "sorte d´objet transitionnel" pour l´adolescent comme l´est le "doudou" pour le bébé.
Au nombre des bienfaits potentiels d´internet, il cite aussi la possibilité pour les jeunes de décharger "un trop plein d´agressivité", d´expérimenter leur sexualité hors du contrôle des parents, voire d´utiliser internet comme "un immense groupe de self-help", un "puissant instrument d´autothérapie".
A ce propos, le Pr Hayez relève que, pour faire de la prévention, il faudrait qu´il y ait "des psys dans les «chats» (forums de discussion, ndlr) comme il y a des éducateurs de rue".
Dans la cyberdépendance, il y a, selon les chercheurs, un "désinvestissement du monde immédiat", et un "refus de se soumettre à des informations venant des générations précédentes". Pour le Pr Hayez, il revient alors aux parents de ne pas fuir leurs responsabilités, mais de "penser le phénomène internet" et de chercher à le réguler.
Les psychiatres prodiguent le même conseil face à la violence dans les médias en général.
Pour un enfant, "être grand" cela veut dire "donner l´impression, qu´on n´éprouve rien" face à des images violentes, a souligné le psychiatre français Serge Tisseron. Mais pour prendre des distances, il est important, dit-il, qu´enfants et adolescents trouvent des interlocuteurs pour exprimer leur choc émotionnel par la parole, le dessin ou lors de jeux de rôle.
Supprimer la télévision à la maison n´est pas la solution, car les enfants la verront ailleurs et n´oseront pas en parler à la maison, s´ils la perçoivent comme un interdit, insiste encore Serge Tisseron.
Les jeux videos même non-violents imposent un "rythme trop trépidant" aux enfants, qui doivent pouvoir ensuite exprimer leurs émotions, en parlant de leurs jeux avec leurs parents, conseille-t-il encore.
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2004
1 généralités à propos de la sexualité (le soir en ligne)
RAPHAËL DUBOISDENGHIEN
ENTRETIEN
Professeur Jean-Yves Hayez, vous êtes responsable de l’unité de pédopsychiatrie aux Cliniques universitaires Saint-Luc, à Bruxelles. Votre livre sur « La sexualité des enfants » sera en librairie pour l’ouverture du procès Dutroux Ce procès va nous rappeler que la sexualité peut être une chose horrible. J’ai conçu mon livre comme un hymne à la reconnaissance d’une sexualité positive chez les enfants de 6 à 13 ans. Car, en 2004 encore, les adultes s’imaginent beaucoup trop souvent que les enfants sont loin d’une vie sexuelle active. Il suffit de consulter des sites internet sérieux pour s’apercevoir qu’ils sont très seuls face à la sexualité des jeunes. Inconsciemment jaloux, certains adultes ne désirent pas que les enfants entrent trop tôt dans un territoire qu’ils considèrent un peu comme leur bien. Quel devrait être le rôle des adultes ? Entrouvrir délicatement la porte de la sexualité infantile. Pour écouter l’embarras de l’enfant. L’informer sans lui expliquer trop vite des choses auxquelles il ne pense pas. Essayer de comprendre avant de « juger ». Ne pas croire qu’il faut fixer toutes les règles de conduite. Moyennant de petits tâtonnements, l’enfant trouve tout seul comment respecter les autres. Mais, il faut parfois rappeler, fermement, aux préadolescents qu’il n’est pas acceptable de faire certaines expériences sexuelles. Sans en faire un drame ! Ce dialogue autour de la sexualité concerne aussi bien les parents que les profs ou les psys. Vous n’êtes que modérément convaincu par l’efficacité de l’éducation sexuelle à l’école Ces séances arrivent rarement au moment où elles sont nécessaires. C’est quand un enfant apprend que son cousin est homosexuel qu’il a besoin de recevoir un peu d’information. Et puis, beaucoup de ces séances restent marquées par la biologie. On n’y parle pas assez de l’affectif. On ne dit pas souvent à l’enfant qu’il a déjà une sexualité. Je pense qu’il faut sensibiliser les enseignants afin qu’il y ait de petits moments d’éducation sexuelle dispersés dans la vie scolaire. Tout enfant peut subir un abus J’ai l’impression que notre société considère que tout abus sexuel est grave. On perd parfois son bon sens. Il faut demander des comptes aux abuseurs. Mais, en tant que pédopsychiatre, je constate qu’un petit abus isolé, vécu comme une « épine », a un effet traumatique souvent bénin qui ne détruit pas la personnalité. Il ne s’agit pas de mettre les institutions en route pour un slip enlevé par d’autres enfants dans les vestiaires d’un club sportif ! C’est moche, certes, mais la victime peut souvent se débrouiller seule. Il n’est d’ailleurs pas certain qu’elle gagne à en parler. Il faut aussi dénoncer certains slogans commerciaux ou pseudoscientifiques. Un abus grave ne laisse pas toujours de lourdes marques indélébiles. Et, surtout, un ex-abusé ne devient pas nécessairement abuseur. |
1bis repris aussi par la Libre.be
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2. Petit clin d'oeil au Monde.fr
DUTROUX LA BELGIQUE DOUTE ENCORE
L’émotion blanche ( 4 mars 2004 )
“L’affaire Dutroux” a provoqué une telle onde de choc que ses effets se sont fait sentir dans l’ensemble de la société belge. Et le procès qui se tient aujourd’hui à Arlon, huit ans après les faits, se veut une réponse à l’énorme émotion collective qui s’est manifestée le 20 octobre 96 dans les rues de Bruxelles. Au sortir de celui-ci, la Belgique sera-t-elle pour autant réconciliée avec ses institutions judiciaires et politiques, dont tout citoyen a le droit d’exiger qu’elles soient justes et efficaces ?
