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Chapitre I : Définir la sexualité 

La sexualité est un dynamisme interne, une force d’union qui opère dans la globalité de notre être ( corporel, intra psychique, social ) ; d’abord pulsion, elle se déploie chez une très grande majorité d’individus en désirs, fantasmes, projets et activités.

 

 

 

Elle vise essentiellement à la reproduction de l’espèce, c’est à dire à la transmission et à et à la lente évolution du génome, dans sa dimension davantage spirituelle, elle vise aussi à la création de liens affectifs positifs de différents ordres ; sa pratique entraîne un plaisir corporel qui devient, pour un grand nombre, une troisième visée autonome ou jointe aux précédentes.

 

I. La reproduction de l’espèce, en ce inclus l’élevage des petits

 

On ne rencontre évidemment pas cette première finalité dans la sexualité des enfants ni des jeunes adolescents. Tout au plus peut-on supposer qu’ils s’y préparent de loin (?) via connaissances et familiarisation avec le corps sexuel de soi et de l’autre sexe.

Quant aux adolescents plus âgés et aux adultes, la grande majorité d’entre eux adhère tôt ou tard au projet de se donner une descendance et ceci, non plus en fonction d’un instinct, mais dans le cadre d’un projet humain réfléchi ( parentalité responsable ) : nous y reviendrons dans le deuxième article. 

II. La création de liens affectifs positifs

 

Une autre finalité de la sexualité réside dans la réalisation d’une union affective positive avec l’autre ou avec soi-même. Ceci peut déjà se passer lors des activités sexuelles physiques : quand partenaire il y a, celui-ci représente souvent davantage qu’une source de plaisir physique : chacun vit de la réciprocité dans l’échange du plaisir ; le partenaire est un camarade, un ami et finalement celui ou celle que l’on aime d’amour. 

Mais l’énergie sexuelle est également apte à se sublimer, c’est-à-dire à se détacher de l’activité sexuelle physique et à se transformer en sentiments, en projets et en actes affectifs positifs de tous ordres, depuis la tendresse jusqu’au dévouement. Cette capacité et cette richesse affectives se manifestent très précocement dans la vie de l’enfant, qui montre à l’envi son désir d’aimer et d’être aimé.

 

 

Qu’est ce que la sublimation, au sens psychanalytique du terme ? Julien ( neuf  ans ) aime beaucoup sa maman. Pour la fête des mères il lui dessine une machine ( d’allure à peine phallique …) qui transforme toute son énergie et la lui donne pour qu’elle soit heureuse. 

Et il y a aussi l’union positive à soi-même, vers qui se dirige une partie de l’énergie sexuelle. Grâce à quoi, dès son tout jeune âge, l’enfant peut apprécier son corps de fille ou de garçon, veiller sur lui, le prendre en charge personnellement en étant sa propre « bonne mère »,  lui procurer un bien-être et des plaisirs physiques de tous ordres.

Il peut aussi apprécier son être, avoir de la tendresse, de l’estime et de la fierté à propos de soi.

 

III. La recherche du plaisir érotique 

 

La recherche du plaisir érotique est une finalité non plus de la sexualité, mais poursuivie via l’exercice de la sexualité. Les êtres humains ont une appétence plus ou moins intense pour le plaisir et donc entre autres, pour le plaisir érotique. Ils ont vite appris à dissocier la recherche du plaisir des finalités naturelles de la sexualité et à s’y adonner pour lui-même, parfois de façon intensive.

Il arrive même au sujet humain de rechercher le plaisir contre une finalité naturelle : alors, son partenaire ne fait plus le poids, puisque l’on va parfois jusqu’à nuire à sa personne pour trouver davantage de plaisir … ou c’est soi-même qu’on malmène, parfois au-delà de l’entendement.

 

 

CHAPITRE II - Sexualité, liberté et contrainte

 1. Définitions 

A.  La sexualité que nous voulons

 

 Nombre de nos activités sexuelles sont voulues par nous, à tous les âges de la vie. C’est ce que j’appelle la sexualité « consentie, voulue, agie ou désirée (2) », qui constitue un des pôles de tout ce qui est possible.

Et déjà à son propos, il ne faut pas simplifier : le seul critère qui définit ce pôle, c’est que personne, de l’extérieur, de façon immédiate ou différée, n’a fait pression sur l’auteur de l’acte pour qu’il produise celui-ci. 

