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L’angoisse accompagne souvent, au titre de symptôme, nombre de troubles de l’enfant. De temps en temps aussi, l'angoisse de l'enfant semble constituer " le " signe majeur, unique ou prépondérant, d'une désorganisation marquée par elle. Alors, non sans cette part d'arbitraire dans la délimitation des troubles que nous avons déjà signalée, on dit que l'enfant souffre d'un trouble anxieux.

 

En quoi consiste centralement l'expérience vécue d'angoisse?

 

Souvent, l'enfant peut en parler ou/et on peut  l'observer comme un « vécu » personnel désagréable qui mélange : 

---- Des représentations mentales idées, questions, peurs exprimées, image…), centrées sur la menace ou la mise en œuvre fantasmatique d'une agression    directe de son corps, de son psychisme ou/et de son territoire ... ou sur un abandon amenant lui aussi un retrait de protection et agression possible.

Dans certains cas, ces représentations mentales spécifiques sont absentes du champ de la conscience. On peut faire l'hypothèse alors qu'elles opèrent dans le psychisme inconscient, et qu'elles sont donc à l'origine de l'affect qui n'a que l'apparence d'être dissocié de son objet. c'est dans ces cas que l'on parle d'angoisse (peur sans objet) plutôt que d'anxiété

--- Un malaise corporel (" affects anxieux ") : tension désagréable dans tout le corps, avec exacerbations neuro-végétatives variables ; plus rarement décharge d'un organe-cible (vessie, tics ...) ; plus rarement encore mise hors circuit d'un organe (paralysie, dans le cadre d'une névrose hystérique ...) ; 

- un comportement, soit de type inhibition, soit de type agitation (" qui-vive anxieux ", comme pour échapper à un danger omniprésent ... ou fuite). 

N.B. Quand existent des représentations mentales conscientes mettant en scène l'agression, elles constituent souvent déjà comme une déformation, par rapport à d'autres, inconscientes, qui constituent " la raison centrale d'avoir peur ", mais auxquelles l'enfant n'a pas immédiatement accès.

Parfois, ce noyau central, ce sont des souvenirs de traumatismes réels ou l'effet simple jeu de l'imagination qui transforme, mélange et condense les images et souvenirs menaçants les uns avec les autres.

Parfois, c'est l'effet d'un refoulement qui ne réussit qu'imparfaitement, et laisse passer des rejetons anxieux déformés. Nous y faisons référence en étudiant le destin du refoulement dans la névrose. (Voir article « Névrose chez l’enfant ») 

Exemple : Après une information SIDA à l'école, une fillette (dix ans) se met à avoir très peur de la contamination possible par autrui. En psychothérapie, elle finit par découvrir qu'elle se reproche quelques désirs, jeux et transgressions sexuelles mineures, très mal vécues par elle. Sont refoulées alors et ses désirs et ses craintes d'être surprise et d'être punie cruellement pour ce qu'elle a fait. Ces " craintes centrales " sont déformées en une crainte secondaire : attraper le SIDA, en touchant des gens (elle qui s'est touchée avec beaucoup d'angoisse et de culpabilité ...).

 

 Pathogénie de l'angoisse 

 

A - Chaque expérience d'angoisse résulte du travail exclusif ou combiné des facteurs que voici : 

--- L'intelligence de l'enfant lui fait reconnaître la présence d'un danger réel susceptible de l'agresser, ou anticiper son retour. 

--- L'imagination lui fait s'inventer des dangers qui n'en sont pas pour la moyenne des enfants de son âge (1). L'imagination fonctionne avec une intensité variable selon les enfants et les âges de la vie ; elle est éventuellement alimentée par les messages des parents, qui peuvent être diffusément anxiogènes. 

--- L'équipement somatique cérébral qui prédispose à l'angoisse n'est pas le même d'un enfant à l'autre et explique partiellement cette intensité variable de l'imagination anxiogène. 

--- Quand il y a conflit intrapsychique, le danger n'est plus externe, mais interne. Des instances, dans l'être même de l'enfant, veulent des choses contraires. Le fait qu'il pourrait désobéir à l'une d'elles fâche les autres, et il se représente et vit douloureusement, sans bien les identifier ; les agressions qui s'en suivent : nous voici face au du conflit névrotique. 