Lire également ci-dessous :
Quatre livres pour tenter de comprendre le procès
“Pour la grande majorité des citoyens, août 96 créa ou réveilla la prise de conscience d’une incapacité de l’Etat à veiller efficacement sur eux et sur leurs enfants …, rappelle Jean-Yves Hayez pédopsychiatre et professeur à l’UCL (1). Certes, depuis 1995, les parents des fillettes enlevées tentaient d’attirer l’attention de l’opinion sur les nombreux dysfonctionnements qu’ils vivaient à leurs dépens… Il a fallu le choc de la découverte de toutes les horreurs imputables à Dutroux pour que les yeux s’ouvrent. Il s’en est suivi une colère générale, intense et légitime, relayée par les médias aussi indignés que la population…L’Etat et les institutions ont alors vécu un profond désarroi…” Celles-ci ont tenté de réagir en créant une commission d’experts nationaux, un centre de recherches pour enfants disparus sponsorisés par le privé et une commission nationale de parlementaires. L’heure semble être revenue à la normalisation, mais, selon Jean-Yves Hayez “la confiance reste largement ébréchée et la rage secrète de beaucoup persiste”. L’opinion publique attend du procès Dutroux bien plus que des vérités judiciaires. Mais ce n’est pas à la Cour d’Assises d’apporter des réponses à des questions qui relèvent du pouvoir politique.
Du déni à la “scandalisation”
Dans des circonstances dramatiques, profondément ressenties dans la population, il faut toutefois raison garder, comme y invite l’ensemble des contributions d’un ouvrage de réflexion édité par la Communauté française, justement intitulé “Penser l’émotion” : “le risque est grand, lit-on dans l’introduction, de faire la part belle au sensationnalisme, de s’étendre sur les pratiques abjectes, de se centrer sur les détails les plus morbides - ceux qui font du tirage et alimentent les ragots. Et chacun alors de se retrouver captif du sordide, sidéré par l’horreur et renvoyé à une impuissance tellement insoutenable qu’elle provoque la colère, le passage à l’acte ou à l’inverse la dépression, la banalisation, les “à quoi bon?” et “tous pourris” (2). Penser ensemble l’émotion, pour dépasser l’effroi, c’est un travail de sauvegarde de notre société. Non pas pour se détourner des faits ni de ce qui se passe à la Cour d’Assisses d’Arlon, mais bien pour mieux comprendre ce qui se passe dans notre société.
Paradoxalement, avant “l’affaire Dutroux”, comme l’écrit la pédopsychiatre et psychothérapeute Catherine Marneffe, la population dans son ensemble, comme l’appareil judiciaire, ne voulaient pas entendre parler de la maltraitance des enfants. “Quiconque mentionnait l’existence de la maltraitance ou des abus sexuels des enfants, était rapidement réduit au silence” parce que l’image idéalisée de la famille – qui ne pouvait qu’être que “bonne” pour ses enfants - s’en trouvait écornée. De même, l’idée que l’enfant était naturellement “innocent”, c’était “une image que personne ne voulait voir abîmée par des faits douteux”.
Ce déni de la réalité de la violence intra-familiale aboutit à mettre sur pied un système d’aide, représenté pour l’essentiel par les équipes SOS-Enfants (3), alors que “les dysfonctionnements de l’appareil judiciaire mis en évidence par “l’affaire Dutroux” étaient bien connus par les membres de l’équipe SOS-enfants qui avaient à gérer des dossiers avec les tribunaux. Personne ne s’en est ému à l’époque…” observe Catherine Marneffe.
Depuis “l’affaire Dutroux”, le mal, l’agression sexuelle des enfants - qu’on ne voulait pas voir jusque là - est devenu “le mal suprême” d’autant plus que le mythe de la pureté de l’enfance volait en éclat. “Nous sommes [ainsi] passés du déni à la scandalisation sans que les besoins des enfants n’aient été réellement prix en compte, écrit Catherine Marneffe. Nous avons été envahis par… les défenseurs d’enfants, qui ont utilisé l’affaire Dutroux pour donner une notoriété inutile à la maltraitance et créer une atmosphère malsaine à des lieues de la réalité quotidienne que vivent les enfants maltraités et les professionnels qui doivent les aider à résoudre leurs difficultés.”
Ainsi, on a vu des publications pour enfants prétendant leur apprendre à se défendre par eux-mêmes, comme si les enfants ne pouvaient plus compter sur la confiance d’aucun adulte - dont les parents. Considérer tous les enfants comme des victimes potentielles, c’était adopter des méthodes de prévention qui étaient avant tout source d’anxiété pour les enfants, bien sûr, mais aussi pour tous les professionnels régulièrement en contact avec les enfants.
Il faut toutefois reconnaître que depuis l’affaire Dutroux, on donne - enfin - davantage la parole aux enfants concernés. On les écoute mieux. On croit à leurs souffrances. Et on reconnaît que la maltraitance existe, tout en évitant d’incroyables amalgames entre des situations sauvages liées au grand banditisme, dont on ne peut nier l’existence ( !) et la violence que l’on peut rencontrer à l’intérieur des familles, en milieu scolaire ou dans les mouvements de jeunesse. “L’affaire Dutroux” a également permis de donner un statut de victime aux enfants concernés… sauf quand, mineurs d’âge, ils sont eux-mêmes responsables d’actes délinquants. Pour eux, on leur a construit une prison à Everberg !
Sursaut moral ou mouvement politique?
“Faut-il voir dans la “volonté de justice” qui a animé la marche blanche et les travaux de la Commission “Verwilghen” un sursaut moral face à la déliquescence morale des institutions publiques, au contraire un dérèglement de l’État de droit sous la pression irrationnelle de l’émotion populaire? ”,s’interroge par ailleurs Edouard Delruelle, philosophe et professeur à l’Université de Liège (2).