On constate alors qu’une bonne partie de ces actes consentis témoigne de la bonne évolution psychoaffective de l’enfant. Ce sont des activités que j’appellerai par la suite « normo-développementales » D’autres au contraire témoignent d’une évolution préoccupante, voire franchement pathologique de la personnalité, transitoire ou non : par exemple des activités perverses, des abus commis sur autrui, une vie sexuelle gourmande qui s’exprimerait sans la moindre retenue … 

Quelques activités préoccupantes semblent ne se commettre qu’une fois ou l’autre, isolément, chez une personne  - adulte ou enfant - qui retrouvera bien vite sa bonne conduite coutumière : C’est ce que j’appelle des dérapages ; ils seront étudiés au second paragraphe du présent chapitre, les fois où ils conduisent à abuser d’autrui. 

 

Par ailleurs, si l’on considère le degré de préparation intérieure de ces actes commis sans pression externe, on constate qu’ils se répartissent sur une courbe de Gauss : A un extrême, la préparation est excessivement longue, sorte de rumination qui aboutit alors souvent à un acte posé avec beaucoup d’angoisse et de culpabilité. 

Au centre la séquence préparation => réalisation apparaît comme raisonnable aux observateurs externes. 

A l’autre extrême, il s’agit d’actes impulsifs : 

- soit par manque de socialisation, par prépondérance de « besoin de plaisir immédiat » chez la personne ( Cfr l’alinéa consacré à la sexualité sans retenue ) ; 

- soit au terme d’une pression et d’une lutte intense qui finissent par échouer : l’enfant décharge alors plus ou moins brutalement ses pulsions sexuelles, tout en n’étant pas fier de ce qu’il fait : j’en reparlerai à propos de la sexualité effectuée sous l’égide de l’angoisse et de la culpabilité.

 

Enfin, le fait que l’acte commis ait été voulu par l’enfant, n’exclut pas que, par la suite, parfois, il puisse avoir peur de ce qu’il a osé faire ou s’en sentir coupable. Il peut aussi regretter d’avoir perdu son enfance, son innocence, et vouloir revenir en arrière. En référence à quoi, il lui arrive de se dénoncer et même alors d’accuser son ex-partenaire de l’y avoir entraîné. 

Cette accusation fallacieuse, il lui arrive d’y procéder aussi s’il est simplement attrapé et accusé après coup : alors, pour ne pas être punis, certains jouent sur certains paramètres de leur statut – ils sont les cadets, par exemple – et en profitent pour accuser l'autre. 

 B.La sexualité que nous subissons


A l’opposé de la sexualité consentie, je parle de sexualité « subie ou contrainte » chaque fois que c’est sous la pression d’un tiers que l’enfant exécute une activité sexuelle que, fondamentalement, il ne veut pas.

Il existe cependant un gradient de gravité quant à ces activités subies. Il est bon de se le rappeler car nos sociétés ont trop tendance à tout mettre dans le même sac : 

----- A l’extrême favorable du gradient on a à faire à des « épines sexuelles ». Elles sont communes. Le pourcentage de mineurs qui s’y est frotté l’une ou l’autre fois dans sa vie d’enfant ou d’adolescent est difficile à affirmer avec certitude, mais il ne m’étonnerait pas qu’il dépasse 50 % de la population : la normalité statistique, en quelque sorte.

 

« l’enfant à l’épine »

 

---- A l’autre extrême, ce sont les abus les plus graves, les plus vicieux, les plus blessants. Épines et abus graves seront décrits dans la troisième partie. A chacun d’imaginer ce que peuvent être les actes de gravité intermédiaires. 

 C. Et l’entre-deux

 

Rien n’est cependant simple. Pour un certain nombre d’activités sexuelles, il est malaisé, sinon impossible, de déterminer s’il s’agissait d’activités consenties ou contraintes. On est véritablement et parfois définitivement « entre les deux ».