Pour en rester à une application simple et fréquente, supposons qu'un petit garçon ait régulièrement le désir d'agresser sa sœur cadette, alors qu'il a également introjecté les interdictions parentales à ce sujet : lorsqu'il se représente son désir et, encore plus, lorsqu'il a la velléité de le réaliser, son imagination (ou son intelligence, peu importe) lui fait se représenter ipso facto de terribles agressions sur lui, en rétorsion. 

B - Le travail de ces facteurs est exclusif ou combiné. En voici un exemple : 

Telle fillette a horriblement peur d'être grondée par sa maîtresse d'école, parce que objectivement, celle-ci est plutôt sévère (analyse de l’intelligence), parce que les parents eux-mêmes sont des anxieux-conformistes qui lui font peur pour tout ou rien (stimulation de l’imagination). En outre, la fillette est très intelligente et secrètement ambitieuse. Au fond, elle voudrait épater la maîtresse et même être plus brillante qu'elle ; mais des voix en elle lui disent que cette prétention est mauvaise et interdite : centralement et inconsciemment, elle a peur d'être grondée pour ce qu'elle sait et qu'elle exhiberait ; cette idée centrale est refoulée ... le " rejeton conscient ", presqu'inverse, a été transformé en une peur d'être grondée pour tout et pour rien, pour ses petits manques quotidiens. 

C - Au fil du temps, certaines sources d'angoisse se tarissent ( perception plus fine de la composition " objective " du monde extérieur ; dégonflement du pouvoir attribué imaginairement aux adultes ) ... mais d'autres augmentent ( conflits intrapsychiques souvent de plus en plus intenses de par la complexification et l'intensification des pulsions, et de par les contradictions de plus en plus fréquentes entre les désirs, ou entre les désirs et les interdits introjecté, ou même entre les  interdits contradictoires provenant d'un monde social de plus en plus élargi ). 

D'autres sources restent en nombre imprévisible, et non lié à l'âge, ce sont les expositions aux dangers réels, ponctuels ou plus chroniques. Il faut se souvenir qu'un enfant montre parfois clairement qu'il a peur ... ou le dissimule vaille que vaille (retour d'énurésies, somatisations, évitement de certaines situations), parce qu'il est vraiment agressé (par exemple, instituteur particulièrement disqualifiant ; rackets à l'école ; abus sexuels ; mésentente conjugale ou alcoolisme parental dont il est interdit de parler, que les parents nieront éventuellement farouchement, etc. ...). 

IComment l'enfant aménage-t-il cette phase centrale d'expérience de l'angoisse ? 

Par " aménagement ", nous entendons la mise en place de comportements ou/et de fonctionnements psychiques chargés de : 

- Réduire l'inconfort de l'expérience du moment, notamment « en atténuant ou venant à bout du danger " (au sens très large du terme). 

- Prévenir le retour d'expériences du même genre. 

A- Aménagements volontaires (" comportements adaptatifs ").

 

En allant du plus prudent au plus puissant, il peut s'agir de : 

- Eviter de se réexposer au danger : par exemple, l'enfant reste calfeutré à la maison. (cf. les phobies sociales contemporaines) 

- Se conformer aux demandes de l'autre, vécu comme danger, plutôt que l'affronter. 

- Dissimuler les bêtises faites, les mauvais bulletins, etc. ... 

- Demander de l'aide, trouver un objet contre-phobique (parfois magique : un jouet-arme déposé sur la table de nuit !!). 

- Chercher à comprendre la nature du danger, trouver ses points faibles, s'entraîner à y faire face, de diverses manières : dialogue avec lui et négociations, contre-agressions bien préparées par l'intelligence, etc. ... 

 B- Aménagements à la limite volontaire - involontaire

 

- Certaines agressions, impulsives et violentes, dirigées contre l'objet dangereux. 

- Souvent, on constate que les TOC - obsessions et compulsions - ont pour fonction de conjurer magiquement ou de s'adapter caricaturalement à un danger. Par exemple : rites de rangement, de lavage, pensées magiques pour conjurer l'idée que, peut-être, on pourrait bien mourir, etc. ...

 C- Un aménagement involontaire : le refoulement

 

Le refoulement est un mode de fonctionnement très commun de notre psychisme, qui vise à effacer la représentation consciente d'idées et d'images désagréables. Du coup, l'affect pénible qui y est lié pourrait bien se dissoudre. En voici quelques exemples, appliqués aux représentations mentales anxieuses :

1° le vécu post-traumatique

 

 

Par la suite, plusieurs issues possibles :

 

 

 

 

2° exemple inverse :Enfants stucturés à l'inverse de la névrose : perversion sexuelle et psychopathie..l'exemple de la Perversion sexuelle

 

 

 

 

- Persistance des désirs de toute-puissance

- Refoulement réussi des A. I.