Ce qui est sûr, c’est que les institutions “démocratiques” ont pris, comme on dit familièrement, un fameux coup. L’impuissance à sauver les enfants de la mort étalait l’impuissance des institutions. Les lieux de pouvoir apparaissaient vides. Aussi, il n’était pas du tout étonnant que l’émotion populaire exigea que l’on détecte tous les “déviants” - qui pourraient se cacher jusque dans les plus hauts niveaux de pouvoir. Implicitement, les Belges confièrent cette mission à quelques acteurs – qui n’avaient rien de chefs de guerre - comme le juge Connerotte, “les parents” ou Michel Bourrelet. “Le mouvement blanc a visé la reconstitution d’une autorité morale et non d’un pouvoir politique”, écrit Édouard Delruelle.
Alors que le jeu politique, qui par nature, est un lieu où se négocie un rapport de forces, le voici contraint de se placer, à la demande populaire, du côté des victimes dont les parents se voyaient investis de cette mission : donner un sens à la politique sans avoir à exercer un quelconque pouvoir de chef de file. Mais dans la Commission “Verwilghen”, on ne trouva que des fonctionnaires médiocres, des administrations jalouses de leur terrain d’action et de leurs informations. Bref, un stupide esprit de corps…
Le Mal que l’on cherchait à décrire, à pointer du doigt, ne serait-il que cela : de la médiocrité, un manque du sens des responsabilités et de professionnalisme ? Cela ne pourra suffire à apaiser la rage qui couve toujours. Pourra-t-on se satisfaire d’un procès qui juge et qui condamne ? Peut-on croire qu’au terme de ce procès la société belge sera mieux armée pour faire face à la perversité d’un Dutroux, aux “affaires” du Brabant wallon, au meurtre d’André Cools… et de bien d’autres “affaires” ? La question demeure : qu’est-ce que des institutions justes et efficaces ?
Christian Van Rompaey
(1) Lire sur l’Internet : http://www.observatoirecitoyen.be/
(2) Penser l’émotion. Recueil de textes édité à 20.000 exemplaires, distribué gratuitement auprès des structures sociales de la Communauté française. Ce livre n’est pas mis en vente. Mais il peut être consulté et téléchargé via l’Internet à l’adresse : www.sfwb.be/maltraitance .
(3) C’est n’est qu’en 1979, après une injonction du Conseil de l’Europe à l’État belge en 1969, qu’une recherche-action universitaire menée au cours de 4 années sur ce sujet, qu’aboutira l’installation des équipes SOS-enfants en 1983.
Quatre livres pour tenter de comprendre le procès
Affaire Dutroux, Affaire d’Etat ?
L’affaire Dutroux : Qui s’y retrouve ? Après huit ans d’informations, de rebondissements, de révélations, de rumeurs, de débats et de péripéties judiciaires, qu’en savons-nous vraiment? L’enquête qui a mobilisé des centaines de policiers et a bénéficié de moyens sans précédent dans notre histoire judiciaire, a vu son déroulement vicié et perturbé par des affrontements publics entre magistrats, policiers, parents et journalistes. Une partie de la population réclame des réponses aux questions que posent les parents des victimes. Le procès qui s’est ouvert devant les Assises d’Arlon sera l’occasion pour certaines victimes survivantes, juge d’instruction, enquêteurs, accusés, experts et témoins de s’exprimer. Leur vérité risque de surprendre, peut-être de choquer. Voilà pourquoi René-Philippe Dawant trouve utile d’approfondir la personnalité et les parcours des principaux accusés et de revenir sur les faits. Dans ce livre, le journaliste décante un dossier gigantesque, produit d’un vaste travail policier, pour proposer, à partir d’éléments originaux, des clés de lecture de cette affaire qui secoue toujours la Belgique.
Affaire Dutroux, Affaire d’Etat ? • René-Philippe Dawant • Ed. Luc Pire - Prix Public : 17 EUR – Prix En Marche : 15,30 EUR
Clés pour le procès Dutroux, Nihoul, Martin, Lelièvre
Ce livre se présente comme un guide pour comprendre ce qui se passe au Assises d’Arlon. C’est aussi un recueil de pistes sur la lutte contre la pédocriminalité et une contribution citoyenne pour faire reconnaître les droits des victimes et des enfants. Sept ans après la Marche blanche, l’Observatoire citoyen mène une réflexion sur le fonctionnement des institutions policières et judiciaires et, plus généralement, en charge de la protection de l’enfance en Belgique. L’Observatoire citoyen est composé d’une équipe pluraliste dans laquelle figurent Guy Poncelet, Marie-Jeanne Van Heeswyck, Vincent Decroly, Jean-Yves Hayez, Gaston Schoonbroodt, Alain Tondeur… Concrètement, l’ouvrage permet de retracer la chronologie de l’affaire, de rappeler les faits, les intervenants, les accusations dont répondent les accusés ainsi que quelques notions juridiques. Il décrypte le déroulement de la procédure pénale, plus particulièrement en Cour d’assises. Il souligne également les lacunes de l’instruction qui se répercuteront sur le procès. Enfin, ces ‘Clés…’ élargissent le champs de la réflexion par la présentation de textes critiques sur l’affaire et son environnement sociétal.
Clés pour le procès Dutroux, Nihoul, Martin, Lelièvre • Aide-mémoire et réflexions citoyennes • Observatoire citoyen • Ed. Couleur livres - Prix public : 10 EUR – Prix En marche : 9 EUR
Le Dossier Dutroux en 8 questions
Cet autre ouvrage du journaliste René-Philippe Dawant explique pourquoi et comment un fait divers dramatique s’est transformé en un phénomène de société sans équivalent dans l’histoire de notre pays. Il ouvre une réflexion sur le rôle et la place de la justice, du politique et de la presse. En 8 questions, ce livre de petit format propose également de comprendre et de tenter de se faire une idée plus précise des difficultés auxquelles vont être confrontées les jurés lors du procès d’assises.