 ---- C’est le cas par exemple lorsque l’enfant sollicité est ambivalent à l’idée d’une activité sexuelle et donc, que sa réponse manque de clarté; Une dimension de lui a envie (3), et une autre en rejette l’idée ( par angoisse (4), par culpabilité, en référence à des valeurs, etc. …) Face à la sollicitation, cet enfant se montre hésitant, ambigu, incapable  de se prononcer de façon stable dans un sens ou l‘autre. Celui qui invite en profite pour insister : s’ils sont attrapés, ce dernier soulignera avec plus ou moins de bonne foi  le fait que l’invité ambivalent était d’accord et celui-ci prétendra qu’il ne l’était pas. Nous verrons néanmoins dans la partie consacrée à l’accompagnement, qu’il est possible alors d‘acter que nous nous trouvons dans une situation de doute sans que le dialogue ni l’action éducatifs ne soient paralysées pour autant. 

---- C’est encore le cas lorsqu’un enfant ou qu’un adolescent a dit clairement oui et puis que, en plein décours de l’activité sexuelle, il crie soudainement « Non, je ne veux plus »Une autre manière de gérer son ambivalence ! Pas facile du tout néanmoins - sinon pratiquement impossible - pour le partenaire en pleine excitation sexuelle de s’arrêter : on n’a pas toujours un seau de glace à sa disposition ! Je pense que si l’on était tout à fait certain du déroulement  des faits, de telles situations ne devraient pas être qualifiées en soi d’abus ( sous réserve de différences d’âges acceptables entre partenaires ) 

Il en va autrement si une personne change d’avis au fil du temps, et dit « Non » à un moment donné, suffisamment longtemps avant l’activité sexuelle suivante. Ici, on abuse d’elle si on ne tient pas compte de son refus nouveau.

----  Ce pourrait encore être le cas dans les situations que voici et qui ont lieu entre mineurs sans différence d’âge excessive (5): l’un d'eux a secrètement peur de l’autre(6), ou est habituellement très passif, et il ne laisse entrevoir en rien qu’il n‘est pas d‘accord : il se soumet, habituellement sans beaucoup de créativité participative. Entraîné par son excitation ou par son désir d‘aimer, l‘autre ne remarque pas cette réticence … s’ils sont attrapés, le premier en fera le plus souvent état, mais il n’avait rien énoncé !

 

 D. Situations d’appréciation délicate 

 

◊ - En voici au moins une : c'es tce que j'appelle les touchers exploratoires d'adolescents, faits très dlicatement sur le corps d'un enfant beaucoup plus jeune, sans vraiment d'activité érotique : Formellement parlant, ce sont des abus isolés, qui peuvent même parfois fort culpabiliser l'auteur, mais plus fondamentalement, il s'agit dans son chef d'angoisse, de curiosité et d'une première prise de contact avec le corps sexué de l'autre; la "victime " n'en n'est pas toujours consciente 'elle dort ou est observée à son insu ou très furtivement "touchée" Elle n'en ressent nul traumatisme, ce que l'auteur ne voudrait surtout pas. l'article ci-joint traite d'un cas à ce propos: Touchers exploratoires

 

◊ - En voici une autre:ce sont les amours, incluant des activités sexuelles, qui se vivent réciproquement entre de jeunes adolescents, pubères, n’ayant pas encore atteint l’âge de la majorité sexuelle légale dans leur pays, et des partenaires nettement plus âgés : grands adolescents ou adultes. Légalement parlant, ce sont des abus. Psychologiquement, ce peut être autre chose. Comme on ne prête qu'aux riches, il faut remarquer que les amours macronesques n'en sont pas vraiement pas très loin. emmanuel avait-il vraiement 16 ans, comme le veut la telling story offcielle, quand il a déclaré sa flamme à Brigitte qui a fondu de se savoir encore désiré par cet Apollon irrésistible

Extrait du film « For a lost soldier » (J. Kerbosch, 1992)… dans la confusion de la 2de guerre mondiale, deux êtres à la dérive se sont rencontrés et aimés

La société admet, avec un sourire entendu, qu’une fille de dix-huit ans se « mette » avec un amant de cinquante ans ….ou que l'ado Macron séduise Brigitte. Pourquoi les amours d’un(e) jeune de quatorze, quinze ans et d’un adulte de trente ans seraient-ils, ipso facto, eux, destructeurs ? Certes, il est bon que des points de repères et des limites existent dans des sociétés, pour maintenir l’ordre. Mais tous ceux et celles qui les transgressent ne sont pas de ce seul fait des démons, et il faut pouvoir fermer les yeux et entériner certains mystères réciproques des désirs humains.

