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Un adulte m’écrit:

Bonjour,

J'ai 38 ans, marié avec 2 enfants.

Je vous contacte suite à la lecture d'un échange de courriel sur votre site, intitulé "j'ai abusé de ma cousine". En effet, à l'âge de 17 ans j'ai été l'auteur d'un passage à l'acte sur la personne d'un petit garçon de 8 ans. J'étais dans les vestiaires d’une piscine plutôt déserts et j'ai profité de ma position pour "emballer" cet enfant. Un sourire, un clin d’œil et il m’a suivi dans une cabine. Je n'ai pas réussi à contrôler une pulsion et j'ai incité cet enfant a me masturber. Cela a été très bref.

Juste après cet acte j'ai éprouvé beaucoup de dégout de moi même et je ne comprends toujours pas à ce jour ce qui m'a conduit à cela. J'ai abusé de cet enfant sans violence mais par séduction cela est arrivé une seule fois (une de trop d'ailleurs) et je n'ai jamais recommencé.

J'ai tenté depuis toutes ces années à enfouir en moi ce terrible secret. Il a ressurgit à plusieurs reprises avec toujours pour effet d'un effondrement de mon estime et des épisodes dépressifs. J'ai conscience de la portée de mon geste et de l'effet dévastateur possible sur cet enfant et sur sa vie d'adulte. J'essaye en vain de me dire que mon état de conscience à cet époque ne me permettait pas de mesurer les conséquences de mon geste. Aussi je suis prêt aujourd'hui à assumer les conséquences de ceci et à prendre mes responsabilités. Cependant j'ai de multiples questions : sous réserve que je parvienne à retrouver cet enfant, est-il lui en demande de cette démarche ? Si aujourd’hui par bonheur il a retrouvé un équilibre comment va-t-il vivre ma demande de pardon et de réparation ? cela ne risque t-il pas de le déstabilisé à nouveau ? Mon désir de me repentir n'est-il pas égoïste et ne vais-je pas encore en faisant cela lui imposer quelque chose qu'il ne souhaite pas?

Je n'ai pas eu le courage jusqu'alors de parler à qui que ce soit de mon geste et vous êtes le premier à qui je le livre. j'espère un retour de votre part afin de me donner votre point de vue et le cas échéant quelques repères qui me seraient utiles.

Je lui réponds:

Cher monsieur,

Je me réjouis pour vous du courage que vous avez trouvé à vous exprimer et à faire part de ce que vous appelez "cet horrible secret", et de la confiance que vous me faites.

Bien sûr, ce que vous avez fait est un abus, et l’honnête homme que vous êtes manifestement n’en est pas fier, et s’en sent très coupable. J’apprécie que vous ne vous cherchiez pas d’excuses (par exemple, celle de votre propre minorité; ou encore, le fait qu’il n’y ait pas eu de violence physique ni verbale!) Sauf peut-être que, en bon ado, au moment même, vous n’évaluiez pas bien les conséquences (ceci, c’est très typique de tous les ados!)

Lisez dans mon livre "La sexualité des enfants" (Odile Jacob) ce que je dis du dérapage sexuel : quelqu’un d’habituellement sociable se dévoie transitoirement, puis se reprend de lui-même. Les raisons peuvent être variées, depuis la mauvaise passe dépressive jusqu’au besoin d’expérimenter une fois la puissance de Mal que l’on a en soi. Je pense que cela vous concerne à 100%. Et maintenant, c’est l’heure de vous pardonner à vous-même et, pour réparer cet égarement, de veiller à faire dans votre vie suffisamment d’actes bons. Notre humanité à tous, fait de nous un mélange de ressources et d’imperfections, de bien et de mal, d’égo centration et d’altruisme. Votre faute a été réelle mais toutes nos vies sont émaillées – un peu plus, un peu moins – de fautes réelles. Quand nous sommes des types "bien", le combat vers le Bien se gagne, mais c’est toujours un combat. Que vous soyez chrétien, d’une autre religion ou laïque, je vous invite à entrer sur Google "Evangile de la femme adultère" et à bien vous pénétrer de ce qui y est dit. ("Que celui qui n’a jamais péché jette la première pierre ... et ils s’en allèrent un par un, à commencer par les plus vieux...") Et croyez-moi, c’est un monsieur de 68 ans qui vous parle, tout à fait concerné par ce qui y est dit.

La meilleure façon de réparer vis-à-vis de ce jeune garçon, c’est de lui f ... une paix royale. Lisez aussi, dans le même chapitre de mon livre, ce que je dis des épines sexuelles: Expériences sexuelles le plus souvent isolées, qui égratignent moralement sans vraiment tout détruire ni pervertir. Mon expérience de terrain dans tout le champ des abus me fait penser que ce jeune a très probablement vécu l’expérience comme une épine : c’était un moment de séduction isolé venant de quelqu’un qu’il identifiait probablement comme une sorte de grand frère un peu vicelard, et pas comme une Image paternelle. Donc quelqu’un du même groupe générationnel que lui, ce qui est toujours moins traumatisant que lorsque la barrière intergénérationnelle est franchie. Il est très probable qu’il a rapidement intégré cette expérience dans son monde intérieur, sans se sentir détruit par elle. C’est en tout cas ce que je pense sincèrement. Je souhaite de tout cœur que l’espérance et la confiance reviennent en vous et que vous soyez d’abord et avant tout un bon père pour vos enfants.

Cordialement.

 

 

Mots-clés:

abus sexuel isolé, dérapage sexuel, épine sexuelle, mineur auteur d'abus, culpabilité sexuelle, séduction sexuelle d'un mineur