Le Dossier Dutroux en 8 questions • René-Philippe Dawant • Ed. Luc Pire - Prix public : 5 EUR – Prix En Marche : 4,50 EUR
La face cachée de l’enquête Dutroux & consorts
Depuis 8 ans, les journalistes Michel Bouffioux et Marie-Jeanne Van Heeswyck suivent l’évolution des enquêtes sur l’affaire Dutroux. La première partie du livre est consacrée au passé, aux occasions manquées : Quels sont les renseignements et les moyens d’action dont disposait la justice après les premiers enlèvements de 1995 ? Comment ont-ils été à ce point galvaudés qu’il convient de parler de non-assistance à enfants en danger de mort ? La seconde partie relate les 25 premiers jours de l’enquête de Neuchâteau : la grande majorité des faits qui seront exposés à Arlon ont été découverts sous l’ère du juge Connerotte lors des premiers mois d’instruction. Les premiers aveux des accusés ont également été porteurs de questions quant à la nature de l’association de malfaiteurs qui enlevait des enfants. Aujourd’hui, on ne sait toujours pas ce qui s’est réellement passé. Ce récit chronologique décode les différents enjeux du dossier, ce que l’on sait et ce que l’on ne sait toujours pas après 7 années d’instruction.
La face cachée de l’enquête Dutroux & consorts • Michel Bouffioux et Marie-Jeanne Van Heeswyck • Ed. Couleur livres SB
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..4 Utilisation des médias par les intellectuels
Prendre l'initiative et soigner par les médias
Jean-Yves Hayez, pédo-psychiatre et coordonnateur de l'équipeSOS Enfants-Famille des Cliniques Univer-sitaires Saint-Luc a lui aussiété abondamment sollicité par les médias. Entretenanthabituellement des rapports peu fréquents avec la presse (<<quandon veut publier tous les 15 mois une carte blanche sur une question de santépublique, il faut lobbyer à plusieurs>>, regrette-t-il...),il vient d'être propulsé sur l'avant-scène médiatique.
Cette soudaine entrée dans la cour très fermée desexperts largement médiatisés le laisse un peu sceptique. <<Jesuis en Belgique francophone un des meilleurs spécialistes du domainede l'enfance et, en tout cas, le pédopsychiatre universitaire senior>>,explique-t-il. <<Mais je ne pense pas que c'est pour ma seule valeurque les journalistes soient venus me chercher. Lorsque l'affaire a éclaté,mes collègues de l'ULB étaient en vacances à l'étranger.J'étais également en congé, mais en Belgique. Accessibledonc. Je crois d'ailleurs que la politisation étant ce qu'elle est,à la RTBF notamment, les choses vont se rétablir bien viteet que l'on verra d'autres têtes...>>
La presse convoquée
Il n'empêche, le Docteur Hayez a profité des multiples occasionsqui lui étaient offertes pour imposer son discours aux médias.Imposer, tel est bien le terme puisqu'il estime aujourd'hui que prèsde la moitié de ses récentes interventions relèventde sa propre initiative et non de sollicitations journalistiques. <<J'aiéprouvé le besoin d'organiser un peu plus les choses, notammentavec la RTBF>>, explique-t-il. <<Lorsque mes collèguessont rentrés de vacances, je leur ai proposé de faire un petitcomité scientifique de crise. Les quatre principaux pédopsychiatresuniversitaires de francophonie ont accepté et nous nous sommes ainsiréunis quelques fois. Lors d'une de ces réunions, vers le26 ou 27 août, nous avons évoqué la question des toutpetits enfants. C'est un problème qui me tracassait et j'ai doncdemandé à pouvoir donner au JT un message à ce propos.Cela m'a été accordé dans les deux jours qui ont suivi,j'ai été invité au 19 heures 30 de Fabienne Vande Meersche.>>
De la même manière que la presse écrite a intégralementreproduit sa <<Lettre ouverte aux adultes qui abusent sexuellementde mineurs d'âge>>, la télévision semble avoiraccordé à Jean-Yves Hayez non seulement un espace élargimais encore son entière maîtrise. A plusieurs reprises, onl'a ainsi vu intervenir en face caméra durant de très longuesminutes, sans que l'interviewer qu'il feignait d'ignorer ne vienne interrompreses propos.
<<En presse écrite, explique-t-il, à part quelques articlesmineurs, j'ai demandé à tout relire avant la parution. Celame semblait indispensable pour les articles de fond, ceux que j'avais voulu,celui du Ligueur sur l'angoisse par exemple. En télévision,j'ai mis certaines conditions. Lorsque j'ai été invitépar la RTBF Liège pour Fait Divers, j'avais prévenule journaliste que j'y allais à condition que l'on me laisse parlerdirectement aux enfants abusés. C'est ce dont j'avais envie. Il avaitaccepté mais j'ai cru, à la manière dont se déroulaitle débat, qu'il ne tiendrait pas sa parole. Je l'ai donc dribbléau détour d'une question et j'ai, là aussi, fait un messagede 5 ou 6 minutes. Il n'était pas très content mais je n'aipas été interrompu et rien de ce que j'ai dit n'a étécoupé au montage...>>
A l'inverse de ce que ressentent parfois les experts médiatiséset de ses propres expériences antérieures, Jean-Yves Hayezn'a donc pas eu l'impression de devoir se soumettre ici au carcan médiatique.Il a pu développer largement une argumentation aux formes de laquelleles journalistes se sont adaptés et, précise-t-il, <<lorsque,à la mi-septembre, j'ai convoqué Martine Vandemeulebroucke[Le Soir] et Laurence Bertels [La Libre Belgique], elles sontvenues>>...