 

◊ - En voici une autre : dans une institution, un préadolescent de douze ans, réputé caractériel -, est surpris se livrant à un jeu d’attouchements sexuels avec une autiste de onze ans, connue dans le groupe pour ses masturbations compulsives.  Macroscopiquement, il jure qu’il ne lui a pas fait violence, et d’un certain point de vue, c’est vrai. Mais, n’a-t-il pas « joué » sur la docilité passive de cette compagne de groupe qui aurait laissé faire beaucoup de chose ! Ou avait-elle vraiment envie et en a-t-il eu l’intuition ? 

Dans les deux parties qui suivent, je n’aurai pas l’occasion d’étudier en détails toutes les situations intermédiaires. Au lecteur donc de faire preuve de créativité pour les gérer.

 

 Chapitre 3. les dérapages sexuels

 

Dans le livre La sexualité des enfants[1], j’ai développé la notion de « dérapage sexuel ». En résumé :

L'adulte ou l’adolescent ici concerné a une sexualité sociable où, entre autres, il respecte habituellement les limites sexuelles intergénérationnelles .

Pourtant, il se dévoie (au sens le plus étymologique du terme et entraîne l'enfant dans une expérience sexuelle (ou quasi). Habituellement un seul enfant pour une seule fois ou un nombre très limité de fois. Il cède donc à une tentation transgénérationnelle, sous la pression d'un ensemble de facteurs. Parmi ceux-ci, il existe parfois un certain degré de provoca­tion émanant de l'enfant.

Ensuite, et cela s'avère définitoire de la notion de dérapage, l’auteur se reprend rapidement et spontanément. Après une ou quelques fois espacées sur un laps de temps court, il va mettre fin à sa divagation et ne récidivera plus jamais (ou, au pire, une ou deux fois, du même type, sur la durée d'une vie) C'est la peur d'avoir de sérieux ennuis, la voix de sa conscience ou parfois aussi la résistance et la désapprobation immédiates ou différées émanant de l'enfant qui le poussent à arrêter.

Dans les meilleurs cas, adulte et enfant en reparlent ensemble, le premier pour s'expliquer comme il le peut et présenter ses excuses. Dans les cas moins favorables, un silence plus ou moins gêné et définitif fait suite aux événements.

Plutôt rarement, les dérapages sont des accidents graves, sortes de collisions frontales, comme une violence ou une relation sexuelle complète apparemment consentie avec un enfant ou un ado jeune.

 

 

 

Extrait du film « Le souffle au cœur » (L. Malle, 1971) Après une soirée de 14 juillet bien arrosée, Lorenzo se retrouve au lit avec sa jolie maman. Le grand inceste, qui n’aura lieu qu’une fois. 

Il existe plus souvent des formes plus légères ou plus troubles de dérapages sexuels, comme quand un père commence par se lais­ser toucher au bain, s’y excite et finit par demander à sa fillette de huit ans de le masturber, en évitant qu’elle regarde son éjaculation … Ici, il a honte après deux ou trois fois et ne va pas plus loin. 

Comment faire face ? 

Dans la mesure où les fait sont connus, il faut distinguer les intérêts humains de l'enfant et ceux de l'adulte qui dérape. Si l’enfant ne se guérit pas tout seul de l'« allumage » précoce ou du traumatisme subi, il a droit aux soins nécessités par son état.  Nous n’en dirons pas plus dans ce texte qui s’intéresse essentiellement aux auteurs.

Comment traiter justement les adolescents ou les adultes auteurs d'un dérapage ? 

◊ - Désapprouver l'acte et rappeler la Loi : c’est une vraie faute qui été commise !

◊ - Comprendre les éventuels problèmes de la personne et les soigner.

◊ - L'encourager à utiliser ses ressources positives à l'avenir.

◊ - Veiller sur la non-récidive.

◊ - S'efforcer qu'existe un dialogue avec l'enfant entraîné dans le dérapage, sans faire pression sur celui-ci pour qu’il l’accepte Ce dialogue, s'il a lieu, doit aboutir à des excuses présentées et à des actes de réparation. 

◊ - Veiller à ce que l'adulte prenne en charge le dommage éventuel causé, notamment sur le plan financier causé.

◊ - Sur le plan de la mise en œuvre institutionnelle, il ne me sem­ble pas absolument nécessaire de déclencher des processus socio-judiciaires officiels très pesants là où il y a possibilité de dialogue, présence de bonne volonté et vigilance du tissu social informel. 

