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Un monsieur m’écrit:

Bonjour Monsieur,

En quête de certaines informations, je suis tombé sur votre site et sur votre article consacré à la sexualité chez l'enfant à l'âge de l'école primaire. Très intéressant!
Pour tout vous dire, cet article répond à beaucoup de questions, mais pas à toutes.
Voici une expérience singulière: Mon amie m'avait dit un jour qu'il n'y avait qu'une chose importante que je ne savais pas sur elle, sur son passé, dont elle a honte, qu'elle n'assume pas entièrement, qui ne la rend pas fière, bien au contraire.

Aujourd'hui, elle m'a tout dit: quand elle était au CM 1, à neuf ans donc, sa meilleure amie l'entraînait régulièrement (à chaque fois qu'elles dormaient l'une chez l’autre) dans des expériences sexuelles type caresses génitales en état de nudité, sexe contre sexe et bisous.
Par la suite, elle s'est rapprochée d'autres amies (qui sont aujourd'hui encore ses meilleures amies) et au fur et à mesure des années, elle les a à son tour entraîné dans ce genre d'activité, jusqu'à 12-13 ans.
Mais un élément la tracasse encore plus: du primaire au milieu du collège il lui arrivait de les convaincre de jouer à des scénarios sordides voire sadiques (violence, viol etc.) pour ensuite s'embrasser, se caresser etc. De surcroît, entre 12 et 14 ans, elle me dit que la masturbation était devenue une pulsion quotidienne, chaque soir, autour de scénarios sadiques dans son esprit. Elle se souvient que ces scénarios ont commencé à venir par des rêves. Puis en grandissant tout s'est effacé.

Sexuellement, elle est redevenue "innocente", a eu son premier rapport avec un garçon à 17 ans, n'a pas eu tant de partenaires que ça, n'a plus jamais pensé à ces scénarios sadiques, et a enfoui de plus en plus profond ces souvenirs d'enfance. Aujourd'hui, quelques-unes de ses amies qu'elle avait entraîné ont des difficultés dans leur vie sexuelle, elle se sent responsable pour une part. Le sujet est tabou entre elle et ses amies, avec qui mis à part cela elle s'entend à merveille.
Quant à moi, après lecture de votre article, je repère certaines choses comme normales, mais d'autres me posent question: pourquoi le sadisme? Comment de tels scénarios sont possibles à cet âge? (sa famille est unie, rien ne laisse entrevoir un quelconque "drame" d'enfance, Lisa n'a aucun traumatisme, n'a souvenir d'aucune violence et la sexualité est un thème abordé sans complexe entre la fratrie et les parents).

Je lui réponds:

Cher Monsieur,

Vous me donnez (inévitablement) trop peu d’éléments pour que je vous réponde autrement que par des généralités!

J’ai toujours comparé notre sexualité à une jungle plus ou moins luxuriante ou à un arbre fruitier avec ses branches hautes (notre sexualité dite "mûre") et basses (notre part de fixation à de la sexualité primitive!), toutes quelque peu tortueuses et en fouillis, plus ou moins étoffées selon les hasards de la vie!

Ne regardons d’abord que la fréquence de ce qu’a vécu votre amie en laissant de côté le contenu des jeux et des fantasmes.

Votre amie semble avoir été "hot" jusque ses treize-quatorze ans, puis s’être calmée. Pourquoi? Va savoir! Peut-être simplement une certaine dépendance par rapport à des plaisirs éprouvés par hasard chez elle comme super-excitants … Et puis, sa liberté qui reprend le dessus et elle qui refuse de continuer à être une sorte de pré-alcoolique du sexe! Magnifiquement humain, tout cela!

Bien humain aussi, et même bien sociable, le fait que pendant longtemps elle ait eu envie d’avoir des partenaires, plutôt que se regarder seule dans le miroir du sexe: c’est peut-être en rapport avec l’ouverture existant dans sa famille par rapport aux choses du sexe: le sexe, c’est bien plus agréable quand ça se partage et elle l’a très vite compris …

Et les contenus sadiques? Nous avons tous en nous une pulsion de mort (volonté de puissance, de soumission de l’autre, de destruction de la vie) qui s’exprime plus ou moins fort, soit pour des raisons spontanées ou non-élucidées, soit chez certains en réaction à une violence; les psychanalystes parlent alors d’identification à l’agresseur, et les phénoménologues, de vengeance à l’égard des épreuves de la vie (mais ce ne semble pas être le cas de votre amie)

Chez certains – et là pour des raisons vraiment mystérieuses –, la pulsion de mort se mélange à beaucoup de plaisir sexuel: c’est le sadisme. Le plaisir alors éprouvé peut être tellement fort qu’il devient, en soi, un incitant pour recommencer, jusqu’à chez certains pervers une vraie dépendance!

Notez toutefois que votre amie n’a jamais franchi deux frontières préoccupantes, qui installent franchement l’être humain du côté de la mauvaise santé mentale: le non-consentement de l’autre et la vraie dégradation des corps (comme on le voit dans les pratiques SM même consenties mais hard) Dans son chef, c’était des fantasmes ou des "jeux de rôle" encore symboliques ou quasi des mots et des gestes étaient là, mais tout le monde était d’accord et les corps n’étaient pas vraiment abîmés! 

Donc, rien de préoccupant, de telles productions de sexualité primitive nous habitent tous, chacune avec sa branche basse …

Comme beaucoup de personnes sensibles qui ont été à l’origine de l’activité sexuelle, elle se culpabilise à propos de ses amies. Relisez à ce sujet les autres échanges de courriels à propos de la culpabilité sexuelle.

Par ailleurs il est habituel que des humains qui restent amis en ayant eu des jeux sexuels enfants ou jeunes ados, n’en reparlent jamais: ce n’est pas du refoulement, c’est une page vraiment tournée en eux.