Petits rubans noirs
Tout comme Claude Javeau, Jean-Yves Hayez évoque l'impossibilitépour l'expert de se dégager totalement de l'émotion qui submergeaitle pays. <<Je ne crois pas que l'on puisse se mettre en position d'observationsans être impliqué d'une manière ou d'une autre>>,explique-t-il. <<Ma technique consiste à l'assumer plutôtqu'à le nier>>. Mais il va plus loin. <<Si j'ai prisla parole, si je suis entré dans la mêlée, c'étaitaussi une manière pour moi de vivre mes émotions. J'ai étéatteint de la même névrose traumatique que tout le monde. C'étaitdonc une manière de soulager ma détresse, comme d'autres ontmis des petits rubans noirs à leur voiture ou envoyé des fleursaux parents. Dans Bla-Bla, cette séance de thérapiecollective que j'ai voulue avec la RTBF, il est tout à fait clairque je me soignais comme je soignais les enfants>>. Une thérapiemédiatisée inédite dans l'expérience du DocteurHayez. <<Mais dans les moments de souffrance collective, il faut apporterdes réponses collectives>>, estime-t-il. <<Dans chacunede mes interventions, je ne pense jamais avoir oublié ma fonctionsoignante.>>
5. colette sacrifiée à la raison d'etat (déplacement forcé d'une fillette aux USA)
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2004 gestion de la matraitance en belgique ( LLPF 134/avril 2004)
LA SOCIÉTÉ ET LES INSTITUTIONS BELGES FACE À LA MALTRAITANCE
Jean-Yves HAYEZ
- La société civile belge s’occupe officiellement des phénomènes de maltraitance depuis 1975, avec une réelle générosité d’intention mais, à mon sens, avec les mêmes erreurs dramatiques que celles commises dans les autres pays. Côté prévention – primaire et secondaire –, la Belgique s’est efforcée d’améliorer les connaissances du public et des professionnels sur le phénomène de la maltraitance et sur ses signes cliniques, dans la perspective d’un meilleur repérage. Elle a multiplié les campagnes pour sensibiliser les enfants sur leurs droits à se faire respecter et sur leur intérêt à s’ouvrir de leurs malheurs à une personne de confiance. Elle a néanmoins raté trois dimensions clés :
- encourager les enfants à contribuer eux-mêmes à leur propre protection ; les y entraîner ; leur signaler que se faire respecter est non seulement un droit, mais aussi un devoir, et leur en proposer les moyens ;
- encourager les forces saines du tissu social de proximité (y compris les professionnels de première ligne) à participer activement à la protection de l’enfant (et, le cas échéant, au mieux-être de la famille maltraitante) ; lui indiquer le rôle primordial de son engagement et de sa solidarité ;
- aider les agents directs de maltraitance, dès les premiers moments de dérapage, en parlant publiquement de la maltraitance comme d’un phénomène inhérent à la nature humaine et en leur offrant des lieux d’écoute et de soins où la confidentialité serait totalement garantie.
- Plutôt que de viser à intensifier cette efficacité de la première ligne, la Belgique a mis en place un nombre insuffisant d’équipes d’intervention psychosociales très spécialisées, de troisième ligne, les équipes « SOS-Enfants », qui travaillent ambulatoirement et moins souvent en milieu hospitalier. Et elle a misé sur la séquence « sensibilisation au repérage --> révélation en un lieu officiel --> protection et aide efficaces émanant d’institutions spécialisées ».
- Or c’est loin d’être aussi fonctionnel que prévu. En effet, que se passe-t-il sur le terrain belge ? 25 % environ des cas révélés, toutes maltraitances confondues, commencent à être traités exclusivement dans des centres psychosociaux de troisième ligne (essentiellement les équipes SOS-Enfants précitées et les centres de santé mentale) : ce sont les cas où l’on prévoit une bonne collaboration des principaux protagonistes de la problématique(1). Au fil du temps, beaucoup d’intervenants de ces centres ont acquis de la compétence : les enfants victimes sont invités à des thérapies, le plus souvent individuelles et d’inspiration psychodynamique, mais sans violence institutionnelle qui soit exercée sur eux pour les obliger à s’engager. Des entretiens familiaux s’y ajoutent régulièrement, avec une gradation prudente de la convocation des membres de la famille invités à chaque séance [2]. Des interventions sociales ou scolaires les complètent si nécessaire.
Si, dans ces 25 %, on prend au hasard cent situations, on constate que quarante à cinquante s’améliorent de façon raisonnablement satisfaisante grâce à ce seul travail à l’amiable (au minimum, bonne protection de l’enfant contre les récidives). Cinq à dix cas supplémentaires y parviendront encore lorsqu’on y ajoute le cadre ferme d’une agence sociale d’État spécifique, le service d’aide à la jeunesse : celui-ci use de sa seule autorité morale ou de subtils pouvoirs de pression (menace de judiciarisation) pour mettre en route une certaine mobilisation. Dans environ vingt des cas restants, on fait appel à l’institution judiciaire dans un troisième temps, si les choses s’enlisent (destin ultérieur ? cf. infra). Enfin, pour les vingt à trente derniers cas, c’est l’échec pur et dur, avoué comme tel ou masqué par de lénifiantes politiques de l’autruche circonstancielles. - 75 % environ des cas révélés prennent tout de suite ou rapidement le chemin de l’institution judiciaire(2). Il se passe alors grosso modo la même chose en Belgique qu’en France :
- une prise en charge psychosociale conjointe du problème n’a pas lieu ou se déroule de façon largement clivée du travail de la Justice. C’est le cas notamment pour tout ce qui concerne la prise en charge de l’agent direct de maltraitance et la redéfinition de sa place dans la famille(3) (notamment, pour ce qu’il en est de ses contacts avec l’enfant-victime) ;
- les procédures de l’instruction judiciaire restent souvent trop lentes et passablement traumatiques. Cette lenteur a des effets particulièrement catastrophiques lorsque ce sont des tout-petits qui sont concernés(4) ;
- la majorité des intervenants, tant les experts psychosociaux que les magistrats, sont très loin de se référer à des méthodes de recueil et d’analyse du discours de l’enfant qui soient validées, comme c’est le cas pour la méthode québécoise SVA [1]. La formation spécialisée dans le champ du diagnostic (et du traitement) de la maltraitance est encore très lacunaire !