 

Mais il n’est pas rare que le dérapage reste secret, ou ne se révèle que très tardivement !Ce sont deux situations de ce type qui vont être évoquées ici. Elles émanent chaque fois de deux adolescents, qui, bien des années plus tard, se trouvent torturés par la culpabilité

 

[1] J.-Y. Hayez, "La sexualité des enfants» , Odile Jacob, 2004, pages 167-172.

 

 

 

Chapitre IV : Méditations sur un constat 

§ I. Premiers signes autour de quatre ans 

 

Dans nos sociétés occidentales, de la vie sexuelle commence à s’observer chez l’enfant autour de ses quatre ans. « Vie sexuelle » doit s’entendre au sens usuel du terme : intérêt pour les zones génitales du corps et comportements engageant sciemment celle-ci. 

Avant quatre ans, l’enfant peut déjà toucher son sexe à l’occasion, l’agripper  en cas de stress ou  désigner le sexe d’autrui, mais par hasard ou dans le décours d’une exploration générale des corps, sans intentionnalité plus ciblée.

Cette vie sexuelle visible s’accompagne probablement très rapidement d’activités mentales ( élaboration d’images, idées, questions, théories, projets … de nature sexuelle )

 

 

Plus l’enfant est jeune, plus il y mélange des activités d’autres parties du corps, en référence à des processus et avec des objectifs identiques : intérêt pour la miction, la défécation, l’anus, la bouche, voire d’autres zones inattendues auxquelles l’enfant attribue les mêmes pouvoirs qu’à ses organes génitaux. Au fur et à mesure qu’il vieillit, et pour peu qu’il soit en bonne santé mentale, l’enfant désinvestit largement ces zones connexes d’intérêt [8], pour s’adonner principalement à la vie sexuelle liée à la génitalité. Nous n’en dirons pas davantage sur ces compagnons archaïques et transitoires de la vie génitale. 

§ II. Pourquoi cet intérêt précoce et souvent soutenu ? 

 

Pourquoi des explorations sexuelles, voire des activités à connotation érotique commencent-elles si tôt et s’amplifient-elles chez beaucoup, le plus souvent à l’insu des adultes ? 

---- Le développement des organes et des fonctions du corps humain est habituellement très bien organisé et synchronisé.  Une extraordinaire « intelligence de la vie » l’a prévu ainsi : les fonctions semblent s’activer au moment où elles deviennent utiles à la progression de la vie de l’individu et à celle de l’espèce, c’est à dire sur le plan biologique, à la transmission à la génération suivante du génome dont nous sommes dépositaires.

 « Logiquement », il devrait en être ainsi, plus que jamais, pour l’appareil sexuel, situé au cœur de ce processus de transmission. Eh bien non ! Il existe un hiatus temporel assez incroyable : l’enfant peut découvrir ses organes génitaux, jouer avec voire les abîmer, ou plus fréquemment les habituer à des usages déviants par rapport à la logique de la vie ( la recherche voire le culte du plaisir ) Et il peut s’y exercer des années, avant qu’il n’ait la maturité physiologique pour procréer et encore davantage avant que sa culture d’appartenance ne l’y invite ou avant que son intelligence et ses valeurs ne lui conseillent de programmer ce qu’il considère constituer une parentalité responsable.

 ---- Pourquoi ? Un certain nombre de pédagogues affirment que c’est « pour se préparer » : en quelque sorte, roder ses organes génitaux et tâtonner dans les actes de rencontre de l’autre, jusqu’à trouver comment réussir « la totale ». Bah, cette hypothèse téléologique nous fait sourire : ce n’est pas si compliqué pour une femelle de se laisser pénétrer par un mâle, tout de même … et des centaines de jeux sexuels ou de masturbations préalables ne changent rien à l’angoisse de la première fois et aux maladresses qu’elle connote et qui, pour beaucoup, n’en font pas le meilleur souvenir du monde. 

---- Et s’il n’existait pas de réponse rationnelle à la question ? Nous décrirons bientôt une liste des facteurs biologiques, intra psychiques et externes qui contribuent à l’éveil de la sexualité. Mais les invoquer n’explique pas fondamentalement pourquoi la nature ( ou l’Esprit ) a mis si précocement à la disposition de l’enfant des parties si précieuses de son corps, pour se livrer dessus à nombre d’expériences qu’il choisit de faire ( souvent ) ou qu’on l’oblige à faire ( plus rarement : c’est le sinistre domaine de l’abus sexuel ( Furniss T., 1993 ; Hayez J.-Y., de Becker E., 1997 ) 

§ III. Qu’en résulte-t-il ? 