- Refoulement largement réussi des I.A.C. ; retour épisodique d'un rejeton anxieux ± travesti, qui sera nié par l'enfant et le provoquera à se montrer encore plus audacieux 

Clinique : les troubles anxieux

 

Lorsque les symptômes de l'angoisse passent à l'avant-plan dans la vie quotidienne, de façon transitoire ou durable, au point parfois d'occulter le reste, le consultant a la tentation plus ou moins fondée de définir les troubles de l'enfant à partir de ce phénomène-angoisse.

 Troubles habituellement diagnostiqués d'abord pendant la première enfance, la deuxième enfance ou l'adolescence :

 

 Troubles non liés à l'âge, mais susceptibles de concerner aussi les enfants :

 

 " Anxiété généralisée" : Enfant super-stressé ; son angoisse ne porte pas spécialement sur la séparation, mais " qui-vive " perpétuel, et, entre autres, beaucoup de questions sur l'avenir (santé, maladies, mort ...), sur le passé (scrupules ...), sur les petites choses de la vie quotidienne (toutes transformées en danger ...), sur les performances attendues.....

 " Phobie spécifique" : Peur intense concentrée sur des stimuli phobogènes spécifiques, isolés ou multiples, et objectivement peu ou pas dangereux : le loup, l’araignée, parfois l’ensemble du monde social (agoraphobie)." Phobie sociale": A partir de la pré-adolescence : peur de rater une performance attendue, d'avoir un défaut physique ou psychique, etc. ; MAIS la « peur » porte davantage sur l’humiliation que sur l’agression par les autres : c’est donc aussi un trouble narcissique…

Trouble " panique " sans agoraphobie" : Récurrence de crises d'angoisses très intenses, avec malaises physiques prononcés avec ou sans cause observable, et avec peur intercurrente d'avoir à nouveau une crise.

 Si l’angoisse est une réaction à un facteur externe dit stressant, selon la chronologie et l'intensité de la réaction, on parlera de " Trouble de l'adaptation avec anxiété" (réaction modérée et rapide), d' " Etat de stress aigu" (réaction intense et brève à un stress important ou d' " Etat de stress post-traumatique " (réaction intense et prolongée dans la durée). 

 Traitement de l'angoisse

A-Du côté des parents :

 

- rechercher avec eux les stimuli anxiogènes qu'ils mettent en circulation et les réduire si possible : bien informer l'enfant, surtout jeune, sur son environnement, sur son avenir, sur son corps ... les mots que l'on emploie l'inquiètent parfois douloureusement (par exemple, vers cinq ans : " Tu n'as rien dans la tête " ...). 

- Eviter que ne s'installent des conflits intrapsychiques trop lourds ; encourager l'affirmation de soi ... (cf. traitement de la névrose). 

- Face à la manifestation anxieuse elle-même : accueillir, écouter, expliquer, ne pas ridiculiser, encourager parfois à affronter le danger (sans violence) ... ne pas donner les bénéfices secondaires d'une protection excessive.

 B- Du côté de l'enfant :

 

- Psychothérapie de soutien (écoute + dimension cognitivo-behavioriste d'encouragement et d’information) ou psychothérapie analytique si composante névrotique. 

- Intérêt aussi des thérapies familiales où l'on met ensemble la parole adressée à l'enfant et à ses parents. 

- Anxiolytiques ? C'est un pis-aller ! Attention à la possible dépendance créée par les benzodiazépines ; utiliser les formes-retard ! Seulement si angoisses intenses, récidivantes, grevant la vie sociale ... et si traitement de fond connexe. Certains enfants sont anxieux et déprimés (par exemple, phobies scolaires) et bénéficient mieux d'antidépressifs. 

Notes 

(2 )  Et donc, ces dangers " imaginaires " seront donc, eux aussi, soit bel et bien perçus dans l'environnement (une araignée ...), soit anticipés objectivement, soit anticipés indûment (le voleur derrière la tenture). 

(3)   Du moins dans sa forme fréquente, où l'on a à faire à un conflit entre désir et assignations introjectées qui interdisent celui-ci. Pour rappel, il existe d'autres types de conflits (conflits de désirs, p. ex.).