- qu’est-ce qui en résulte ? La probabilité d’une sanction judiciaire n’est élevée que lorsque existent des informations complémentaires à la seule parole de l’enfant : preuves matérielles, présence de témoins fiables, aveux de l’agent maltraitant qui aurait fini par « craquer » ;
- lorsqu’on n’a comme matériel que la parole de l’enfant – ce qui se produit dans la majorité des cas ! –, beaucoup trop peu de tribunaux prennent la responsabilité d’y croire, et ceci même lorsqu’elle est bien validée. Bien plus souvent, les magistrats s’abritent derrière la valeur refuge de présomption d’innocence utilisée à bon et à mauvais escient, et qui devient alors une manière de protéger l’ordre adulte contre des velléités de déstabilisation induites par les dires de l’enfant. Dans le cadre des allégations liées à la séparation parentale en particulier, le parent qui dénonce est bien souvent regardé de façon négative, parfois à l’encontre de fortes probabilités. On oblige l’enfant, parfois violemment, à rester en contact avec le parent suspect. Les tribunaux pour mineurs ne sont pas assez souvent appelés à la rescousse pour exercer leur fonction de protection.
- Or c’est loin d’être aussi fonctionnel que prévu. En effet, que se passe-t-il sur le terrain belge ? 25 % environ des cas révélés, toutes maltraitances confondues, commencent à être traités exclusivement dans des centres psychosociaux de troisième ligne (essentiellement les équipes SOS-Enfants précitées et les centres de santé mentale) : ce sont les cas où l’on prévoit une bonne collaboration des principaux protagonistes de la problématique(1). Au fil du temps, beaucoup d’intervenants de ces centres ont acquis de la compétence : les enfants victimes sont invités à des thérapies, le plus souvent individuelles et d’inspiration psychodynamique, mais sans violence institutionnelle qui soit exercée sur eux pour les obliger à s’engager. Des entretiens familiaux s’y ajoutent régulièrement, avec une gradation prudente de la convocation des membres de la famille invités à chaque séance [2]. Des interventions sociales ou scolaires les complètent si nécessaire.
Cette analyse n’est malheureusement pas réjouissante, mais elle est réaliste. Comme l’espace me manque pour bien développer ma pensée dans le cadre de ce bref article, je vous propose d’en prendre connaissance de façon plus approfondie dans les textes, articles ou documents vidéos suivants :
[1] HAYEZ (J-Y.), BECKER (E. de), L’enfant victime d’abus sexuel et sa famille : évaluation et traitement, PUF (Coll. Monographies de la psychiatrie de l’enfant), Paris, 1997.
[2] HAYEZ (J-Y.), La sexualité des enfants, Paris, O. Jacob, 2004.
[3] HAYEZ (J-Y.), BECKER (E. de), Perspective systémique et travail familial ou de couple dans la prise en charge des auteurs d’agression sexuelle, 237-254, in Psychopathologie et traitements actuels des auteurs d’agression sexuelle, Conférence de consensus Fédération française de psychiatrie, 2001.
[4] HAYEZ (J-Y.) (sous la dir.), Le traitement pluridisciplinaire de l’enfant maltraité et de sa famille, K7 ou DVD, Editions Anthéa, 2002.
(1) Familles maltraitantes « réceptives » et aussi enfants et familles victimes d’agresseurs externes [1].
(2) Auxquelles s’ajoutent les 5 % d’arrivées tardives mentionnées ci-dessus Justice !
(3) S’il s’agit de maltraitance intra-familiale.
(4)Pour eux, au moins, on devrait instituer une justice aussi rapide que celle des « flagrants délits ».
2004 regards sur l'adoption (interview libre belgique)
Certains objectent que ce qui se passe effectivement aujourd'hui, c'est que des couples homosexuels adoptent ou font des enfants...
Exact. Mais ce n'est pas parce que la situation de fait existe qu'il faut obligatoirement adopter une loi pour la légitimer a posteriori. Ce sont les situations de fait qu'il faudrait peut-être limiter. Tout choix de vie comporte des droits et devoirs. Le choix de vie homosexuel ne permet pas d'accueillir des enfants avec les mêmes possibilités d'épanouissement qu'un couple hétérosexuel.
Pour certains, une loi viserait aussi à mettre un terme à une forme de discrimination en matière d'adoption...
Je ne suis pas d'accord. La discrimination consiste à ne pas reconnaître la qualité d'humain aux gens. Limiter l'attribution de certains droits parce que tout n'est pas toujours possible, ce n'est pas de la discrimination. Soyons clairs: je ne pense pas que l'homoparentalité soit la pire des situations au monde, mais je dis qu'il s'agit d'une situation à risques. Ainsi, je ne suis pas opposé à l'adoption par un homosexuel des enfants de son partenaire issus d'une union hétérosexuelle précédente. Je n'y vois aucun problème, le père et la mère sont ou ont été présents dans le vécu de l'enfant.
Où je mets un clignotant orange, c'est lorsqu'il s'agit d'activités qui permettent de satisfaire l'envie de parentalité des couples homosexuels
compter rendu en tchèque!