---- En accédant à l’adolescence, puis à l’âge adulte, le grand nombre reste porteur du projet de transmission et veut le concrétiser par la procréation. De ce grand nombre, dans nos sociétés occidentales, beaucoup veulent le faire de manière « responsable » en programmant, judicieusement à leurs yeux, le nombre et les modalités de leur descendance. Au moins autant qu’à la transmission génétique, c’est à la transmission spirituelle qu’ils sont attachés : on peut l’illustrer via tous ces couples ( voire ces individus ) où il existe des obstacles biologiques à la procréation naturelle, et qui passent par la procréation assistée ou par l’adoption. 

Ce même groupe intègre quasi systématiquement sa sexualité à visée procréative à la création et au maintien du lien amoureux ; lien dont l’existence sera célébrée réciproquement par la sexualité à visée non procréative, habituellement bien plus abondante ! 

En ce troisième millénaire, lien amoureux n’est plus synonyme de fidélité pour la vie, comme on le voit dans quelques autres espèces de mammifères. Les liens se font et se défont ! En outre, pour beaucoup d’humains, la recherche du plaisir, au sens large du terme, devient une visée « artificielle » de leur sexualité, susceptible d’être dissociée de tout le reste. Ce plaisir, ils le trouvent soit dans les relations menées avec leur partenaire amoureux, soit au dehors : c’est particulièrement patent à l’adolescence où coexistent longtemps dans le désordre masturbations et autres activités plaisantes solitaires, jeux sexuels  et autres moments « d’éclate » partagés avec d’autres, liens amoureux plutôt instables et répétés au début, où s’intègre tôt ou tard la sexualité physique.

 ---- Un sous-groupe minoritaire n‘adhère pas au projet de transmission de la vie, soit en raison de difficultés physiques finalement acceptées ( par exemple : couple stérile sans enfant adopté ), soit parce qu’ils ne le veulent pas ( par exemple : des célibataires dans l’âme, la majorité des couples homosexuels ). Comme les membres du premier groupe, ils s’engagent dans des proportions et avec des mélanges variables dans le lien amoureux et dans la sexualité-plaisir, jusqu’à parfois n’investir que celle-ci : ce peut encore être normal et transitoire chez une partie des adolescents, avant création du lien.

 

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Notes  

 

2.   C’est par simplification que je fais des synonymes de tous ces termes. Etymologiquement, il y a des nuances que je ne reprends pas ici. Finalement, l’enfant est l’agent, l’auteur volontaire des actes qu’il pose. 

3.   Envie susceptible d’avoir des motivations multiples : entrer dans le monde du sexe, bien sûr, mais aussi : se montrer grand, se démontrer qu’on l’est ; rester l’ami de celui qui invite … 

4.   Angoisse notamment présente « la première fois ». 

5.     S’il y a un majeur et un enfant ou un jeune adolescent, ou un grand adolescent et un enfant impubère, on est toujours dans le contexte d‘un abus, même si les formes sont soft et séductrices, et même s’il y a consentement de la part du cadet.

6.   Peur de l’autre ? Peur de l’agressivité, parfois, mais aussi peur de perdre un ami, peur de passer pour un naze, etc. … 

7.   Je raisonnerai en référence à un adulte ou à un grand adolescent …. Mais finalement, moyennant quelques transpositions liées au degré de maturité de la personne, le phénomène peut s’observer à tous les âges de la vie. Il peut s’appliquer aussi à d’autres transgressions destructrices non-sexuelles. 

8.   Largement, mais rarement totalement ! Chez nombre d’entre nous, il persiste l’une ou l’autre « fixation » à une zone ou une activité du corps qui a été « chargée » de beaucoup de plaisir, voire d’autres émotions fortes, à une époque précoce de la vie : par exemple, intérêt persistant pour les jeux urinaires. Cette « fixation » s’active occasionnellement dans les fantasmes ou les  jeux préliminaires ou accompagnateurs d’activités sexuelles plus mûres.  Plus un être humain reste immature, plus cette zone peut conserver de l’importance,  jusqu’à la fixation perverse à laquelle se réduit alors le plus important de son projet sexuel.