Další expert Jean-Yves Hayez však míní, že homosexuální pár nemůže potomku poskytnout "sexuální jistotu". "Chlapec vychovávaný dvěma ženami sice bude do pěti let nejšťastnější z dětí, ale pak se začne vyptávat na své místo v sexuálním rámci.
Povede to k úzkosti, pocitu nejistoty, poruchám v chování. Děvčátko vychovávané dvěma ženami zase brzy může podlehnout pocitu nadřazenosti. Nemyslím si, že rodičovství homosexuálů by bylo nejhorší na světě, ale jde o riskantní situaci," varoval v témže listu. U výchovy dětí prý není na místě hovořit o diskriminaci. "Každá životní volba se skládá z práv a povinností. Výběr homosexuálního života neumožňuje osvojovat si děti stejně jako v případě heterosexuálních párů."
Zdroj: ČTK
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2004 Expulsion de roms (la DH)
Rester des gens du voyage»
(09/12/2004)
GHLIN Les 59 occupants du terrain des Hirondelles à Ghlin se souviendront encore longtemps des perquisitions qui ont été menées chez eux, le 21 octobre dernier. Aujourd'hui, ils clament leur souhait de continuer à vivre leur spécificité culturelle. Or, la ville les oblige à quitter les lieux pour fin mars. Une des solutions proposées par celle-ci serait de les loger dans des habitations sociales.
Les gens du voyage ne se voient, pourtant, pas vivre autrement. «Nous sommes une grande famille. Il est vrai que nous sommes peut-être perçus comme des sédentaires puisque nous sommes domiciliés ici. Si c'est le cas, c'est notamment à cause de l'obligation scolaire. Mais, venez ici en été, nous partons tous sur les routes», s'exclame Sylvie Robbe, une habitante du quartier.
Hier, les occupants du terrain des Hirondelles ont convié les journalistes. L'occasion pour tous de découvrir un lieu, à l'égard duquel, il faut bien l'avouer, beaucoup jetaient un regard aveuglé par des idées préconçues. Les organisateurs de la conférence avaient aussi rassemblé des orateurs divers. Chacun d'eux a exprimé, à sa manière, sa façon de cerner la problématique.
Par exemple, pour le psychiatre, Jean-Yves Hayez, il n'y a pas de doute: les enfants du campement ont été traumatisés d'avoir vécu de telles perquisitions. «Voir que la police, celle qu'ils s'imaginent pour les grands bandits, débarque de cette manière chez eux laisse, inévitablement, des traces.»
Et l'abbé, Philippe Masson, d'enchaîner: «Quand on vit avec eux, on découvre leur spécificité. Il est important de les respecter à travers celle-ci. Les problèmes qui pourraient être rencontrés ici sont aussi réels dans des cités. En forçant ces gens à habiter dans des maisons sociales, on casserait leur tissu.»
Quant au représentant de la Ligue des droits de l'homme, Jean- Maurice Arnould, il dénonce des attitudes discriminatoires. Il estime que des aménagements pourraient être effectués. «La ville pourrait peut-être recevoir des subsides pour de tels aménagements, et ce, d'après les recommandations du Conseil de l'Europe relatives aux gens du voyage.»
Johanne Tinck
© La Dernière Heure 2004 et aussi le soir 2004
« Nous voulons vivre en caravane »
L a Ligue des droits de l'homme, Picardie Laïque, le Théâtre des Rues, l'école Alpha, Vivre Ensemble, le MOC, le Relais, le Service d'aide aux personnes déplacées : de nombreuses associations de la région de Mons, soutenues par des personnalités comme le pédopsychiatre de l'UCL Jean-Yves Hayez, membre de l'Observatoire citoyen des droits de l'Enfant, et l'abbé Philippe Masson, responsable wallon de la pastorale des gens du voyage, sont montées au créneau ce mercredi pour défendre les droits des habitants du camp des Hirondelles à Ghlin. D'une part, elles fustigent les amalgames faits depuis la descente de police du 21 octobre, suivie de la décision de la Ville de Mons de vider le site pour le dépolluer en relogeant les familles dans des habitations sociales. D'autre part, elles s'élèvent contre les dérives qui ont émaillé le dossier. Les familles ont été marquées par la violence morale et le sentiment d'injustice, commente le président du Centre d'action laïque de la région, Jacques Demoulin. Nous souhaitons faire nôtre l'affirmation de la Ville : pas un mètre carré de non-droit à Mons, mais ce refus du non-droit doit être total et ne pas jeter des personnes dans la discrimination en raison de leur mode de vie. Jean-Maurice Arnould va plus loin : Si un crime était commis dans mon quartier au centre-ville, imaginerait-on que l'ensemble du quartier puisse être évacué à 5 h du matin ? Il est important de faire appel à tous les responsables politiques démocrates pour que de telles voies de fait ne se réitèrent pas ! Au nom des gens habitant le terrain des Hirondelles, Sylvie Robbe a rappelé que la plupart des 23 familles étaient montoises depuis plus d'un siècle, installées sur ce site de Ghlin depuis la fin des années 80, avec la promesse faite par la Ville d'installer des sanitaires ou encore une zone de travail. La zone de travail qui n'a jamais été aménagée est probablement polluée. Nous souhaitons que le terrain soit assaini, sans pour autant renoncer à nos habitations et à nos modes de vie. Nous voulons vivre en caravane. Pour l'abbé Masson, si on disperse les familles dans des logements sociaux, on casse leur tissu social et culturel. Les familles de Ghlin doivent être reconnues comme faisant partie d'une minorité culturelle et respectées dans leur mode d'existence. Le docteur Hayez estime que, si les adultes ont vécu l'intervention musclée de la police comme une injustice, ce sentiment a été d'autant plus fort chez les enfants. C'est une expérience bien angoissante : des inconnus qui entrent sans prévenir dans leur territoire familial. Et puis il y a cette inévitable stigmatisation par les copains d'école... CLAIRE BORTOLIN - Le Soir du 09.12.2004, 06:00 |
2005
1 Les enfants et le traumatisme dutroux
Infos | Alexandra retrouvée chez un ami de la famille
3 mai 2003
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Dénouement heureux, mais les circonstances de la 3e fugue de cette fillette de 9 ans sont nébuleuses
Immédiatement, un profond soulagement a gagné l´ensemble des personnes inquiètes de la disparition d´Alexandra Cuvelier: la Bruxelloise, âgée de 9 ans, a été retrouvée saine et sauve, vendredi vers 6 heures, dans l´appartement d´un ami de la famille, à Anderlecht. Cela étant, si le dénouement est heureux, les conditions de sa disparition et de son hébergement restent floues.
Lundi, entre 20 et 21 heures, la fillette avait quitté son domicile de l´avenue de la Chevalerie, à Bruxelles, profitant de l´inattention de sa mère et de sa sœur aînée, avec qui elle vit depuis la séparation de ses parents. Une habitude, puisque depuis ses 6 ans, cette sortie en douce constitue déjà sa 3e fugue. Mais, jusqu´à présent, elle avait toujours été retrouvée dans les heures qui avaient suivi.
Cette fois, pourtant, Alexandra n´était ni chez sa tante, ni chez son père, comme les autres fois. « L´affaire a d´abord été traitée comme une fugue inquiétante », indique Christine Larcin, substitut du procureur du Roi de Bruxelles. « Mais, au cours de l´enquête, de nouveaux éléments nous ont amenés à la définir comme une disparition inquiétante. » Ces derniers jours, plusieurs témoins ont rapporté l´avoir aperçue près de Tervuren. Les recherches des enquêteurs n´avaient toutefois pas été probantes.
Jusqu´à vendredi du moins et, selon certaines sources, un coup de fil de la concierge de cet immeuble appartenant à la commune d´Anderlecht, qui met des logements à disposition de certains précarisés. C´est dans l´un de ces 88 appartements, au no 20 de la rue de la Poterie, à deux pas du boulevard du Midi, qu´Alexandra Cuvelier a été retrouvée. L´homme chez qui elle était l´a-t-elle séquestrée et violentée? Pour ne pas nuire à l´enquête, les autorités ne le disent pas.
De toute façon, l´article 428 du code pénal indique que, dès lors qu´il s´agit d´un mineur de moins de 12 ans, l´adulte impliqué dans une telle disparition peut être poursuivi pour enlèvement et risque une peine allant de 5 à 10 ans de réclusion. Même si l´enfant était volontairement avec cet adulte. En l´occurrence, l´Anderlechtois interpellé hier, mais dont le parquet refuse de confirmer la mise sous mandat d´arrêt.
Vendredi soir, d´autres personnes étaient encore interrogées par le juge d´instruction Jean-Claude Van Espen. « Elles nous permettront certainement, dans les prochains jours, de découvrir toute la vérité. » L´enquête est donc toujours en cours.
En attendant, Alexandra n´est pas rentrée chez elle. Elle a été prise en charge par des services spécialisés et est hébergée en lieu sûr, a ajouté Roland Vanreusel, chef de corps de la police de Bruxelle-Capitale-Ixelles. Celui-ci a également expliqué que si Child Focus n´avait été averti que mardi soir, comme Jean-Denis Lejeune l´a amèrement regretté, c´est parce que la police attendait une photo que la mère avait promis de lui amener. Mais elle est restée introuvable, elle aussi, mardi après-midi. TH.R.
L´AVIS D´UN PÉDOPSYCHIATRE
Comment réagir face à une menace de fugue?
La disparition d´Alexandra a mis la Belgique en émoi. « En raison de l´affaire Dutroux, cet événement bouleversant a créé chez nous une peur exagérée. Il faut rappeler qu´il est extrêmement rare qu´un enfant de cet âge passe plusieurs nuits dehors. Les vraies fugues où l´enfant découche commencent en général vers 13 ans et demi ou 14 ans, lorsque le jeune veut se prouver sa propre audace », estime le professeur Jean-Yves Hayez, pédopsychiatre à la clinique Saint-Luc.
Les enfants fuguent la plupart du temps parce qu´ils veulent fuir quelque chose mais parfois aussi parce qu´ils sont attirés par quelque chose.
« Les jeunes fugueurs fuient des parents qu´ils jugent trop sévères, un milieu trop glacial ou la réaction négative de leurs parents après un mauvais bulletin ou une grosse bêtise. Certains partent pour attirer l´attention sur eux, pour faire du chantage. Certains jeunes quittent leur famille parce qu´ils croient trouver ailleurs le paradis avec plus d´amour, plus de liberté », explique le Pr Hayez.
Il arrive assez souvent que les enfants menacent leurs parents de partir lors d´un conflit. Même si très peu d´enfants passent réellement à l´acte, comment réagir face à cette menace de quitter le foyer familial?
Du chantage
« À un extrême, on a des gosses qui n´arrêtent pas de faire du chantage. Ce sont de véritables petits maîtres. Les parents ne doivent pas rentrer dans leur jeu. Le mieux est de rester indifférent. Il ne faut pas ni courir derrière le gamin avec angoisse, ni lui dire de faire sa valise et de ficher le camp. Mais les parents doivent aussi se demander pour quelle raison leur enfant fonctionne sur le mode du chantage. À l´autre extrême, si un gosse habituellement sage s´en va ne fût-ce que pendant 2-3 heures, cela vaut vraiment la peine de lui courir derrière pour leur montrer qu´on les aime et se soucie d´eux », souligne le Pr Hayez. E.MA.
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